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La White River Academy, internat de l’Utah pour adolescents "à problème", impose une discipline stricte. Que se passe-t-il derrière les murs de ces établissements américains privés, au fonctionnement répressif et controversé?
Delta, bourgade de 3.500 habitants perdue dans l’ouest des États-Unis, abrite un bâtiment de briques rouges un peu défraîchi. Derrière ses murs : la White River Academy, un internat thérapeutique destiné aux garçons âgés de 12 à 18 ans souffrant de troubles mentaux ou de comportements jugés déviants.
C’est l’un des rares établissements de ce type à avoir accepté de laisser entrer une équipe de tournage. L’un de ses directeurs, Justin Nielson, 53 ans, joue les guides : "Vous voyez, ils font des jeux de construction, ils jouent du piano. Table de billard, de babyfoot…", décrit-il en montrant les lieux.
Un environnement qui frôle celui d’un centre carcéral
Au détour d’un couloir, la caméra capte une scène dérangeante : un adolescent, nouvel arrivant, se fait raser le crâne. "Pour certains enfants, ce n'est pas grave, pour d'autres, c'est énorme", explique Justin. "Nous disons 'OK, nous comprenons', mais nous continuons de les solliciter parce que tant que les cheveux ne seront pas coupés, nous ne pourrons pas passer à la seconde étape du programme.
Tout est minuté, contrôlé. Aux toilettes, un pupitre enregistre le temps autorisé pour uriner, une minute, ou aller à la selle... trois minutes. "Quand ils prennent une douche, ils sont aussi minutés. C'est cinq minutes pour la douche", précise Justin. "C’est le seul moment où ils ne sont pas surveillés, car on ne les regarde pas sous la douche ou dans les toilettes. Donc on veut être certains qu'ils ne sont pas en train de se faire du mal."
Caméras dans les dortoirs, interdiction de regarder par la fenêtre, visites parentales espacées de trois mois… L’environnement frôle celui d’un centre carcéral.
On n'a pas le droit de regarder dehors, toujours pour des raisons de sécurité.
"Il y a une caméra dans chaque dortoir, pour des raisons de sécurité. On a des rideaux mais on ne doit pas y toucher sinon l'alarme sonne. Personne ne fait quelque chose de stupide", raconte Ethan, interné en raison d'une addiction à la pornographie.
"On n'a pas le droit de regarder dehors, toujours pour des raisons de sécurité. Évidemment, à la maison c’est plus confortable... mais ça n’est pas censé être comme ça ici", commente Michael, qui souffre de problèmes de dépression et d’une tendance à l’autodestruction.
"Quand je suis arrivé j'étais en colère, agressif. Mais maintenant avec toute la thérapie et le programme, ça aide vraiment. Ça fonctionne. Évidemment c'est un peu déprimant d'être loin de ma famille et mes amis…. C'est comme ça", témoigne-t-il.
Un large panel de troubles pris en charge
White River Academy accueille des jeunes confrontés à une vaste gamme de problèmes. Un panel de pathologies suffisamment large pour que n’importe quel adolescent puisse être concerné et donc inscrit : "Dépression, anxiété, déficit de l'attention, bipolarité, autisme, dyslexie, dysgraphie, dépendance aux réseaux sociaux, dépendance au téléphone, à la pornographie, dépendance aux jeux", énumère Justin. "Et puis vous avez aussi des enfants qui luttent contre la toxicomanie, la cocaïne, la méthamphétamine, les médicaments. Le panel est très large".
Sur les 21 adolescents présents, 14 sont sous traitement médicamenteux plusieurs fois par jour. "Ce client prend des médicaments pour les allergies, un pour le TDAH, un pour l’humeur, un pour la bave, un pour la dépression, un pour la concentration et un pour l’anxiété", énumère un infirmier. "Je ne suis pas médecin donc je fais juste ce que le docteur me dit… Et honnêtement, je pense que certains jeunes ont besoin de ces médicaments, peut-être pas autant… mais je pense que c’est nécessaire pour beaucoup de clients qui viennent ici et qui souffrent visiblement de de traumatismes".
Les effets secondaires sont visibles, notamment en salle de classe, où certains élèves apparaissent prostrés ou peu réactifs.
En cas de débordement, les jeunes peuvent être physiquement neutralisés. Daniel Sanderson, psychologue clinicien au sein de la White River Academy, l'assure : "Si un étudiant devient violent, il sera maîtrisé. On essaie de ne pas leur faire du mal. Tout le personnel a été formé pour les contenir sans violence."
La durée du séjour varie de 18 mois à 3 ans. Un temps long, encadré par des règles strictes et une surveillance constante.
Une prise en charge coûteuse… et lucrative
Le prix de cette éducation particulière : 400 dollars par jour, soit environ 145.000 dollars par an. "C’est un business", reconnaît Justin. "Il faut un certain nombre d’enfants pour que ce soit rentable. Une bonne année, si on est complets, on peut faire un million de dollars de bénéfice... net."
Ce secteur florissant, surnommé la "Troubled Teen Industry", pèserait environ 50 milliards de dollars par an aux États-Unis. Derrière l’encadrement thérapeutique, une industrie en plein essor.
Retrouvez le reportage complet ce vendredi soir après le RTL info 19h.


















