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Dans "Les Piliers de la mer", Sylvain Tesson raconte l'escalade de 106 stacks à travers le monde. Ces colonnes marines, isolées et sauvages, sont devenues pour l’écrivain le théâtre d’une quête aussi physique que poétique
Ce n’est pas la plus haute, ni la plus connue. Mais pour Sylvain Tesson, l’ascension la plus marquante fut celle d’un stack perdu au nord de l’Écosse, dans les îles Shetland. Là, face à un granite "pulvérulent" et des orques en chasse à quelques mètres de son kayak gonflable, l’auteur-aventurier a senti "la peur réelle", celle d’un naufrage, d’une morsure, ou d’un effondrement. Une peur mêlée, comme toujours chez lui, à une fascination pour "la noblesse des choses éphémères".
Un projet né de l’aiguille d’Étretat
Tout commence à Étretat, en Normandie, sur une aiguille rocheuse plantée dans la mer. Sylvain Tesson y grimpe un jour avec son ami Daniel Du Lac. Une fois au sommet, tout bascule. "C’était un moment extraordinaire : liberté, poésie, vertige… Je me suis dit que je voulais revivre ça", raconte-t-il sur le plateau du RTL info 13h. L’idée d’un projet naît : faire le tour du monde pour escalader ces totems marins que l’on appelle des "stacks", ces colonnes de roche isolées par l’érosion au large des côtes.
Partout où la mer sculpte les falaises, des stacks se dressent, parfois à peine visibles sur une carte. En Tasmanie, au cap Horn, aux Marquises ou aux îles Féroé. Des formes que les pêcheurs et les habitants environnants entourent souvent de légendes : "on y voit des personnages qui s’éloignent, des résistants au continent", explique Sylvain Tesson. Le stack devient alors un symbole : celui de l’homme qui se détache, s’isole, résiste à l’effondrement.
Ces ascensions sont souvent périlleuses, parfois absurdes. Approche amphibie, via des falaises à descendre ou des vagues à franchir dans des conditions hostiles. "Souvent, il faut se jeter dans la mer", dit-il. Et pourtant, c’est précisément cette part d’inconfort, de lutte, qui donne tout son sens à l’expérience : "On est dans une sorte de flottaison", dit-il. "C’est très magique."
Et à l’arrivée, toujours la même sensation, mêlée d’effroi et d’éblouissement : "On est sur une toute petite zone, probablement le plus bel endroit du monde. Et on sait qu’on ne peut pas y rester. C’est la noblesse éphémères, des positions précaires."
106 stacks, et après ?
L’auteur n’en a pas fini. Il en a conquis 106, il en reste des milliers. Et déjà, il se projette dans d’autres escalades. "Je recommencerai. C'est pour moi une véritable occasion de faire une sorte de prière en mouvement, une prière que j'adresse à l'immense beauté de la terre et de la mer", conclut-il.


















