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Le Roi a reçu le président du Vlaams Belang: "Sans doute en se bouchant le nez mais il l'a fait", réagit Uyttendaele

Le roi des Belges Philippe a reçu mercredi le chef du parti d'extrême droite du Vlaams Belang dans le cadre de ses consultations pour la constitution d'un nouveau gouvernement fédéral, a annoncé le Palais, une première depuis 1936. Cette rencontre intervient trois jours après les élections législatives. "C'est la chose la plus normale du monde que le chef de l'Etat invite le vainqueur des élections", avait déclaré à son arrivée au Palais le président du Vlaams Belang, Tom Van Grieken.

Le Vlaams Belang est devenu dimanche la deuxième force politique de la région néerlandophone de Flandre, derrière les nationalistes flamands du N-VA, avec 18 sièges sur les 150 de la Chambre des représentants. Le Vlaams Blok, ancêtre du Vlaams Belang, avait obtenu le même nombre de sièges lors des élections législatives de 2003, mais n'avait pas été invité par le roi Albert II.

A 32 ans, Tom Van Grieken est le président de ce parti d'extrême-droite. En 2012, l'homme avait déjà fait parler de lui en se rendant à un barbecue organisé dans une école et dans lequel de la viande Halal était distribuée. Tom Van Grieken a distribué des saucisses Zwan.

 Peut-on admettre que le chef de l'Etat, même quelques minutes, parle avec ces gens-là ?

Le Roi Philippe a-t-il commis une faute en lui ouvrant les portes du Palais? Sur le plateau de C'est pas tous les jours dimanche, le débat est lancé. "Le Roi a rompu le cordon sanitaire tel que nous le concevons, nous francophones. Il y a sans doute eu une pression considérable sur le Roi. Il l'a sans doute fait en se bouchant le nez mais il l'a fait", analyse Marc Uyttendaele, professeur de droit constitutionnel. "Peut-on admettre que le chef de l'Etat, même quelques minutes, parle avec ces gens-là ?", s'interroge-t-il.

"Il n'avait pas le choix. Sinon il aurait fait une déclaration politique et en Flandre, les gens auraient dit qu'il n'avait pas le droit d'être Roi", rétorque Indra De Witte, journaliste au Het Belang Van Limburg. Selon elle, le Roi Philippe risquait sa crédibilité.

En France, les représentants d'extrême-droite sont souvent reçus par les chefs d'Etat successifs. "Le Front National devenu Rassemblement National n'est pas un parti interdit. En 1982, Jean-Marie Lepen avait écrit à Mitterrand pour se plaindre de ne pas passer à la télévision. A cette époque, Mitterrand s'était dit qu'il avait là une occasion d'affaiblir le grand parti de droite, a fait inviter Lepen. Il a fait un triomphe et c'est là qu'a commencé son ascension", indique Christophe Giltay.


"Le courage de juridiciser"

La notion de "cordon sanitaire" n'existe pas en France. Pour autant, cela ne signifie pas que les partis traditionnels se disent prêts à s'unir avec le parti d'extrême-droite. 

Le Vlaams Belang a-t-il sa place parmi les autres partis politiques? Selon Rik Torfs, professeur de droit canon à la KUL, ancien recteur et membre du CD&V, la question doit être juridique. "Lorsque l'on veut analyser la crédibilité d'un parti politique pour fonctionner dans un système démocratique, il faut utiliser les armes juridiques", affirme-t-il. "Il faut l'évaluer objectivement", ajoute-t-il. 

Un argument repris par Marc Uyttendaele, professeur de droit constitutionnel qui indique qu'il "faut avoir le courage de juridiciser". "Nous militons pour qu'il y ait des processus d'interdiction des partis d'extrême-droite comme il en existe dans d'autres Etats. La jurisprudence de la Cour des droits de l'Homme fait qu'on ne va pas seulement voir le programme mais aussi l'attitude des dirigeants", détaille-t-il. 

"Si on fait cela, aux prochaines élections, ce n'est pas 1/5e des Flamands qui vont voter le Vlaams Belang mais encore plus", rétorque Indra De Witte, journaliste au Het Belang Van Limburg.

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