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« Qui croit vraiment que la Russie va perdre en Ukraine ? » Les propos « controversés » de Bart De Wever atteignent l’Europe de l’Est

Par RTL info avec Belga
Ça s’est passé lundi soir à Bruxelles lors d’une conférence donnée par le Premier ministre Bart De Wever. Interrogé sur les raisons de sa volonté de ne pas donner les avoirs russes immobilisés chez nous à l’Ukraine, comme l’Europe le souhaiterait, une phrase de sa réponse a eu un écho particulier dans les pays les plus menacés par Moscou.

« Qui croit vraiment que la Russie va perdre en Ukraine ? C’est une fable, une illusion totale. Ce n’est même pas souhaitable qu’elle perde et que l’instabilité s’installe dans un pays qui a des armes nucléaires », a déclaré Bart De Wever lundi.

Ces propos ont reçu un important écho dans la presse ukrainienne. L’agence RBC-Ukraine les a qualifiés « controversés », ajoutant que « la Belgique continue d’inventer de nouvelles excuses pour s’opposer à la confiscation des avoirs russes ». À l’inverse, une source diplomatique de l’Union européenne a déclaré au média polonais TVP World que si les propos de De Wever étaient « complexes », ils n’étaient pas dénués de pragmatisme : « Il faut faire preuve de réalisme dans ce débat. La Russie n’a pas atteint ses objectifs militaires. Mais elle ne capitulera pas pour autant. Elle ne sera pas humiliée », ce qu’une retraite totale et donc une victoire de l’Ukraine impliquerait.

Moscou nous a fait savoir qu’en cas de saisie, la Belgique et moi, personnellement, allions le sentir passer pour l’éternité
Bart De Wever, Premier ministre

Bart De Wever, lui, a regretté que ses phrases aient été mises en avant sans reprendre l’entièreté de son raisonnement, que voici. Répondant à une question du rédacteur en chef de La Libre sur le dossier Euroclear, il a expliqué : « La pression dans ce dossier est incroyable. J’ai une équipe qui travaille jour et nuit sur ce sujet. Ce serait une belle histoire de prendre l’argent du méchant, Poutine, pour le donner au gentil, l’Ukraine. Mais voler des avoirs immobilisés d’un autre pays, ses fonds souverains, cela n’a jamais été fait. Il s’agit de l’argent de la Banque centrale russe. Même durant la Seconde Guerre mondiale, on n’a pas confisqué l’argent de l’Allemagne. Pendant une guerre, on immobilise les avoirs souverains et à la fin de la guerre, l’État perdant doit abandonner tout ou partie de ces avoirs pour dédommager les vainqueurs. Mais qui croit vraiment que la Russie va perdre en Ukraine ? C’est une fable, une illusion totale. Ce n’est même pas souhaitable qu’elle perde et que l’instabilité s’installe dans un pays qui a des armes nucléaires. Qui croit que Vladimir Poutine va accepter calmement la confiscation des avoirs russes ? Moscou nous a fait savoir qu’en cas de saisie, la Belgique et moi, personnellement, allions le sentir passer pour l’éternité. Cela me semble une période assez longue… La Russie pourrait aussi confisquer certains avoirs occidentaux. Euroclear a 16 milliards en Russie. Toutes les usines belges en Russie pourraient aussi être prises. Et si la Biélorussie et la Chine confisquaient également les avoirs occidentaux ? A-t-on réfléchi à tout cela ? Non, on ne l’a pas fait. J’ai interrogé mes collègues européens afin de savoir s’ils étaient prêts à mutualiser les risques courus par la Belgique. Seule l’Allemagne a dit qu’elle était prête à le faire. Sans cette mutualisation, je ferai tout pour bloquer ce dossier, tout. À l’issue de cet épisode, si j’ai un job international après le 16, ce sera pour faire la vaisselle », a-t-il répondu.

Dîner entre De Wever, Merz et von der Leyen ce vendredi

Dans ce dossier, le chancelier Friedrich Merz est présent ce vendredi en Belgique pour « convaincre » Bart De Wever du bien-fondé du plan de la Commission européenne de recourir aux avoirs russes gelés. Le dirigeant allemand a reporté un voyage en Norvège pour un « dîner privé » avec notre Premier ministre et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.

« Je veux discuter (…) de la manière dont nous pouvons faire avancer ma proposition, que la Commission a maintenant traduite en textes juridiques », a souligné M. Merz lors d’une conférence de presse jeudi soir. Mercredi, l’exécutif européen a présenté un plan pour financer l’Ukraine sur deux ans, mais l’une des options retenues, ce recours aux avoirs russes gelés en Europe, se heurte toujours au refus de notre pays car c’est chez nous qu’est basée la société Euroclear, qui détient quelque 210 milliards d’euros de ces avoirs sur les 235 milliards présents dans l’UE.

« Je ne veux pas le persuader », a dit M. Merz, mais « le convaincre que la voie que nous proposons ici est la bonne » pour « aider l’Ukraine ». Selon la proposition de la Commission européenne, l’Allemagne « serait l’un des États garants possibles pour une sécurisation correspondante de ces actifs », a-t-il rappelé. « Mon objectif n’est pas seulement de convaincre le gouvernement belge, mais aussi (tout) le Conseil européen » dont le prochain sommet, les 18 et 19 décembre, sont « la dernière occasion cette année » d’obtenir un accord, a-t-il encore souligné.

Les Européens se sont engagés fin octobre à trouver des solutions pour financer l’Ukraine au cours des deux prochaines années, afin de garantir que Kiev ne se retrouve pas à court de ressources malgré le retrait progressif des Américains.

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