Partager:
La tension est à son comble entre l'Inde et le Pakistan. Après des menaces répétées ces derniers temps, les deux armées ont échangé des tirs.
EN DEUX MOTS :
- L’Inde a frappé des cibles au Pakistan après un attentat meurtrier, provoquant des échanges d’artillerie très violents le long de la frontière du Cachemire.
- Les affrontements ont causé la mort de plusieurs dizaines de civils et de blessés, tandis que les tensions entre les deux puissances nucléaires s’aggravent rapidement.
- Islamabad dément toute responsabilité et dénonce des provocations, pendant que les appels internationaux au calme se multiplient pour éviter une escalade militaire.
L'Inde et le Pakistan se sont bombardés mercredi, faisant au moins 26 morts côté pakistanais et 8 côté indien, la confrontation militaire la plus grave entre les deux pays depuis deux décennies.
Depuis que des hommes armés ont abattu 26 hommes au Cachemire indien le 22 avril, le feu couvait entre les deux puissances nucléaires, rivales depuis leur partition en 1947.
L'escalade diplomatique a viré à l'affrontement mlilitaire dans la nuit de mardi à mercredi.
Les deux armées ont échangé des tirs d'artillerie le long de leur frontière contestée au Cachemire, après des frappes indiennes sur le sol pakistanais en représailles à l'attentat de Pahalgam.
Lors de ces frappes, "neuf camps terroristes (...) ont été détruits", a affirmé devant la presse une porte-parole de l'armée indienne, la lieutenante-colonelle Vyomika Singh.
Les missiles indiens qui ont plu sur six villes au Cachemire et au Pendjab pakistanais et les échanges de tirs qui ont suivi ont tué au moins 26 civils et en ont blessé 46 autres, a indiqué le porte-parole de l'armée d'Islamabad, le général Ahmed Chaudhry.
Ces tirs ont également endommagé le barrage hydroélectrique de Neelum-Jhelum, a-t-il ajouté.
Avions au sol
L'Inde a pour sa part fait état de huit morts et 29 blessés dans le village cachemiri indien de Poonch (nord-ouest) lors des tirs d'artillerie.
Engagée dans la nuit, la bataille s'est poursuivie le matin autour de la localité, cible de nombreux obus pakistanais, selon des journalistes.
"Nous avons été réveillés par des tirs (...) j'ai vu des obus tomber (...) j'ai eu peur que le toit ne s'écroule", a rapporté à l'agence Press Trust of India (PTI) un habitant de Poonch, Farooq.
De violentes explosions ont aussi secoué plus tôt dans la nuit autour de Srinagar, la principale ville de la partie indienne du Cachemire.
Au matin, une source sécuritaire indienne a indiqué que trois chasseurs de l'armée de l'air indienne s'étaient écrasés, pour des raisons qui n'ont pas été immédiatement précisées.
Le sort de leurs pilotes n'a pas été précisé.
Un photographe a observé les débris d'un aéronef dans un champ à Wuyan, non loin de Srinagar. L'avion est un Mirage 2000 de l'armée de l'air indienne, a indiqué une source sécuritaire indienne.

Le ministre pakistanais de la Défense, Khawaja Asif, a pour sa part assuré que le Pakistan avait abattu "cinq avions ennemis", sans donner plus de détails.
Le Comité de la sécurité nationale, convoqué uniquement pour les urgences extrêmes à Islamabad, a commencé sa réunion dans la matinée.
Sitôt après l'attentat de Pahalgam, l'Inde a mis en cause le rôle du Pakistan, qui a aussitôt démenti toute implication.
"Un grand boum"
L'un des sites ciblés dans la nuit par l'armée indienne est la mosquée Subhan, à Bahawalpur, dans le Pendjab pakistanais, liée selon le renseignement indien à des groupes proches du mouvement jihadiste Lashkar-e-Taiba (LeT).
L'Inde accuse ce groupe, soupçonné des attaques qui avaient fait 166 morts à Bombay en 2008, d'avoir mené l'attaque du 22 avril.
Au Pendjab pakistanais, Mohammed Khourram, un habitant de Mouridke, une autre ville visée, a raconté avoir entendu "un grand boum, très bizarre".
"J'ai eu très peur, comme si c'était un tremblement de terre. Puis un missile est arrivé et a frappé, et un second une minute après, trois ou quatre ont suivi pendant les trois ou quatre minutes suivantes", a-t-il poursuivi.

Les représailles indiennes ont été accueillies avec satisfaction dans les rues de New Delhi. Le Premier ministre Narendra Modi "a vengé les morts (du 22 avril)", s'est réjoui G.B. Rajakumar, un chauffeur de la capitale.
Environ 200 Pakistanais ont défilé tôt mercredi matin dans la ville méridionale de Hyderabad, brûlant des drapeaux indiens et des portraits de Narendra Modi.
Dans la nuit, le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio s'est entretenu avec ses homologues indien et pakistanais, les appelant au dialogue pour "désamorcer la situation", selon la Maison Blanche.
"L'escalade a atteint un niveau supérieur à celui de la dernière crise survenue en 2019, avec des conséquences potentielles terribles", s'est inquiété l'analyste Praveen Donthi, du centre de réflexion International Crisis Group (ICG).
Guerre de l'eau
Cette année-là, New Delhi avait frappé le sol pakistanais après une attaque meurtrière contre un de ses convois militaires au Cachemire.
La Chine a appelé les deux pays "à éviter de prendre des mesures qui compliqueraient davantage la situation", tandis que la France les a exhortés "à la retenue".
La porte-parole de l'armée indienne a souligné que les cibles visées avaient été "choisies pour éviter tout dommage aux infrastructures civiles ou toutes pertes civiles".
New Delhi doit accueillir mercredi le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, qui était lundi à Islamabad pour une médiation.
Mardi soir, Narendra Modi avait annoncé son intention de "couper l'eau" des fleuves qui prennent leur source en Inde et irriguent le Pakistan - une menace impossible à mettre à exécution à court terme, selon les experts.
"L'eau appartenant à l'Inde s'écoulait jusque-là vers l'extérieur, elle sera désormais stoppée pour servir les intérêts de l'Inde", a déclaré M. Modi.
Dès le lendemain de l'attentat, l'Inde avait suspendu sa participation à un traité de partage des eaux signé en 1960 avec son voisin.
Mardi, le Pakistan avait accusé l'Inde de modifier le débit du fleuve Chenab, l'un des trois placés sous son contrôle selon le traité dit de l'Indus.
Le monde appelle à la retenue
Le chef de l'ONU Antonio Guterres "appelle les deux pays à la retenue militaire", a déclaré son porte-parole, Stéphane Dujarric, ajoutant que "le monde ne peut pas se permettre une confrontation militaire" entre l'Inde et le Pakistan.
Le président américain Donald Trump a dit mardi espérer que les affrontements entre l'Inde et le Pakistan "s'arrêtent très rapidement". Son chef de la diplomatie Marco Rubio "encourage l'Inde et le Pakistan à rouvrir un canal de discussion entre leurs dirigeants afin de désamorcer la situation et d'éviter une nouvelle escalade", a indiqué Brian Hughes, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.
Le gouvernement britannique s'est dit mercredi "prêt" à intervenir pour une "désescalade" entre les deux pays voisins. L'Inde et le Pakistan ont "un intérêt dans la stabilité régionale", a déclaré le ministre du Commerce britannique Jonathan Reynolds sur la BBC. "Tout ce que nous pouvons faire en termes de dialogue, de désescalade, nous sommes prêts et en mesure de le faire", a-t-il dit.
La Chine a indiqué mercredi "déplorer" les frappes indiennes contre le Pakistan, se disant "préoccupée" par la nouvelle escalade des tensions entre ses deux voisins, qu'elle appelle à la "retenue". "Nous appelons l'Inde et le Pakistan à donner la priorité à la paix et à la stabilité, à rester calmes, à faire preuve de retenue et à éviter de prendre des mesures qui compliqueraient davantage la situation", a indiqué dans un communiqué un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
Pékin s'est également dit prêt à jouer un "rôle constructif" dans l'apaisement des tensions entre les deux pays.
Le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a appelé mercredi l'Inde et le Pakistan "à la retenue" et à protéger les civils. "Nous comprenons l'aspiration de l'Inde à se protéger contre le fléau du terrorisme, mais nous appelons évidemment l'Inde comme le Pakistan, à la retenue pour éviter l'escalade et évidemment à la préservation des civils", a déclaré M. Barrot, sur la chaîne TF1.
Enfin, le Kremlin s'est dit "profondément préoccupé par l'escalade de la confrontation militaire" entre les deux pays, exhortant les "parties à faire preuve de retenue pour éviter une détérioration supplémentaire" de la situation.

















