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Le secteur de la petite enfance se met en grève ce jeudi: "J'ai fini l'année 2023 avec une perte d'exploitation de plus de 22.000 euros"

Le secteur de la petite enfance en Fédération Wallonie-Bruxelles se mobilise face à une crise sans précédent, amplifiant la pénurie de places. Les crèches privées sont appelées à se mettre en grève ce mercredi.

Le secteur de la petite enfance sera en grève, ce mercredi, à l'appel de six syndicats. Ce mouvement de mobilisation fait écho à une crise profonde qui affecte particulièrement les crèches privées en Fédération Wallonie-Bruxelles. Ces structures, qui représentent environ un quart de l’offre totale, se trouvent dans une situation critique, exacerbant la pénurie de places d'accueil pour les jeunes enfants. Chaque année, des fermetures se succèdent, réduisant encore un peu plus l'accès des familles à des solutions adaptées.

Sabine Coderlier, directrice d'une crèche privée, illustre parfaitement cette réalité. Ancienne cadre reconvertie dans le secteur de la petite enfance il y a 12 ans, elle est aujourd'hui confrontée à des défis financiers de plus en plus intenables. "J'ai fini l'année 2023 avec une perte d'exploitation d'un montant de plus de 22.000 euros", confie-t-elle, précisant qu’elle a dû sacrifier son propre salaire pour maintenir son établissement à flot. Malgré sa passion pour son métier et les liens qu'elle tisse avec les enfants et les parents, l'équilibre économique semble hors d'atteinte.

Un déséquilibre privé/public

La situation des crèches privées contraste de manière frappante avec celle des crèches subventionnées. Alors qu’une crèche communale dispose de 23.200 euros par place et par an, une crèche privée doit se contenter de seulement 10.000 euros, assure Philippe van Ophem, co-fondateur de l’ASBL Impactoo. Cette inégalité financière rend la gestion de ces structures extrêmement difficile, au point que certaines sont qualifiées de "quasi-faillite virtuelle" par des experts ayant étudié la question. En conséquence, 1.700 places ont disparu en seulement quatre ans, laissant les autorités et les familles face à une demande croissante qui dépasse largement l'offre disponible.

Pour enrayer cette hémorragie, les acteurs du secteur plaident pour une augmentation significative des aides publiques. Actuellement de 1.500 euros par place et par an, elles devraient atteindre au moins 4.500 euros pour permettre la survie des crèches existantes et encourager l'ouverture de nouvelles structures. "Cela va non seulement permettre de sauver toutes les places qui aujourd'hui disparaissent à vitesse grand V, mais aussi de créer un cadre qui va permettre à de nouvelles crèches de s'ouvrir", souligne Daniel Verougstraete, co-fondateur de l’ASBL Impactoo.

Une task force pour la petite enfance

Consciente de l'urgence, la ministre de la Petite Enfance Valérie Lescrenier (Les Engagés) a annoncé des mesures pour répondre à cette crise. Parmi celles-ci, la création d’une task force visant à trouver des solutions économiquement viables d'ici 2026. "Je voudrais mener une étude sur les différentes formules qui sont sur la table ici au niveau de la viabilité économique des milieux d'accueil", explique-t-elle. Par ailleurs, elle prévoit l'ajout de 5.000 places d'accueil d'ici 2030. Cependant, alors que le déficit actuel s'élève déjà à 16.000 places, ces engagements peinent à rassurer pleinement les professionnels et les familles concernées.

Cette grève est donc un cri d’alarme pour accélérer les actions et éviter que les fermetures ne se multiplient davantage. Pour Sabine et les autres crèches privées, le temps presse. "C'est effectivement urgent. Je ne veux pas travailler dans l'urgence pour amener la réponse la plus sereine possible", insiste la ministre. En attendant, le secteur reste suspendu aux résultats des efforts entrepris pour garantir un avenir stable et équitable aux milieux d'accueil pour les plus jeunes en Fédération Wallonie-Bruxelles.

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