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Est-ce possible de déshériter ses enfants? "La loi dit qu'il y a deux personnes à qui on doit laisser quelque chose", explique ce notaire

Le notaire Jean Martroye était l'invité du RTL info 13h. L'occasion d'aborder avec lui divers aspects des successions et des héritages, notamment la question suivante : peut-on déshériter son enfant ? 

L'héritage est complexe et soulève de nombreuses questions, dont celle des droits des enfants. Mais au fond, peut-on déshériter son enfant ? 

"Alors, la loi dit qu'il y a deux personnes à qui on doit laisser quelque chose : son conjoint et d'autre part son ou ses enfants. La loi dit qu'il y a la moitié de votre succession que vous devez laisser à vos enfants et donc l'autre moitié, vous en faites ce que vous voulez, soit à un ami, à une association ou à l'un des enfants, si vous en avez plusieurs. Donc, il y a moyen effectivement, ne fut-ce que partiellement, de déshériter ses enfants", explique Jean Martroye, notaire.

Si l'autre enfant ne réagit pas, il ne recevra rien

La nouvelle loi va même un petit peu plus loin parce que vous pourriez très bien mettre dans votre testament votre volonté de le déshériter complètement. "Si vous avez deux enfants, vous pouvez tout donner à l'un des deux enfants. À ce moment-là, si l'autre enfant ne réagit pas, il ne recevra rien. Par contre, la loi prévoit des droits à sa faveur, donc il est en droit de réclamer sa part, même s'il en a moins que l'autre", ajoute-t-il.

Déshériter, oui, mais sous certaines conditions : "Pour déshériter, il faut un testament et il faut le rédiger correctement. Donc il faut bien se renseigner au préalable pour le rédiger. Si vous ne faites pas de testament, c'est la loi qui s'applique et la loi prévoit l'égalité entre les enfants. Si vous souhaitez favoriser un enfant par rapport à l'autre, vous devez l'indiquer dans vos dernières volontés. Et effectivement, si un des enfants voit qu'il n'a pas reçu le minimum auquel la loi lui accorde, il doit effectivement contester cela et on refera tous les calculs".

Peut-on refuser l'héritage ?

"Face à une succession, vous pouvez agir de trois manières", affirme le notaire. "Soit vous acceptez la succession, soit vous renoncez, c'est-à-dire vous ne prenez rien. Soit il y a une situation intermédiaire, qu'on appelle l'acceptation sous bénéfice inventaire, lorsqu'on a quelques doutes quant à la solvabilité de la personne décédée".

Si un enfant se sent lésé, que se passe-t-il ? 

"On essaye évidemment toujours dans un premier temps d'éviter de passer par le tribunal parce que c'est long et coûteux. En général, on essaye de réunir l'ensemble des enfants autour de la table, on regarde les volontés des parents, ce qu'il reste dans le patrimoine. On doit remonter en arrière et regarder tout ce qui a fait l'objet de donations, parce que ce serait trop facile de dire que l'on respecte les proportions uniquement avec ce qu'il reste au jour du décès. (...) On est obligé de donner un petit coup dans le rétroviseur et voir toutes les donations que les parents ont réalisées", répond Jean Martroye.

Favoriser un enfant, est-ce permis ?

"Vous pouvez, mais dans certaines limites", rappelle le notaire. "Je vous donne un exemple : si vous avez deux enfants, la moitié doit revenir aux deux enfants, c'est-à-dire qu'ils ont droit à un quart chacun. L'autre moitié, c'est ce qu'on appelle la quotité disponible, et là vous en faites ce que vous voulez. Donc si vous voulez donner trois quarts à un enfant et un quart au deuxième, vous pouvez". 

Il existe cependant des exceptions lorsqu'on est, par exemple, patron d'un commerce. "Il faut surtout faire attention, parce qu'en plus des liquidités, il y a la question de la survie de la société", souligne Jean Martroye. "C'est toujours bon de prendre ces renseignements, aller chez votre notaire pour savoir comment on fait pour assurer la continuité de la société. Parce que si vous êtes actionnaire et patron d'une société et que malheureusement vous venez à décéder, si rien n'est prévu, vous risquez de mettre vos enfants et donc la société en difficulté".

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