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A l'instar des bateaux de la Coupe de l'America devenus de véritables fusées au-dessus de l'eau, les planches à voile vont elles aussi voler à des vitesses folles pour battre des records: la "planche du futur" est le projet du windsurfeur Antoine Albeau, 25 fois champion du monde, et d'un spécialiste de "l'ultra performance", Marc Amerigo.
A une vingtaine de kilomètres au sud-ouest de Paris, Antoine Albeau, colosse de 100 kilos, simule une virée sur l'eau. Debout sur sa planche, en combinaison avec casque et lunettes, il manie sa voile avec dextérité malgré un vent qui souffle à quelque 70 km/h.
Tout ceci se passe dans l'un des hangars de l'Institut AéroTechnique (IAT) de Saint-Cyr-l'Ecole (Yvelines), véritable laboratoire consacré à l'aérodynamisme, créé en 1911 et qui a accueilli en son temps... le char Leclerc.
Entre des tests de véhicules militaires ou de tout type de mode de transport (avion, train, voiture), l'IAT a ouvert ses grandes souffleries à la voile pour la conception de la planche du futur.
Nom de code: Zephir. Il s'agit du projet imaginé par Marc Amerigo, dans lequel il a impliqué Antoine Albeau mais aussi plusieurs acteurs du monde moderne de la voile, comme l'Allemand Martin Fischer, co-designer du bateau challenger de la 36e Coupe de l'America, Luna Rossa. Un bijou de technologie équipé de foils (appendices qui permet de voler) qui pourrait inspirer la planche du futur rêvée par Amerigo.
- Hybride -
"Cette planche n'existe pas encore. C'est un projet sur une base de trois ans. Ce sera quelque chose d'hybride. Mon travail c'est d'aller chercher les vitesses les plus rapides à la voile", explique Marc Amerigo.
Et les records de vitesse, il s'y connait puisqu'il est derrière le record du monde de vitesse en VTT sur neige de Eric Barone, surnommé "le Baron rouge", soit 227,720 km/h.
Pour l'instant, Amerigo et Albeau n'en sont pas encore là, les deux hommes se sont rencontrés il y a six mois. Mais depuis le projet s'est emballé et dans les hangars de l'IAT, ce sont une multitude de mesures qui sont prises, avec des simulateurs, des capteurs, des scan 3D, etc.
"On va vraiment analyser les flux d'air qu'Antoine (Albeau) va générer avec sa voile, vraiment comprendre ce qu'il se passe au niveau aérodynamique entre Antoine et sa voile, pour essayer de l'optimiser", souligne Amerigo.
"Sous le plancher de la soufflerie, la planche est attachée à une balance qui mesure les efforts dans les trois directions, sur les trois axes et qui permet de re-calculer immédiatement les forces de trainée, les forces de portance et les forces latérales, qui s'appliquent sur l'ensemble planche et planchiste", abonde Clodoald Robert, qui dirige l'IAT.
- Engin du futur -
Antoine Albeau, lui, s'active comme s'il était sur l'eau. Il reçoit le vent, via des ventilateurs géants. Il fait même froid !
"L'idée c'est d'être vraiment en position de navigation, en position de tentative de record du monde de vitesse", relève le windsurfeur.
Antoine Albeau détient le record du monde de vitesse en planche à voile. En 2015, il avait atteint 53,27 noeuds (98,65 km/h). Il a même connu des points de vitesse à plus de 100 km/h.
Multiple champion du monde et plusieurs fois recordman, Antoine Albeau s'est lancé sans hésiter sur ce projet, qui tombait "pile à point" pour l'athlète, qui s'interrogeait sur la pertinence de continuer à aller chercher un titre de plus.
"On va faire évoluer les vitesses d'Antoine, simuler l'inconnu en s'appuyant sur ce qui existe. Pour cela, on va jouer sur trois univers: la planche classique, la planche à foil et l'engin du futur", dit Amerigo.
Après ces tests en soufflerie, le premier semestre 2021 sera consacré à "la conception et la réalisation des premiers prototypes de voiles/ailes du futur et de wingsuits (combinaison) pour Antoine et à l'amélioration des records actuels en windsurf et windfoil".
L'engin du futur devrait ensuite être conçu courant deuxième semestre 2021.