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En début de semaine, Jordan, inculpé dans une affaire d’escroquerie, devait comparaître devant la Chambre des mises en accusation. Comme le prévoit la loi, il avait l’intention de s’expliquer directement face aux magistrats lors de cette audience qui doit décider de la prolongation ou non de sa détention. Le véritable procès se déroulera, lui, beaucoup plus tard.
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Mais son avocat, Maître Fabian Lauvaux a eu la surprise de ne pas voir arriver son client. On lui a appris alors que le Premier Président de la Cour d’Appel avait rendu une ordonnance, le 28 avril, qui rend impossible les extractions de détenus de la prison vers le palais de justice.
La décision a été prise dans le cadre des mesures sanitaires liées au coronavirus. Elle pose problème à l'avocat de Jordan: "Éteindre un droit aussi essentiel en appel, donc en dernier ressort, m'apparaît totalement anormal si pas illégal. Il faut évidemment être souple et s'adapter mais interdire à un détenu de participer à une audience m'apparaît surréaliste à l'heure de la haute technologie (NDLR: vidéoconférence par exemple)." Le prévenu est bien entendu représenté par son avocat mais si la majorité des prisonniers accepte de ne pas se déplacer par mesure de précautions, certains veulent absolument être présent.
La même situation s'est reproduite ce jeudi matin à un client de l’avocat et spécialiste en droit pénal Henri Laquay. Le suspect souhaitait lui aussi prendre la parole devant devant les juridictions d'instruction. L’homme de loi explique en quoi il estime que c'est un problème : "Le détenu, qui est présumé innocent et dont la détention peut être prolongée pour deux mois, n'entend ni le rapport du juge d'instruction sur les avancées de l'enquête, ni le réquisitoire du Parquet qui motive la demande de prolongation de sa détention, ni la plaidoirie de son avocat. Et il ne peut pas prendre la parole pour s'adresser à ses juges. Le détenu devient en réalité totalement étranger à sa propre affaire ! Il faut au plus vite que les détenus assistent aux audiences."
Lors de l’audience de Jordan devant la Chambre des mises en accusation, son avocat a finalement claqué la porte et la détention a été prolongée de deux mois. Maître Lauvaux a introduit un pourvoi devant la Cour de Cassation contre cette décision de la Cour d’Appel de Liège dans lequel il dénonce la violation du droit à un procès équitable et le non respect du droit de pouvoir comparaître aux audience de son procès.
Contacté, le parquet de Liège confirme que cette mesure exceptionnelle liée au confinement est bien d’application. Quant à la date de la suspension de l’interdiction de l’extraction des détenus, elle n’est pas encore déterminée.