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L'industriel indien Gautam Adani, plus grande fortune d'Asie avec un empire allant des mines de charbon aux aéroports en passant par les médias, se trouve au coeur d'un scandale financier après des accusations de fraude provenant d'une société d'investissement américaine.
En deux jours, le milliardaire est passé de la troisième place du classement des hommes les plus riches au monde à la septième place, selon le classement Forbes des plus grandes fortunes.
La valeur de son patrimoine a fondu de 22,6 milliards de dollars sur la seule journée de vendredi. Sa fortune personnelle est à présent estimée à 96,6 milliards de dollars.
Agé de 60 ans, Gautam Adani se décrit lui-même comme un introverti. "Je ne suis pas une personne sociable qui veut aller à des fêtes", avouait-il au Financial Times en 2013.
Né à Ahmedabad, dans l'Etat occidental du Gujarat en Inde, dans une famille de classe moyenne, il a abandonné ses études pour travailler brièvement dans l'industrie du diamant avant de lancer son entreprise d'exportation en 1988.
En 1995, l'homme d'affaires qui cherchait alors à diversifier ses activités a remporté le contrat de construction et d'exploitation du port de commerce de Mundra, devenu depuis le plus grand de l'Inde. Dans le même temps, il s'est lancé dans la production d'énergie thermique et dans l'extraction de charbon dans son pays et à l'étranger.
Ces dernières années, le conglomérat a fait une incursion dans la pétrochimie, le ciment, les centres de gestion de données ou encore le raffinage du cuivre.
- Controverses -
Mais des controverses ont entaché certaines de ses entreprises. Comme son rachat en 2010 d'un bassin houiller inexploité en Australie qui a entraîné des années de manifestations en raison des inquiétudes suscitées par l'impact environnemental monumental du projet.
Ou encore ses projets d'exploitation du charbon dans le centre de l'Inde, où des forêts abritant des communautés tribales ont été abattues pour les opérations minières.
Considéré comme un proche soutien du Premier ministre nationaliste hindou Narendra Modi, le milliardaire a inauguré ces dernières années une entreprise d'énergie verte aux objectifs ambitieux, investissant dans les priorités stratégiques du gouvernement.
Il a lancé en 2022 une offre d'achat hostile visant le radiodiffuseur New Delhi Television (NDTV), considéré comme la dernière grande voix "quasi indépendante" du paysage audiovisuel indien. Une manoeuvre qui a éveillé de vives craintes pour la liberté de la presse dans ce pays très peuplé.
Le magnat s'est défendu en déclarant au Financial Times que les journalistes devaient avoir le "courage" de dire "quand le gouvernement fait ce qu'il faut tous les jours".
- "Profondément surendetté" -
L'expansion rapide du groupe dans des activités exigeant énormément de capital a toutefois suscité des inquiétudes, l'agence CreditSights de Fitch Group ayant averti en 2022 que l'empire était "profondément surendetté".
Et, cette semaine, un rapport explosif de la société d'investissement américaine Hindenburg Research l'a accusé de fraude.
Elle a allégué que le groupe Adani avait eu recours à des transactions non divulguées entre parties liées et à la manipulation des bénéfices pour "maintenir l'apparence de bonne santé financière et de solvabilité" de ses filiales cotées en Bourse.
Le rapport indique qu'un modèle d'"indulgence du gouvernement à l'égard du groupe" s'étendant sur des décennies a fait que les investisseurs, les journalistes, les citoyens et les politiciens n'ont pas voulu remettre en question la conduite du groupe "par crainte de représailles".
Des accusations rejetées par le conglomérat indien, qui se préparait à une importante levée de fonds et qui a dénoncé jeudi une attaque de réputation "malicieusement malveillante" de la part d'Hindenburg. Il a perdu plus de 45 milliards de dollars de capitalisation boursière depuis la publication du rapport.
"Ces questions touchent au cœur du secteur des entreprises indiennes, où dominent un certain nombre de conglomérats contrôlés par des familles", a fait valoir Gary Dugan, directeur général du Global CIO Office, à Bloomberg.
"Par leur nature même, ils sont opaques et les investisseurs mondiaux" doivent se fier à la bonne foi des entreprises, selon lui.
Le titre d'Adani Enterprises a clôturé en baisse de 18,52% à la Bourse de Bombay. La cotation des actions de cinq sociétés du groupe ont été suspendues.