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A Marseille, procès des "Arrow Baga", gang criminel nigérian ultra-violent

Réseaux d'immigration clandestine, proxénétisme, viols: le tribunal correctionnel de Marseille a entamé lundi un plongeon de trois semaines au coeur des "Arrow Baga" ou "Supreme Vikings", un "cult" nigérian, sorte de gang criminel au fonctionnement ultra-violent.

Sur le banc des prévenus, ils étaient 13 lundi, à l'ouverture du procès, 13 hommes de 22 à 37 ans, dont dix comparaissent détenus. Ils formaient la hiérarchie marseillaise des Arrow Baga, ex-fraternité étudiante décrite par le juge d'instruction comme "une organisation criminelle hiérarchisée et structurée, avec ses règles et ses rites, ses artifices et ses accessoires".

Parmi eux, deux anciens "Doctor One", les chefs successifs des Arrow Baga à Marseille. Un troisième, échappé en Italie, est sous le coup d'un mandat d'arrêt. En face, côté parties civiles, une dizaine de jeunes femmes, prostituées de force et violées, et deux associations.

Identifiables à leurs tenues rouges, les Arrow Baga sont aujourd'hui largement implantés dans la deuxième ville de France, comme leurs compatriotes et ennemis des Blacks Axes (les noirs) ou des Eiyes (les Bleus).

Ces groupes criminels nigérians tirent notamment leurs profits de la prostitution. Après avoir traversé la Libye puis l'Italie, guidées par le mirage d'un travail ou d'une formation, de jeunes Nigérianes se retrouvent contraintes de rembourser des dizaines de milliers d'euros à leur "Madame", une ex-prostituée devenue mère maquerelle.

Pour les soumettre, leurs proxénètes utilisent la crainte du "djoudjou", un rite exercé au Nigeria, avec la menace de représailles sur leurs familles. Mais il y a aussi l'arme du viol, voire du viol aggravé par l'usage d'armes. Des faits qui devraient relever de la cour d'assise mais que le juge d'instruction, en accord avec les victimes, a choisi de correctionnaliser en agressions sexuelles.

Fin mars 2020, alors que le confinement maintient les prostituées dans leurs appartements de la cité du Parc Corot, une des pires copropriétés dégradées de Marseille, 20 membres des Arrow Baga font ainsi irruption au domicile de quatre d'entre elles. Durant deux heures ils vont les violer puis leur dérober des centaines d'euros, sous la menace de couteaux et d'un pistolet.

- Jeté du 6e étage -

Une autre jeune femme, âgée de 22 ans, "marquée au feu dans le dos", avait raconté aux enquêteurs comment, le 20 juillet 2019, elle avait été conduite à "la maison secrète", une villa abandonnée dans les quartiers Nord de Marseille, lieu de réunion des Arrow Baga. Pour y être elle aussi violée.

A la barre, lundi, cette jeune femme est revenue sur son calvaire: "Lateef Yakubu, le chef du gang, m'a frappée pour me forcer à accepter que cinq hommes couchent avec moi. Je criais +à l'aide+, mais ils avaient aiguisé les couteaux pour me faire peur". Alors certes celui-ci ne l'a pas violée, mais c'est lui qui a donné son aval pour que les membres du gang le fassent, maintient-elle.

"Je ne sais pas pourquoi elle dit des choses comme cela. Je n'ai jamais violé qui que ce soit", a rétorqué ce prévenu, assurant qu'il "ne parle pas aux femmes". Se présentant au tribunal comme un SDF dormant dans les rues de Montpellier, l'homme a nié avoir été un "Docteur One", concédant seulement un rôle de numéro 2, de médiateur, "un apaiseur de conflits".

Mais la violence s'exerçait aussi sur les hommes, pour les contraindre à adhérer au gang ou à ne pas le quitter. L'un des prévenus, "J-Boy", avait ainsi été puni par les "germans", les membres du gang: le 29 février 2020, dans la cité des Flamants, où les Nigérians géraient un squat dans un immeuble en attente de rénovation, il avait été jeté du 6e étage car, "pour eux, la seule façon de quitter la secte était de mourir".

Ces "cults" nigérians au fonctionnement sectaire prospéraient aussi sur la base de rites sorciers. Ainsi, un ex-Doctor One qui souhaitait quitter le groupe avait été blessé au couteau par son successeur et ses hommes de main. En garde à vue, il avait évoqué le "serrina", un médicament qui "protège des armes qui coupent": "Si vous buvez serrina, les lames ne peuvent pas entrer dans votre corps".

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