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"Pour rouler à Bruxelles en 2025, je suis passé d’une Jaguar à une Smart": Marc est en colère face au report de la zone basse émission

Au début de ce mois de septembre, les Bruxellois ont assisté à un rétropédalage politique. Les véhicules diesel Euro 5 pourront probablement circuler dans la capitale jusqu'en 2027, et non jusqu'en 2025 comme prévu initialement. Beaucoup avaient anticipé ce changement, mais mainteant regrettent. "J’ai revendu ma voiture en urgence pour une bouchée de pain."

600 000, c’est le nombre de véhicules qui ne répondent pas aux nouvelles règles de la nouvelle zone de basse émission bruxelloise. 600 000 voitures représentent approximativement 10 % du parc automobile en Belgique. Nombreux sont ceux qui ont voulu anticiper l’interdiction des Euro 5 dans les rues de la capitale. Un changement, bien souvent précipité, qui engendre des pertes, mais aussi des regrets. Certains d’entre eux témoignent.

 "Je suis passé d’une Jaguar à une Smart "

Marc fait partie de ces malheureux prévoyants. Ce jeune retraité de 70 ans a toujours été un amoureux des voitures. "J’ai toujours aimé rouler dans de belles voitures. J’adore les voitures confortables, un peu pour frimer. Les voitures de loisirs." Depuis plusieurs années, il sillonne Bruxelles avec sa Jaguar. Pourtant, il y a un an, il se rend chez un concessionnaire d’occasion pour s’en séparer. "Je l’adorais, mais je pensais qu’elle ne pourrait plus entrer dans Bruxelles. Elle n’avait que 100 000 kilomètres. Elle était comme neuve." C’est à contrecœur que Marc trouve preneur. Son Euro 5 intéresse un Luxembourgeois. "J’ai pu négocier, mais pas énormément. Je l’ai laissée partir pour 7 900 €, alors qu’à l’achat je l’avais payée neuve 60 000 €. Je suis dégoûté." Simultanément, le retraité investit dans une petite Smart au coût de 17 000 €. Le jour et la nuit. "Vous imaginez passer d’une magnifique Jaguar à une petite citadine. Le plus fou, c’est que ma Smart d’occasion m’a coûté deux fois plus cher que le prix de revente de ma Jaguar. "

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Face à la prolongation des Euro 5, le regret, mais aussi la colère, envahissent Marc. "Comment peut-on changer d’avis seulement quatre mois avant l’échéance ? Les politiques ne pensent pas à tous ceux qui ont anticipé. Je ne suis pas dans une situation financière préoccupante, mais je pense à tous ceux qui ont investi ou dégagé un budget en urgence."

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Maintenant, Marc devra se satisfaire de sa petite citadine. "Je l’adore. Elle est pratique, mais je ne peux m’empêcher de penser au prix dérisoire de la revente de mon ancienne voiture. Je suis certain qu’avec la prolongation de deux ans, je l’aurais vendue bien plus cher. Je l’aurais peut-être même gardée."

 "J’ai revendu ma voiture une bouchée de pain au lieu de la faire réparer"

Mère de deux enfants, Sarah n’est pas Bruxelloise. Sa famille est basée à Gembloux, en province du Brabant wallon. Pourtant, les trajets vers la capitale sont quotidiens. Une voiture autorisée lui est forcément primordiale, que ce soit pour rendre visite à ses parents ou pour se rendre au travail. "Cela faisait dix ans que je roulais dans une Citroën Picasso. Cette voiture était idéale pour moi. Elle était assez grande pour faire office de voiture familiale, mais aussi assez petite pour se garer en ville." Pourtant, à la mi-avril, le tableau de bord détecte un problème. "Je dois changer le filtre à particules. Ce n’est rien de grave. " À l’approche de l’instauration de la zone de basse émission, son garagiste ne lui conseille pas de la réparer." Il me dit de réinvestir dans une voiture moins polluante. Cela ne sert à rien d’engager des coûts sur un véhicule qui sera bientôt remplacé."

La reprise de la voiture est dérisoire. "Le garage me la reprend pour 1 500 €. Ce n’est pas grand-chose, puisqu’elle ne devait plus pouvoir circuler." Pour la remplacer, Sarah réinvestit dans un nouveau véhicule. "Le prix plein est de 22 000 €. Finalement, je débourse 18 000 €. Forcément, avec deux enfants, c’est une dépense que j’aurais préféré éviter." Depuis la prolongation de la zone de basse émission, Sarah regrette. "Bien sûr, j’aurais dû faire réparer ma voiture. Personne n’aurait pu prévoir ce rétropédalage politique."

"J’ai perdu 20 000 €"

Indépendant depuis de longues années, la voiture est l’outil de travail de Luc. Gérant d’une entreprise de transport, il suit donc avec attention l’instauration des zones de basse émission. Il y a un an, il prend les devants. Il revend sa Citroën Berlingo Euro 5 pour une nouvelle Volkswagen Caddy. Un changement de véhicule qui a un coût. "Ma Berlingo n’avait que 63 000 kilomètres et je n’en ai obtenu que 5 100 €." Son nouveau véhicule utilitaire lui coûte presque six fois plus cher. "29 000 € hors TVA, c’est le prix de la Caddy. J’estime avoir perdu 20 000 € dans ce changement trop anticipé."

"Visiblement, les politiques ne se rendent pas compte des conséquences du report de l’échéance de la zone de basse émission. Ils pensent certainement que cela va satisfaire les Bruxellois, mais pas du tout. Nous sommes nombreux à nous être endettés inutilement."

Le diesel délaissé

Les témoignages de Luc, Sarah et Marc ne surprennent pas Galleri Murat, concessionnaire à Zaventem. "C’est très triste pour eux. Pourtant, ils ont déjà de la chance de pouvoir revendre leurs voitures. J’ai des véhicules diesel sur mon parking, mais il est impossible de les vendre. Personne n’en veut." Le faible prix de vente est logique, malgré le faible kilométrage affiché au compteur. "Ceux qui font de bonnes affaires en ce moment, ce sont ceux qui habitent en dehors de la capitale. Ils achètent de belles voitures pour une bouchée de pain. À Bruxelles, presque plus personne n’a encore un Euro 5."

De son côté, le gérant espère que le report de la zone basse émission lui permettra d'écouler son petit stock. "Je l’espère, mais je ne me fais pas d’illusions. Personne ne va m’acheter une voiture, même à bas prix, pour la changer dans deux ans."

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