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La crise s'aggrave entre la France et l'Algérie. Hier, Paris a décidé de rappeler son ambassadeur et d'expulser 12 agents consulaires algériens. Il s'agit de représailles contre l'expulsion de 12 fonctionnaires français. L'affaire est très compliquée, elle mêle justice et diplomatie, et pourrait compromettre la libération de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal.
En quinze jours, les relations entre l'Algérie et la France ont connu un retournement spectaculaire. Ils semblaient pourtant sur la voie de la réconciliation, après un appel téléphonique entre Emmanuel Macron et son homologue algérien, le 31 mars. Peu après, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, s’était rendu à Alger pour amorcer la reprise de la coopération.
Le contentieux initial portait sur le refus des autorités algériennes d’accepter le retour d’une soixantaine de délinquants frappés d’expulsion en France. Le ministre avait aussi plaidé la cause de Boualem Sansal, 80 ans, condamné le 27 mars par la justice algérienne à cinq ans de prison pour atteinte à l’unité nationale. Le romancier, fraîchement naturalisé français, avait écrit dans l’un de ses livres qu’avant la colonisation, la partie ouest de l’Algérie appartenait au Maroc.
Des tractations diplomatiques discrètes, mais efficaces, semblaient en bonne voie... jusqu’à ce que tout s’effondre.
Vendredi dernier, la police française a arrêté trois ressortissants algériens, dont un agent consulaire. Ils sont soupçonnés d’être impliqués dans l’enlèvement et la séquestration d’un influenceur algérien opposé au régime et réfugié en France. En réaction, Alger a expulsé 12 membres du personnel diplomatique français. Paris a répliqué en appliquant le principe de réciprocité : 12 diplomates algériens ont également été renvoyés.
Les positions paraissent aujourd’hui inconciliables. L’Algérie considère que l’arrestation de ses trois ressortissants est un geste politique, tandis que la France insiste sur le fait qu’il s’agit d’une procédure judiciaire, indépendante du pouvoir exécutif.
En toile de fond, un enjeu de fond : Alger veut garder un œil sur ses opposants installés dans l’Hexagone. Une volonté que Paris ne peut accepter. Le précédent de Medhi Ben Barka hante les mémoires : cet opposant marocain avait été enlevé le 29 octobre 1965 à Paris et on ne l’a jamais revu.
Aujourd’hui, la situation est bloquée. Mais l’Élysée a appelé à l’apaisement, déclarant : "Les hostilités doivent cesser. S’engager dans une nouvelle épreuve de force ne fera qu’aggraver la situation". Et de rappeler que "l’intérêt même de la France et de l’Algérie est de reprendre le dialogue".
Une chose est sûre : l’indépendance de 1962 n’a pas mis fin aux liens étroits entre la France et son ancienne colonie. Bien au contraire ; on estime entre 2 et 6 millions le nombre d’Algériens ou de Franco-Algériens vivant en France. Il s’agit de la première communauté immigrée du pays. Il n’y a pas d’autre issue que l’entente : Paris attend désormais un geste d’Alger, qui pourrait tout débloquer. Par exemple : la libération de Boualem Sansal.


















