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Qui est Frédéric Péchier, cet anesthésiste accusé d’avoir empoisonné des patients pour prouver ses qualités de réanimateur ?

Par RTL info avec AFP
Accusé d’avoir empoisonné 30 patients, dont 12 mortellement, l’anesthésiste Frédéric Péchier sera jugé dès le 8 septembre à Besançon en France. Entre portrait de médecin brillant et accusations de manipulateur, sa défense dénonce une erreur judiciaire.

Médecin brillant et consciencieux ou manipulateur qui se prend pour Zorro ? Au fil de l’enquête sur les empoisonnements dont il est accusé ont émergé deux facettes de l’anesthésiste Frédéric Péchier.

Accusé d’avoir empoisonné 30 patients, dont 12 sont morts, le docteur Péchier sera jugé par la cour d’assises du Doubs (France) à partir du 8 septembre.

On lui reproche d’avoir volontairement ciblé des patients âgés de 4 à 89 ans, à la fois pour nuire à ses collègues et pour prouver ses qualités de réanimateur.

Des accusations très graves que le médecin de 53 ans, au casier judiciaire vierge, a toujours démenties, criant au complot.

Isolé, épuisé, « exsangue sur le plan financier », selon un de ses avocats, le quinquagénaire à la barbe grisonnante n’est plus que l’ombre de « l’anesthésiste star » décrit jadis.

Frédéric Péchier est né d’un père lui-même anesthésiste et d’une mère infirmière, le 22 janvier 1972 à Angoulême. Aîné d’une fratrie de quatre, il vit une enfance sans histoires dans un milieu aisé.

Pendant ses études de médecine, ce grand brun au physique de rugbyman rencontre Nathalie, qu’il épouse en 1999 et avec qui il a trois enfants. Elle devient cardiologue en libéral.

Lui exerce aux CHU de Besançon puis rejoint la clinique Saint-Vincent avec un passage de six mois à la polyclinique de Franche-Comté en 2009. C’est dans ces deux établissements bisontins que Frédéric Péchier est accusé d’avoir empoisonné des patients pendant près de dix ans.

Il est mis en examen en mars 2017 pour sept empoisonnements avec préméditation, trois survenus à la Polyclinique de Franche-Comté, quatre à Saint-Vincent.

« Star des anesthésistes »

Des accusations que le Dr Péchier, seul praticien présent sur ces sites au moment de tous ces faits, dément farouchement : « On m’accuse de crimes odieux que je n’ai pas commis », se défend-il dès l’ouverture de l’enquête en 2017.

En mai 2019, il est une deuxième fois mis en examen pour 17 nouveaux cas, puis une troisième fois en mars 2023, pour six cas supplémentaires.

La défense crie à l’erreur judiciaire. La mise en cause de l’anesthésiste est « une construction artificielle d’un coupable idéal », soutient-elle. Ses avocats, Randall Schwerdorffer et Lee Takhedmit plaideront l’acquittement.

Il était le primo intervenant quand survenait un arrêt cardiaque, il avait toujours la solution

La famille du médecin est convaincue de son innocence : pour ses proches c’est un homme bienveillant, paternel et serviable, passionné par son métier.

Sa femme, dont il s’est séparé en 2021, a décrit aux enquêteurs un homme à la conscience professionnelle exacerbée, très sollicité par ses collègues en raison de ses compétences.

Au cours de l’enquête, des collègues ont dressé une image flatteuse du médecin, « star des anesthésistes », quand d’autres se sont montrés bien plus mesurés, le qualifiant d’arrogant, beau parleur, voire manipulateur.

Pour une consœur, il est « certain d’être le meilleur » et aime se « prendre pour Zorro ».

Selon l’accusation, c’est pour nuire à des collègues avec lesquels il était en conflit que le Dr Péchier s’en serait pris à des patients, dont il polluait les poches de perfusion. Il intervenait ensuite pour les secourir, démontrant ses talents de réanimateur.

« Frédéric Péchier était le primo intervenant quand survenait un arrêt cardiaque », « il avait toujours la solution », a souligné Etienne Manteaux, le procureur qui avait requis son renvoi aux assises en mai 2024.

Selon le magistrat, « il s’était créé un vrai personnage charismatique de sauveur ».

Les expertises psychologiques et psychiatriques n’ont relevé aucune pathologie ou trouble de la personnalité. Elles décrivent un homme intelligent, sans traumatisme particulier dans son passé, tout au plus ayant pu souffrir de l’absence d’un père accaparé par son travail.

Troubles dépressifs

Une analyse psycho-criminologique réalisée en 2019, très critiquée par la défense, pointe en revanche « une personnalité dans le contrôle », des « traits pervers » et des « éléments de personnalité narcissique ».

L’enquête a évoqué une tricherie qu’il aurait commise lors d’une compétition de golf en 2011, ainsi qu’une fraude à l’assurance.

« J’ai le sentiment que c’est quelqu’un d’assez habile, de très manipulateur, de très égocentré », déclare Frédéric Berna, avocat de nombreuses parties civiles. « C’est vraiment quelqu’un qui n’accepte pas la contradiction et essaye en permanence d’imposer par la force son avis. »

Frédéric Péchier présente aussi des troubles dépressifs. En 2014, il tente de se suicider en ingérant des produits morphiniques. En 2021, après avoir trop bu, il chute de la fenêtre de sa chambre chez ses parents où il avait dû se réinstaller.

« J’ai tout perdu. Ma vie professionnelle, sociale, familiale… », énumérait-il au Parisien en 2023. Réaffirmant son innocence, il disait au journal vouloir se battre « pour que cela soit reconnu ».

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