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Une famille séquestrée six jours, des billets volants et une fin tragique : retour sur la plus longue prise d’otages jamais vue en Belgique

Par RTL info avec Dominique Demoulin, Guillaume Bruwier et Véronique Forest
Une villa cossue dans une commune tranquille de la région liégeoise, voilà le théâtre de la plus longue prise d’otages qu’ait connu le pays.

Nous sommes le samedi 16 septembre 1989. Trois malfaiteurs s’introduisent dans la maison d’un gérant de banque à Tilff, Guy Jeuris, en région liégeoise. Présents dans la maison ce jour-là, en plus du banquier, sa femme et leurs deux filles.

Pour la négociation, le gangster français Philippe Delaire a choisi son flic. Ce sera Jacques Léonard, personne d’autre. « J’étais le seul homme sur lequel il savait mettre un visage », se rappelle le policier. « Je l’avais entendu dans une dizaine de braquages et le courant était passé. »

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Une tension qui grimpe d’heure en heure

Les heures passent, les nerfs sont à vif. Les malfaiteurs retiennent les otages dans la villa. Delaire est connu pour ses braquages, ses évasions et même un meurtre. Ce n’est pas un inconnu pour le procureur Pierre Romijn, chargé de la grande criminalité au parquet de Liège. « J’arrive sur place vers minuit 15, minuit 30 », se souvient-il. « C’est le calme plat. »

Delaire et ses complices avaient investi la maison le samedi. Ils comptaient vider les coffres de l’agence bancaire dont Guy Jeuris est le gérant. Mais le week-end, le système de sécurité est renforcé. Les malfaiteurs attendent le lundi. « Or, dans la soirée de dimanche, le banquier parvient à s’enfuir », raconte le procureur.

Marie-Madeleine Jeuris et ses 2 filles sont désormais à la merci de malfaiteurs lourdement armés. « J’ai peur », peut-on entendre dire à la police une des filles dans une archive audio, enregistrée du téléphone.

« On est attachées au radiateur », explique la maman. « Ils sont prêts à dégoupiller au-dessus de notre nez. »

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Dès le dimanche, la villa est encerclée. Des centaines de policiers et gendarmes, ainsi que l’escadron spécial d’intervention, se déploient autour de la maison. Le siège commence. « Tout le monde est sur les nerfs », indique Jacques Leonard, le policier en charge des négociations. « Delaire est très agressif. »

Un long siège commence. « Nous savions qu’il y avait à proximité une ou deux écoles primaires et une grande surface », dit Pierre Romijn. « Il y avait donc potentiellement un danger. »

Des négociations tendues et une libération en direct

Lundi, mardi, mercredi… les jours s’enchaînent sans avancée majeure. Les négociations s’éternisent. « C’est une affaire qui va tourner très vite dramatiquement ou très vite bien », entend-on dire Pierre Demaire au téléphone. « On va pas s’éterniser, on est fatigué. »

« Il ne sait pas du tout où il veut aller », se souvient le policier. « Il était un peu perdu. »

La tension est extrême. « Dans une négociation, il y a tout le temps du donnant-donnant », explique le procureur. « C’était impératif pour nous d’au moins libérer les enfants. Ils avaient 10 et 14 ans à l’époque. »

Le jeudi 21 septembre, un premier accord est trouvé : 15 millions de francs belges contre la libération des enfants.

Le lendemain, le 22 septembre, Gaëlle et Françoise sont relâchées. Une séquence diffusée en direct dans le journal télévisé de RTL tvi.

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Marie-Madeleine Jeuris reste captive. Delaire exige une voiture puissante pour prendre la fuite. C’est Jacques Léonard, le policier choisi par le gangster lui-même pour négocier, qui lui livre une Mercedes spécialement aménagée, piégée. « C’est sous les feux des projecteurs que les auteurs et l’otage ont pris la fuite. »

Un final inattendu et tragique

La libération de Marie Madeleine Jeuris se déroule à l’île Monsin, près du quartier de Droixhe à Liège. C’est là que les malfaiteurs espèrent se cacher. « À proximité de chaque point de chute potentiel, il y avait des policiers installés discrètement. Soit dans leur voiture, soit dans un coin de rue », raconte le procureur.

Les truands pénètrent dans la plus haute tour du quartier et quelque chose d’inattendu se produit : des liasses de billets – les billets de la rançon – sont jetées du haut des tours par les complices de Delaire. Une pluie de billets de 5000 francs belges, tombée du ciel.

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Peu après, Philippe Delaire se donne la mort dans la cage d’escalier de l’immeuble. « Ça m’a fait de la peine lorsque j’ai vu son cadavre », indique le policier Jacques Leonard. « Je venais de discuter avec lui 10 minutes avant. »

Ses deux complices sont arrêtés dans la foulée, sous les huées d’une foule en colère. Elle réclame leur mort.

Ils seront condamnés quelques années plus tard.

Aujourd’hui, la maison de Tilff n’est plus occupée. M. Jeuris est décédé. Il s’était installé à l’étranger avec son épouse. Leur fille Gaëlle a intégré la police fédérale et Françoise est historienne.

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