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Le principal syndicat de l’armée met en garde : des militaires contre le narcotrafic créerait « une zone de guerre dans la capitale de l’Europe »

Par RTL info
C’est l’avis de Boris Morenville, dirigeant du syndicat SLFP-Défense, ultra-majoritaire dans l’armée belge. Il s’est montré extrêmement critique sur l’idée de mettre des militaires dans les rues de Bruxelles pour lutter contre le narcotrafic. Car ceux-ci ne sont pas formés comme des policiers, mais aussi car la situation géopolitique actuelle ne s’y prête pas avec l’intensification de l’aide de nos militaires aux opérations de l’Otan.

Martin Buxant : Le déploiement des militaires dans nos villes pour lutter contre les trafiquants de drogue, est-ce que vous y êtes favorable ?

Boris Morenville : Je me pose premièrement la question de pourquoi. Est-ce que combattre le narcotrafic est une mission militaire ? Même lorsqu’on est déployé à l’étranger, on n’a pas de missions qui sont liées au narcotrafic. C’est une mission clairement de police. Donc fondamentalement, est-ce que le militaire va être libre de ses actes dans Bruxelles pour lutter contre le narcotrafic ? Est-ce que c’est une mission qui incombe à un soldat ? La réponse est non.

De plus, il existe déjà le corps de sécurité, un corps de police qui est créé pour ça.

C’est ça, donc quand les militaires ont été mis dans la rue en 2016 (pour lutter contre les attentats, la menace islamiste) avec un caractère temporaire, le ministre Jambon avait décidé de créer le corps de sécurité pour justement remplacer les militaires. Ce sont des agents de sécurité qui dépendent de la police. Eh bien, à l’heure actuelle, c’était leur mission, c’était leur travail et justement, le fait d’avoir un désaveu et un désinvestissement complet dans la police au niveau politique, ce sont des situations qui sont créées.

Néanmoins, si le gouvernement le décide, si le Conseil des ministres est d’accord pour envoyer nos soldats dans les rues de certaines villes, il faudra s’y plier ?

Les militaires, par définition, sont de bons soldats et effectuent les ordres qu’on leur demande. Je rappelle quand même que le patron de la Composante Terre s’est exprimé il y a deux semaines en disant : « Ce n’est pas à nous de faire ça, ce ne sont pas nos missions et ce n’est pas une bonne idée quant au contexte géopolitique international. »

Si ça doit se faire, ça pourrait se faire à partir de quand ? Le ministre de la Défense dit à partir d’avril prochain. Le président du MR a martelé hier que ça devait être avant la fin de l’année. C’est possible avant la fin de cette année d’avoir des militaires dans les rues pour lutter contre les narcotrafiquants ?

La première réponse, c’est que la concertation sociale n’est pas optimale, dans le sens où on n’était même pas au courant. Par contre, le trajet et le chemin doivent aboutir au plus tôt en avril. Les règles d’engagement et le cadre juridique ne sont pour l’instant pas clair. On ne sait pas si ces militaires pourront éventuellement procéder à des arrestations de dealers de drogue, mettre des menottes, on ne sait pas ça. C’est le flou total. Le texte n’a toujours pas été publié, on ne sait pas ce qu’il contient. Permettez-moi d’être critique : est-ce que vraiment un narcotrafiquant craint de recevoir des menottes ?

Donc il faut être plus dur que ça et les militaires sont entraînés à tirer, à tuer aussi ?

Est-ce que la population qui a envie de voir les militaires pour un peu ressentir un sentiment de sécurité est prête à voir une zone de guerre dans la capitale de l’Europe ?

Donc on transformerait, dites-vous, Bruxelles, la capitale de l’Europe, en zone de guerre si on déploie les militaires ?

Le militaire n’a pas de compétence de police et il est formé de base à devoir faire la guerre. Donc il y a quand même des réflexes qui sont mis depuis le premier jour de formation. Est-ce qu’on pourrait vraiment accepter d’avoir une zone de guerre ? Qui va prendre ses responsabilités, le ministre Quintin, le ministre Theo Francken, s‘il y a une balle perdue, qu’elle soit d’un côté ou de l’autre, lors éventuellement d’un échange de tirs ?

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