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Tensions et anxiété règnent dans les échanges entre Elon Musk, le nouveau propriétaire de Twitter, et de nombreux utilisateurs soucieux de comprendre comment il compte donner corps à sa vision de la liberté d'expression sur l'influente plateforme.
Mercredi, le multimilliardaire a assuré que les comptes ayant été suspendus du réseau social ne seraient pas restaurés avant "quelques semaines", le temps de mettre en place un "processus clair".
Il a ainsi écarté l'hypothèse que Donald Trump revienne sur Twitter à quelques jours d'élections cruciales aux Etats-Unis.
L'ancien président américain avait été évincé de la plateforme peu après l'assaut du Capitole en janvier 2021, accusé d'avoir appelé ses partisans à la violence.
Il a depuis affirmé qu'il ne reviendrait jamais sur Twitter après avoir lancé son propre réseau, Truth Social, à l'audience confidentielle. Mais beaucoup estiment qu'il sera tenté de retrouver ses dizaines de millions d'abonnés sur la plateforme qui était au cœur de sa communication politique.
Or Elon Musk avait estimé en mai que ce bannissement constituait "une décision mauvaise moralement et insensée à l'extrême".
L'entrepreneur libertarien défend une vision absolutiste de la liberté d'expression.
Mais depuis jeudi, il souffle le chaud et le froid autour de la mise en pratique, promettant aux uns que le réseau ne deviendra pas invivable, et aux autres de mettre fin à la "censure".
- "Signaux mitigés" -
Elon Musk veut former un conseil de modération des contenus. Il a aussi affirmé avoir discuté avec plusieurs ONG de défense des droits des minorités sur "comment Twitter continuera à lutter contre la haine et le harcèlement".
"Il envoie des signaux mitigés", constate Suzanne Nossel, la directrice de Pen America, une association de défense de la liberté d'expression. "Il est en train de se rendre compte que (la tâche) est plus ardue qu'il ne semble à première vue".
Un collectif de près de 50 associations de défense de la démocratie ou de lutte contre la désinformation a exhorté les plus gros annonceurs sur Twitter (dont Coca-Cola, Google et Disney) à menacer Elon Musk de cesser toute publicité sur le réseau si jamais il "liquidait" la modération de contenus.
General Motors a déjà annoncé suspendre temporairement ses dépenses sur la plateforme.
Mercredi, Elon Musk a demandé dans un sondage à ses 113 millions d'abonnés si les annonceurs devraient "soutenir la liberté d'expression" ou "le politiquement correct".
Plusieurs associations de défense des minorités, craignant un regain d'abus (harcèlement, racisme, désinformation), appellent de leur côté à mieux policer l'application.
"Les discours de haine sous couvert de +liberté d'expression+ sont inacceptables", a tweeté la chanteuse afro-américaine Toni Braxton, annonçant qu'elle quittait la plateforme. "Twitter n'est plus un endroit sûr pour moi, mes fils et d'autres personnes des minorités".
Pour certains ultraconservateurs, au contraire, la libéralisation ne va pas assez vite. L'éditorialiste Benny Johnson demande ainsi à Elon Musk de licencier des cadres de Twitter qui ont "censuré" certains sujets pour "restaurer la confiance du public".
"Être attaqué aussi bien par la gauche que par la droite, c'est bon signe", a plaisanté le fantasque dirigeant.
- Désinformation -
"Il est convaincu que les discours des conservateurs sont censurés sur Twitter, alors que les études prouvent que ce n'est pas le cas", remarque Suzanne Nossel.
Elle espère qu'il va revenir sur cette fausse hypothèse et comprendre "pourquoi nous accordons de la valeur à la liberté d'expression", comme la capacité de dialoguer, de persuader et de faire émerger des idées intéressantes.
"Quand une place publique est noyée sous la désinformation, qu'on ne peut plus faire la part du vrai et du faux et que les gens se détachent parce qu'ils ne trouvent pas d'informations valables... alors les bénéfices de la liberté d'expression disparaissent", élabore-t-elle.
Sur le principe, Elon Musk semble en accord avec cette approche.
"Notre but est de faire de Twitter la source d'information la plus fiable sur Terre, quelle que soit l'affiliation politique", a-t-il déclaré mercredi, vantant les mérites de "Birdwatch", un programme de Twitter qui permet d'adosser à des messages disputés du contexte rédigé par des contributeurs indépendants.
La Maison Blanche a ainsi retiré mercredi un tweet qui vantait la hausse des retraites grâce à Joe Biden, alors que la note de contexte rappelait le rôle joué par une loi de 1972 sur les pensions.
Mais dimanche, Elon Musk a relayé une théorie du complot sur l'agression du mari de Nancy Pelosi, la cheffe des démocrates au Congrès. Il a lui-même supprimé son tweet par la suite.