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Des combats meurtriers entre armée et paramilitaires font rage au Soudan: 8 Belges évacués et une trentaine encore sur place

Huit Belges et leurs ayants droit (membres de leur famille proche) ont été évacués du Soudan, où un conflit armé a éclaté la semaine passée, a indiqué la ministre des Affaires étrangères Hadja Lahbib lundi matin. Une trentaine de citoyens belges se trouve toujours sur place, mais la grande majorité d'entre eux n'a pas exprimé le souhait de quitter le pays, a-t-elle ajouté.

Selon le SPF Affaires étrangères, 42 Belges et leurs ayants droit se trouvent actuellement au Soudan et une collaboration avec la France et les Pays-Bas a été mise en place afin d'évacuer aussi vite que possible les Européens qui le demandent. Grâce à ce mécanisme, huit Belges et leurs familles ont déjà pu quitter le Soudan, a annoncé la ministre Lahbib lundi matin, avant le début du Conseil européen des ministres des Affaires étrangères. 

Parmi les personnes évacuées se trouve notamment Wim Fransen, chef de la section soudanaise de la Direction générale de la protection civile et de l'aide humanitaire européenne (ECHO). Ce dernier avait été blessé la semaine dernière lors des premières flambées de violence. Une trentaine de Belges se trouve toujours au Soudan. "Mais une grande partie d'entre eux n'a pas exprimé de volonté de partir", a affirmé la ministre. Il est par ailleurs possible que d'autres opérations d'évacuation soient organisées, mais rien n'est encore certain. "Tout dépend de la situation sécuritaire sur place." 

La ministre Hadja Lahbib a également voulu souligner le travail réalisé par le personnel diplomatique, ainsi que l'efficacité de la coopération avec des pays tels que la France, Djibouti, la Jordanie, l'Allemagne et les Pays-Bas.

Plusieurs pays ont commencé dimanche à évacuer leurs ressortissants ou leur personnel diplomatique du Soudan où les combats meurtriers entre armée et paramilitaires font rage depuis plus d'une semaine.

Deux avions militaires français transportant 200 personnes de différentes nationalités ont ainsi atterri à Djibouti.

L'armée allemande a annoncé avoir évacué par avion militaire 101 personnes du Soudan. "Le premier Airbus A400M est sur le chemin de la Jordanie avec ses 101 évacués", a indiqué cette armée sur Twitter, précisant que deux autres avions avaient été dépêchés au Soudan pour participer aux évacuations.

L'Egypte, grand voisin du nord, a annoncé l'évacuation "par voie terrestre de 436 ressortissants" alors que tirs et explosions ont encore secoué dimanche la capitale soudanaise Khartoum, selon des témoins. 

Le pape François a appelé au "dialogue" face à la "grave" situation dans le pays, où, depuis le 15 avril, les deux généraux au pouvoir depuis leur putsch de 2021 se sont lancés dans une guerre sans merci. 

Les violences, principalement à Khartoum et au Darfour, dans l'ouest, ont fait selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) plus de 420 morts et 3.700 blessés.

Elles ont déplacé des dizaines de milliers de personnes vers d'autres Etats du Soudan, ou vers le Tchad et l'Egypte.

Magasins incendiés 

Le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont annoncé l'évacuation de leurs diplomates, avec leurs familles, quand l'Italie, la Turquie et d'autres pays ont indiqué qu'ils allaient tenter d'évacuer leurs ressortissants.

Une "opération très complexe", selon le ministre néerlandais des Affaires étrangères Wopke Hoekstra qui a annoncé l'évacuation de deux groupes de Nééralnadais : le premier à bord d'un avion français et l'autre a quitté Khartoum par la route dans un convoi de l'ONU. 

"Les acteurs internationaux auront moins de poids quand ils auront quitté le pays", estime Hamid Khalafallah, chercheur spécialiste du Soudan. "Ne laissez pas les Soudanais derrière sans protection", plaide-t-il.

A Khartoum, les cinq millions d'habitants craignent une intensification des violences après le départ des étrangers, dans leur ville privée d'eau courante et d'électricité, avec des réseaux téléphonique et internet souvent défaillants.

Les raids aériens de l'armée et les tirs de canon des paramilitaires ont déjà détruit ou obligé à fermer "72% des hôpitaux" dans les zones de combat, selon le syndicat des médecins.

Dans les rues, des lampadaires gisent au sol, des magasins incendiés fument encore. Ici, une banque a été éventrée. Là, malgré tout, un mécanicien tente de garder son échoppe ouverte au cas où un des très rares passants aurait besoin de ses services.

Le conflit a éclaté le 15 avril entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan, et son adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo, qui commande les très redoutés paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).  

"Dans le noir" 

Les deux généraux avaient pris le pouvoir avec un putsch en 2021 qui a brutalement interrompu la transition démocratique lancée à la chute du dictateur Omar el-Béchir en 2019. 

Mais ils se sont divisés sur la question de l'intégration des FSR aux troupes régulières, après des mois de négociations politiques sous égide internationale.

Alors que les deux camps se livrent aussi à une guerre de l'information, il est impossible de savoir qui contrôle les institutions du pays ou les aéroports et dans quel état ils se trouvent après avoir été le théâtre de violents combats.

Des prisonniers ont été libérés d'au moins une prison, ont indiqué des avocats alors que d'autres sources rapportent, sans que personne n'ait pu le vérifier, des attaques contre deux autres prisons, notamment celle de Kober qui accueille l'ensemble des détenus politique dont Béchir.

Cette semaine, l'Aïd el-Fitr, qui marque la fin du ramadan, a eu un goût amer pour les habitants de Khartoum. 

"On vit dans le noir: d'abord, on nous a coupé l'eau courant, puis on n'a plus eu d'électricité", se lamente l'un d'eux, Awad Ahmed Chérif.

Les conditions de vie sont probablement pires au Darfour, théâtre déjà d'un terrible conflit dans les années 2000, où personne ne peut se rendre dans l'immédiat.

Sur place, un docteur de Médecins sans frontières (MSF) évoque une "situation catastrophique".

Au Soudan, troisième producteur d'or d'Afrique et pourtant l'un des pays les plus pauvres au monde, les services de santé sont à genoux depuis des décennies et un tiers des 45 millions d'habitants souffre de la faim.

L'arrêt des opérations de la plupart des organisations humanitaires va aggraver la situation. Et le conflit menace désormais de gagner du terrain au-delà des frontières du Soudan, selon des experts.
 

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