Accueil Actu Vos témoignages

"Elle n'y a pas droit parce qu'elle est Belge": la fille de Catherine cherche un logement à Lyon, elle y est victime de discrimination

Lucie a décidé de poursuivre ses études universitaires en France. En cherchant un logement à louer, elle tombe des nues : sa nationalité belge la défavorise. 

Lucie (nom d'emprunt) est étudiante en langue, elle apprend le japonais. Elle entre cette année en Master et a décidé de poursuivre ses études à Lyon. La jeune femme vient de Fleurus et doit donc loger sur place avec un ami, pendant un an.

Alors qu'elle était en séjour à l'étranger, Lucie a demandé à sa maman Catherine (nom d'emprunt), d'aller visiter des logements étudiant pour elle.

Sur place, la maman se rend compte qu'elle va devoir faire face à de nombreux problèmes.

"Il n'y avait pas énormément de logements à Lyon" confie-t-elle. Elle fait alors appel à une agence immobilière pour l'aider dans sa recherche.

Cette dernière leur trouve un appartement qui remplit leurs conditions. "Nous étions les seuls sur l'appartement, il n'était pas encore mis en location sur le site. Nous avons été visiter, mon mari et moi."

750 kilomètres et aucune nouvelle

Première étape pour elle, remplir les nombreux papiers. "Comme nous sommes Belges, nous avons beaucoup au niveau des assurances. Et alors on devait avoir des garants."

Les parents du colocataire de Lucie vont alors se porter garants. Pourtant, Catherine apprend qu'elle n'obtient pas l'appartement. "Ils ont rentré tous les papiers qu'il fallait et ça bloquait encore apparemment. Nous n'avons jamais eu d'échos."

Nous étions désemparés et tristes

Elle qui avait fait le voyage ne comprend pas ce manque de communication. "Nous avons quand même fait 750 kilomètres et nous en sommes revenus sans certitude. Nous étions vraiment désemparés et vraiment tristes."

La Fleurusienne va alors voir l'agence et lui demande les raisons de ce refus. "L'agence a fait ce qu'il faut. Mais c'est le propriétaire qui loue l'appartement qui décide quelle personne il va accepter."

"Les propriétaires français acceptent peu les garants belges"

Selon elle, si le propriétaire lui a refusé la location, c'est parce qu'elle est Belge. "Apparemment, les propriétaires français acceptent peu les garants belges. C'est au cas où nous ne payerions pas, les huissiers ne pourraient pas passer la frontière."

La rentrée approchant à grands pas, la situation commence à inquiéter Catherine. "Notre fille était déjà inscrite à la fac, donc il nous fallait absolument un appartement."

Catherine se tourne alors vers un ami français. "Il s'est porté garant aussi. Il a fait tout nécessaire et il est passé par la comptabilité." Miracle, l'agence l'appelle : elle a l'appartement. Elle se demande alors "ce qui a joué dans cette location"

C'était galère malgré tout parce que nous sommes Belges

Deux possibilités lui apparaissent : ils ont été acceptés, car le deuxième garant est français ou parce qu'il gagne mieux sa vie.

Selon elle, la seconde est peu probable. "Nous avons prouvé que nous étions de bons payeurs". Dans les documents qu'elle a rentrés, Catherine a fourni ses fiches de salaires, celles de son mari, mais également la preuve qu'ils possèdent deux maisons et un terrain. Autrement dit, ils ont prouvé qu'ils gagnaient bien leur vie.

"Ma fille n'y a pas droit parce que nous sommes Belges"

Plus de doute pour elle, "c'était quand même galère malgré tout parce que nous sommes Belges". D'autant plus que l'université dans laquelle étudie Julie proposait des kots étudiants… Mais indisponibles pour les étudiants non-français.

"Ma fille, elle ne peut pas avoir un logement à l'école. Autrement, il y en a, mais elle ne peut pas parce qu'elle n'est pas française", estime-t-elle. 

Ces logements sont nettement moins chers que ceux qu'elle a visités en ville, "les petites chambres sont entre 300 € et 400 €, contre 900 € en ville. Mais ma fille n'y a pas droit du tout parce que nous sommes Belges". 

Une situation anormale pour elle, car "quand les étudiants français viennent étudier ici en Belgique, ils n'ont aucun souci. Ils trouvent même un logement à l'école".

Une discrimination légale en Europe ? 

L'article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme explique justement qu'il est interdit de discriminer quelqu'un selon sa nationalité.

"La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation."

Autrement dit, aucun pays ayant signé cette convention n'autorise la discrimination d'une personne pour sa nationalité. Légalement, il est donc interdit aux propriétaires français de refuser un logement à des locataires, sous peine que ces derniers sont belges.

Pourquoi refuser des locataires belges, si c'est illégal ? 

Deux raisons motiveraient les propriétaires français à refuser des locataires étrangers.

Premièrement, "les propriétaires sont souvent frileux, car les pièces justificatives demandées peuvent ne pas prendre la même forme qu’en France" énonce l'Alliance Solidaire des Français de l’Étranger (ASFE) sur son site.

Deuxièmement, l'ASFE explique qu'il est "plus difficile de mettre en œuvre une procédure de recouvrement en cas de défaillance du locataire si le garant ne réside pas en France".

En effet, en cas d'impayé, le propriétaire devrait attendre entre 18 à 24 mois pour la procédure d'expulsion, avec un locataire ou un garant qui n'est pas français. La dette locative commencerait alors à s'accumuler.

De nombreux étudiants dans la même situation

Pourtant, comme l'explique la loi n°89-462 du 06 juillet 1989, tendant à améliorer les rapports locatifs, "il est interdit à un bailleur ou à son mandataire de refuser une caution au motif qu'elle n'a pas la nationalité française ou qu'elle n'est pas domiciliée sur le territoire métropolitain".

En mai dernier, une question sur les logements pour étudiants étrangers avait été posée sur la page du Sénat. Elle affirme que "40 % des étudiants étrangers rencontrent des difficultés pour trouver un logement en France".

L'auteur interroge le ministre en charge des logements sur les "dispositions que le Gouvernement compte mettre en place afin d'aider les étudiants étrangers à trouver un logement pour leurs études en France". 

Jusqu'à présent, cette question est restée sans réponse.

À lire aussi

Sélectionné pour vous

Commentaires

3 commentaires

Connectez-vous à votre compte RTL pour interagir.

S'identifier S'inscrire
  • Le racisme existe entre Français de diverses régions cela vous étonne ??? Bientôt ce sera entre "ethnies" mais c 'est pas vrai çà n'existe pas pour les dirigeants ?????

    Jean CARLIER
     Répondre
  • Moyens de recouvrements très compliqués en cas de problème. La discrimination a bon dos, mais bon, ce mot sonne comme "victime" on aime bien ça

    Rémi Jocaille
     Répondre
  • en cas de non-payement, c'est compliqué de poursuivre quelqu'un à l'étranger, d'où l'hésitation des bailleurs . En France, les garanties demandées sont extrêmement sévères et ils ont raison, quand on voit le nombre de mauvais payeurs qui continuent à occuper et même à détériorer les biens en Belgique, ça devrait faire réfléchir. Il ne s'agit donc pas ici de discrimination sur base de la nationalité .

    roger rabbit
     Répondre