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Laure a payé un acompte pour une salle de fête: son mariage annulé à cause de Covid-19, peut-elle récupérer le montant?

La jeune femme de 26 ans devait louer une grande salle à Bruxelles pour l'occasion. Contrainte d'annuler à cause de la crise du coronavirus, elle a demandé de récupérer son acompte. Sans succès.

Pour leur fête de mariage prévue cet été, Laure et Jean* (prénoms d'emprunt car ils veulent garder l'anonymat) avaient vu grand : 250 invités. Comme de nombreux autres couples, ils ont dû revoir leurs plans à cause des restrictions imposées par le gouvernement pour endiguer l'épidémie de Covid-19. Quand certains ont décidé de tout reporter, eux se sont réorganisés pour un événement en petit comité. Quant à la grande fête, ils ont décidé de l'annuler tout simplement. Or Laure a payé, il y a un an, un acompte de 1000 euros au gérant d'une salle à Bruxelles. En difficulté financière, ce dernier a refusé de la rembourser. "Que puis-je faire dans cette situation ?", nous interroge-t-elle via notre bouton orange Alertez-nous.

"J’ai très vite compris que je ne pourrais plus faire ma fête"

Laure a entendu parler de cette salle de fête de Bruxelles par le biais de sa soeur, qui y a assisté à un mariage. Avec une capacité de 400 personnes, cette salle semblait convenir parfaitement pour sa propre fête. En juillet 2019, elle a signé un contrat avec le gérant pour la louer le 18 juillet 2020. Prix : 2500 euros. Laure a versé les 1000 euros d'acompte qui lui étaient demandés.

Laure s'est mariée avec Jean au Congo, le 14 février. Un mariage "traditionnel", dit-elle. Le lendemain, ils se sont mariés civilement à Kinshasa. Le couple souhaitait également fêté son mariage à Bruxelles. C'était sans compter la crise du coronavirus, qui a débuté mi-mars en Belgique. "J’ai très vite compris que je ne pourrais plus faire ma fête et encore moins y inviter mes 300 invités", raconte-t-elle.

Pas de compromis trouvé avec la salle de fête

Laure a donc contacté le gérant de la salle pour annuler l'événement et demander le remboursement de ses 1000 euros d'acompte. Il lui a répondu qu'il la rembourserait uniquement s'il trouvait un autre client pour sa date. Dans l'incertitude de cette période, personne n'a loué la salle ce jour-là. Laure lui a proposé de ne récupérer que la moitié de la somme, 500 euros. Refusé également.

Une entreprise d'événementiel qui subit la crise de plein fouet

Pour se justifier, le gérant a invoqué les difficultés liées au coronavirus. "Il m’a fait presque culpabiliser de demander mon acompte alors qu’il n’avait plus d’argent dans ses caisses", raconte Laure. "Nous, on voudrait bien donner les acomptes, ça nous dérange aussi mais on n'a rien de l'État, aucun subside... La seule chose que l'état nous dit, c'est de rester fermés depuis le 13 mars", regrette le gérant.

La salle de fête a obtenu 4.000€ de la part du le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, la prime unique mise en place pour aider les indépendants à surmonter la crise du coronavirus. Beaucoup trop peu pour maintenir à flot son entreprise, estime le gérant. Il indique payer 6000 euros de loyer par mois pour la salle. "Sans compter les autres frais continus : assurances, leasing, etc."

S'en sort-il en gardant les acomptes ? "C'est pas ça qui va me sauver. On est à zéro dans la société", déplore-t-il. Dans la grande majorité des cas, assure-t-il, les clients acceptent de reporter la date de leur événement. "Le report des dates, pour nous, c'est pas avantageux du tout", précise-t-il. Et d'expliquer : "C'est deux dates que je perds, la date du client et la date d'un nouveau client que j'aurais pu mettre à cette date-là. Mais vu qu'on a reçu un acompte, on est obligés d'assumer et reporter la date".

Le gérant estime que certains "veulent profiter de l'occasion" pour demander un remboursement et faire des économies.

Son événement annulé pour cas de "force majeure", Laure est-elle en droit de récupérer son acompte ?

Lors de ces discussions avec l'entreprise d'événementiel, Laure a argumenté en invoquant la "force majeure". En effet, pour l'avocat Vincent Budson, (cabinet Lallemand et Legros), la crise du covid-19 est bien un "événement de force majeure qui peut-être invoqué par chacune des parties pour ne pas exécuter son obligation". Mais la question du remboursement des avoirs est complexe, souligne-t-il. "Parce qu'il n'y a pas de dispositions claires, nettes et définitives à ce sujet", ajoute-t-il.

Pour l'avocat Fabian Lavaux, il faut s'en référer aux dispositions contractuelles, pour "voir si on prévoit un remboursement ou non dans un cas de force majeure". Or le contrat signé par Laure ne dit rien sur la force majeure. On y lit simplement qu'"en cas d'annulation, l'acompte ne sera pas remboursé".

"C'est pas blanc ou noir, c'est gris", prévient Audrey Van Hamme, porte-parole de Test-achats à qui nous avons soumis le problème. L'association de protection et défense des consommateurs recommande aux clients d'invoquer la "force majeure" pour réclamer leur avoir, comme l'a fait Laure. "Puisqu'il n'y a pas la possibilité de réaliser le contrat, le contrat est nul", explique-t-elle. Mais il n'y a pas de loi qui permet d'imposer le remboursement.

Un juge pourrait trancher la question si le litige était porté devant un tribunal. Mais dans le cas de Laure, les frais d'avocats seraient supérieurs aux montants à récupérer.

Finalement, à la place de le fête, Laure, qui est chrétienne, a demandé à un pasteur de diriger une cérémonie religieuse en petit comité dans sa maison. "Aujourd'hui, récupérer mon acompte n’est plus ma priorité", précise-t-elle. "Mais je reste indignée face au manque de compassion et d’empathie que le propriétaire m’a témoigné".

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