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Surpopulation dans les prisons: 143 détenus dorment à terre, admet la ministre de la Justice

La ministre de la Justice, Annelies Verlinden, a déclaré que la surpopulation carcérale sera le principal défi de son mandat. Elle a aussi admis que la nuit dernière, 143 détenus ont dû dormir sur un matelas à même le sol dans une des prisons du pays. 

La nuit dernière, 143 détenus ont dû dormir sur un matelas déposé à même le sol dans une des prisons du pays, a indiqué mardi la nouvelle ministre de la Justice Annelies Verlinden (CD&V) aux députés de la commission Justice. La surpopulation carcérale reste un problème majeur et sera le principal défi de son mandat, avec actuellement 12.724 personnes se trouvant en prison (dont environ 3.850 en détention préventive et 1.000 "internés" qui ne devraient pas y être) pour 11.044 places, a-t-elle détaillé. Et cela sans compter 704 "détenus" qui sont en congé pénitentiaire prolongé pour le moment.

La nouvelle équipe débutera avec un inventaire des capacités, a indiqué la ministre aux élus. Elle se mettra ensuite sans attendre au travail. "Les fondements" de l'amélioration visée "sont dans l'accord de gouvernement", a-t-elle rappelé.  

Le gouvernement compte par exemple sur une meilleure collaboration avec les pays d'origine, sachant que 31% des détenus, selon les chiffres donnés par la ministre, n'ont pas de titre de séjour valable. Ils doivent pouvoir quitter plus rapidement le système pénitentiaire belge, estime-t-elle. Le gouvernement a également "clairement décidé que la voie des peines alternatives doit être poursuivie".  

Au rayon des mesures à plus court terme, de premières constructions modulaires ont déjà été commandées, pour augmenter rapidement le nombre de places, et la ministre a envoyé la semaine dernière une circulaire pour prolonger d'un mois des mesures d'urgence contre la surpopulation: entre autres, la suspension de l'envoi des billets d'écrou pour les personnes qui viennent d'être condamnées à une peine de prison, mais cette fois uniquement pour les peines de moins de 3 ans (jusqu'à récemment, c'était valable pour les peines jusqu'à 5 ans de prison).  

Des représentants de Maisons de Justice montent au créneau

Avant la prise de parole de la ministre, lors de ce débat consacré à la problématique de la surpopulation carcérale, des représentants de l'administration des Maisons de Justice, dépendantes des Communautés, ont dressé un état des lieux très critique.  

Pour la Communauté française, Annie Devos, administratrice générale des Maisons de Justice, a tenu à rappeler que les changements législatifs en matière de justice entrainent des conséquences en chaîne. On ne fait souvent que "déplacer les problèmes", regrette-t-elle. Un exemple : certaines amendes sont tellement lourdes que les juges préfèrent prononcer des peines de travail. Ou des législations sévères en matière de sécurité routière, qui ont pour conséquence une inflation des dossiers de roulage qui parviennent aux Maisons de justice dans le cadre d'une probation. "On nous a déjà mis les peines alternatives à toutes les sauces", ajoute-t-elle, pointant que, plutôt que de les utiliser pour remplacer un emprisonnement, la justice semble avoir tendance à les additionner. "On devrait faire des analyses d'impact", suggère-t-elle.  

"Il va falloir à un moment donné se poser la question de la priorisation, voire de quotas d'exécution", explique-t-elle encore, tenant à tordre le cou à certains mythes: "Nous avons des peines extrêmement longues en Belgique, c'est quelque chose qui n'est pas suffisamment connu". Il y a aussi des "légendes urbaines" au sujet de l'exécution des peines: "54% des détenus ne sont pas libérés avant les deux tiers de leur peine. Et beaucoup vont à fond de peine", indique-t-elle.

Par ailleurs, et c'est un constat qu'elle répètera dans ses interventions: on ne reconnait pas suffisamment la pénibilité des peines alternatives. "La surveillance électronique, ce n'est pas le Club Med. C'est extrêmement exigeant".

Bob Van den Broeck, administrateur général de l'agence flamande en charge de la Justice (Justitie en Handhaving), n'a pas été plus tendre dans ses propos, parlant de conditions "dangereuses et invivables pour les détenus et le personnel" des prisons belges. "Quand je suis en visite de travail aux Pays-Bas, il est difficile de ne pas revenir rougi de honte".  

Il s'en est pris aussi aux mesures d'urgence prises sous la houlette du ministre précédent, Paul Van Tigchelt (Open Vld), dont le congé pénitentiaire prolongé, un "cautère sur une jambe de bois, et illégal". Une "recette du désastre, avec les bons baisers des autorités belges", a-t-il encore lancé, estimant qu'on néglige ici les victimes et les personnes qui s'engagent dans la réintégration. Via les Maisons de justice, les entités fédérées sont entre autres compétentes pour l'exécution des peines, mais elles ne peuvent remplir leur mission dans ce cadre, estime-t-il.

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