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Trois ans après le meurtre de son frère, Zakia dénonce : « Il y a eu un manque total d’humanité »

Par RTL info avec Amélie Schildt et Thomas Decupere
Il y a trois ans, un boucher des abattoirs d’Anderlecht a perdu la vie, assassiné par un collègue. Sa sœur, qui prend la parole, dénonce un système judiciaire qu’elle considère comme violent et inhumain envers les victimes.

« Ce parcours est tellement lourd que j’ai l’impression qu’on me demande de baisser les bras, de laisser tomber, que c’est bon. Mais je ne baisserai pas les bras, je ne baisserai pas les bras ». Ces mots sont ceux de Zakia, dont le frère a été assassiné il y a trois ans.

En mai 2022, alors qu’il travaille derrière son comptoir de boucher aux abattoirs d’Anderlecht, une dispute éclate avec l’un de ses collègues. Ce dernier lui assène un coup de couteau mortel dans l’abdomen. Des caméras de surveillance filment toute la scène. Après cinq jours de procès, le boucher est reconnu coupable de meurtre et condamné à 16 ans de prison.

Nous retrouvons Zakia chez elle, trois ans après les faits. La sœur de la victime ne parvient pas à faire son deuil, encore bouleversée par son expérience en cour d’assises. « Il y a eu un manque total d’humanité. Moi, par exemple, j’ai eu droit à la parole une seule fois, en tant que témoin de moralité, puisque je suis sa sœur. Je m’approche de la présidente et je parle au nom de mes nièces, en disant que, plus tard, il faudra leur expliquer pourquoi leur papa est parti un jour travailler et n’est jamais revenu. (…) Elle me dit : « Madame, il y a des psys pour ça. » Et là, vous vous dites : soit je pète un plomb et on me met dehors, soit je reste calme. Je suis restée calme ».

Si Zakia peine à avancer, c’est aussi parce qu’elle reste noyée dans les procédures administratives. La cour d’assises lui a accordé 7 000 euros d’indemnisation. Mais le meurtrier étant insolvable, la jeune femme doit se tourner vers le Fonds d’aide aux victimes d’actes intentionnels de violence. C’est ce fonds qui doit décider de lui accorder ou non des indemnités.

« Ce qui est violent, dans la manière dont se déroule la communication, c’est que la victime est amenée une nouvelle fois à prouver sa qualité de victime. Mais elle l’a déjà prouvé. Et au bout d’un moment, la victime s’épuise », explique Maxime Parewyck, l’avocat de Zakia.

J’ai reçu énormément de témoignages

Notre justice belge manquerait-elle d’humanité ? Les magistrats sont-ils suffisamment formés à la dimension psychologique ? Si l’approche varie selon les juges, l’institution semble toutefois amorcer des progrès. Denis Goeman, juge au tribunal de première instance de Bruxelles, explique à ce sujet : « Il faut savoir que l’Institut de formation judiciaire prévoit aussi, pour tous les nouveaux magistrats, des formations, notamment sur la gestion de l’audience. C’est-à-dire que des magistrats qui doivent siéger ont suivi ces formations, et doivent pouvoir faire en sorte que cela se passe au mieux ».

Pour faire entendre sa voix, Zakia raconte son combat dans un livre, comme un exutoire. « J’ai reçu énormément de témoignages de personnes victimes qui me remerciaient, qui l’avaient lu ou acheté, et qui me disaient : ‘En fait, on se rend compte qu’on n’est pas seuls’».

Bientôt, le meurtrier d’Ismaël pourra espérer bénéficier d’une libération conditionnelle… et c’est bien là, la plus grande crainte de Zakia.

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