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Gisèle Pelicot, victime pendant une décennie, de viols par une cinquantaine d'hommes jugés actuellement à Avignon, a remercié lundi les manifestants qui ont défilé à travers la France et en Belgique samedi pour la soutenir: "Grâce à vous tous, j'ai la force de mener ce combat jusqu'au bout".
"Je dédie (ce combat) à toutes les personnes, femmes et hommes, à travers le monde, qui sont victimes de violences sexuelles. A toutes ces victimes, je veux leur dire aujourd'hui, 'Regardez autour de vous, vous n'êtes pas seuls'", a dit Gisèle Pélicot en marge du procès qui a débuté le 2 septembre à Avignon.
La suite du procès des viols de Mazan est plongé dans un épais brouillard lundi, l'état de santé du principal accusé, Dominique Pelicot, absent depuis une semaine, ne s'étant pas amélioré. L'audience a été suspendue jusqu'à mardi pour qu'une expertise médicale soit réalisée. Le résultat de "cette expertise devrait être donnée en fin de journée. Tant que nous n'avons pas cette expertise, nous ne pouvons pas nous positionner", sur la suite de ce procès, a déclaré le président de la cour criminelle de Vaucluse Roger Arata.
Dominique Pelicot, qui droguait sa femme aux anxiolytiques pour la violer et la faire violer pendant son sommeil durant dix ans par des dizaines d'inconnus recrutés sur internet, avait refusé de comparaître lundi matin. Il a subi dimanche un scanner et souffre d'un "calcul rénal, d'une infection rénale et d'un problème au niveau de la prostate", a précisé M. Arata. Son absence remet en cause la suite de ce procès fleuve emblématique des ravages de la soumission chimique et des violences sexuelles où sont jugés 50 autres hommes en plus de Dominique Pelicot.
"Situation anormale"
"Les mots manquent pour exprimer à quel point la situation où nous nous retrouvons ce matin est anormale. Il y a des personnes dont le travail est de s'assurer que M. Pelicot est en état d'assister à son procès", a estimé à l'audience l'un des avocats des parties civiles, Stéphane Babonneau. "Si cette situation est due à un retard de prise en charge, ce serait un scandale", a-t-il ajouté.
L'avocat général a lui indiqué "regretter cette situation" et maître Béatrice Zavarro, l'avocate de Dominique Pelicot, a de son côté fustigé le manque de prise en charge médicale de son client. "On a été pris en otage pendant huit jours (au moment où les douleurs de M. Pelicot sont apparues, NDLR) car s'il avait été pris en charge dès le début, on n'en serait pas là", a-t-elle expliqué à l'audience. "Mais c'est sûr qu'il veut toujours s'exprimer, il le fera", a insisté l'avocate.
Si Dominique Pelicot, qui documentait tous les viols en filmant et prenant des photos minutieusement classées sur son ordinateur, a reconnu les faits, il ne s'est encore jamais expliqué en détail à son procès. Son témoignage est aussi crucial pour le cas des autres hommes, de 26 à 74 ans, jugés pour viol. Un renvoi de ce procès, très suivi en France et à l'étranger, provoquerait de nombreuses complications: "Il faut tout refixer, un agenda, la disponibilité de la salle, du tribunal, etc. Et quid de ceux qui sont en détention ? (c'est le cas de 18 des 51 accusés, NDLR) Parce qu'à ce moment-là, je peux supposer qu'il y aura des demandes de mise en liberté", avait assuré jeudi Béatrice Zavarro.
Peu avant l'audience, Gisèle Pelicot a elle remercié lundi les quelque 10.000 manifestants qui ont défilé à travers la France samedi, brandissant son visage stylisé, pour la soutenir: "Grâce à vous tous, j'ai la force de mener ce combat jusqu'au bout".
"Toutes Gisèle"
Les faits visant M. Pelicot avaient éclaté au grand jour après que celui-ci a été interpellé en train de filmer sous les jupes de trois femmes, dans un centre commercial de Carpentras (Vaucluse). En fouillant dans son ordinateur, les enquêteurs avaient alors découvert une décennie de viols perpétrés sur son aujourd'hui ex épouse Gisèle au domicile conjugal, situé à Mazan (Vaucluse). Devenu le symbole de la question des agressions commises sur des personnes victimes de soumission chimique, ce procès est aussi pris en exemple par les mouvements féministes pour relancer le débat sur le consentement.
Et Mme Pelicot, qui a refusé que ce dossier soit jugé à huis clos, est devenue une figure de la lutte contre les violences sexuelles.