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Alors que les tensions entre l'Iran, Israël et les États-Unis atteignent un nouveau sommet, la République islamique pourrait paradoxalement tirer parti de la situation pour consolider son autorité intérieure, au prix d'une répression accrue.
Alors que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou ne cache plus son ambition d’éliminer le guide suprême iranien, Ali Khamenei, le président américain Donald Trump, lui, évoque ouvertement l’hypothèse d’un changement de régime à Téhéran. Mais une dimension semble sous-estimée dans la stratégie israélo-américaine : ses conséquences sur la politique intérieure iranienne.
Une guerre qui sert le pouvoir en place
Désormais convaincus d’avoir en grande partie neutralisé l’arsenal nucléaire de l’Iran, Jérusalem et Washington semblent vouloir aller plus loin et viser directement le renversement du régime. Une approche qui rappelle d’autres tentatives similaires – en Irak, en Libye ou encore en Afghanistan – qui se sont souvent soldées par l’anarchie ou l’émergence de régimes encore plus autoritaires.
Le peuple iranien, premier rempart du régime
Le pouvoir iranien, lui, a parfaitement saisi la dynamique : son principal ennemi, ce n’est pas tant l’alliance américano-israélienne que sa propre population. Une partie du peuple iranien, déjà échaudée par les répressions sanglantes des manifestations de 2019, constitue une véritable menace pour les dirigeants actuels.
Mais dans un retournement stratégique, le régime pourrait utiliser la guerre comme un levier pour restaurer son autorité. L’effet de solidarité nationale face à un ennemi extérieur n’est pas à négliger. Les Perses sont un grand peuple, fier d’une histoire vieille de 2 500 ans. Une agression étrangère pourrait pousser la population à se rassembler derrière son armée, non pour défendre les Mollahs, mais pour protéger la souveraineté du pays.
Une répression déjà en marche
Ce sursaut patriotique est doublé d’une offensive sécuritaire. Profitant du climat de guerre, les autorités ont déjà arrêté plusieurs centaines de personnes, accusées de collusion avec Israël. La semaine dernière, neuf condamnés ont été exécutés. La peine de mort et la répression restent des outils centraux pour assurer la survie du régime.
Le guide suprême iranien Ali Khamenei pourrait, si nécessaire, accepter de négocier. Mais s’il juge que la guerre est un moyen de préserver son pouvoir, il est prêt à la prolonger. L’Iran, avec ses 90 millions d’habitants et un territoire trois fois plus vaste que la France, reste une puissance régionale redoutable, bien différente du Hamas ou du Hezbollah. Même affaibli, le pays dispose encore de missiles et d’options stratégiques, comme le blocage du détroit d’Ormuz, par où transite 20 % du commerce mondial de pétrole et de gaz – une action aux conséquences économiques potentiellement désastreuses.
Une transition incertaine en cas de chute du régime
Certes, l’Iran dispose d’une classe moyenne instruite, capable de porter une transition démocratique. Mais elle ne représente qu’une minorité face à une majorité rurale, plus conservatrice. La chute du régime pourrait aussi raviver les revendications d’autonomie de certaines minorités, comme les Kurdes, avec à la clé un risque de guerre civile.
Dans cette région du monde, les idées simples ne fonctionnent jamais. Et le pari d’un changement de régime, vu de l’extérieur, reste plus complexe qu’il n’y paraît.


















