Partager:
Pour enrayer la propagation du feu, les premiers pompiers arrivés sur place ont dû rapidement comprendre un élément essentiel : si les beffrois étaient touchés, c’est toute la Cathédrale qui s’écroulait. "Les deux beffrois, dans le cadre des arches, ils ont une capacité à retenir l’ensemble de l’édifice et des arches. À partir du moment où la toiture est partie et qu’il y a effondrement partiel, structurellement l’édifice est atteint. Et dans le cadre de la propagation, nous étions sous le vent. Et ce qui a été une décision forte du général commandant de la brigade, il a fallu faire le choix. Quand on a envoyé l’adjudant-chef et un commando d’attaque pour barrer le feu au niveau des beffrois, c’est qu’il y avait une propagation qui était en cours au niveau du beffroi nord, au niveau des cloches, dont tous les supports sont en bois. Si le feu gagnait cette structure en bois, le beffroi était perdu. À partir du moment où on perd la guerre du beffroi, on perd la Cathédrale parce qu’il y a effondrement en chaîne", a expliqué le lieutenant-colonel José Vaz De Matos.
"Une scène de catastrophe"
L’adjudant-chef dont il parle, c’est Philippe Demay. "Mes chefs d’équipe très rapidement sont arrivés au niveau des tours, le plus haut possible, et ensuite de façon simultanée, on a limité la propagation au niveau des deux tours et du beffroi, tout en faisant la sauvegarde des œuvres."
Il se souvient de l’impression qu’il a ressentie en montant dans les tours. "C’est étroit, petit, avec pas beaucoup de lumière. Le matériel est lourd à monter tout en haut des tours. L’accès n’est pas évident parce que pour établir ces lances, il faut un petit peu de place et là c’est un balcon qui fait une largeur d’environ 1 mètre. Et lorsqu’on ouvre la porte de ce balcon au dernière étage des tours, on voit à ce moment-là une scène de catastrophe, avec quasiment la toiture qui commence à partir de tous les côtés."
Sans sa décision, "les tours seraient parties"
Voilà pourquoi, malgré le fait que les pompiers ont mis "le maximum de moyens hydrauliques dès le départ, avec une charpente en bois, il était très compliqué d’arriver d’enrayer la propagation au niveau de la toiture. Après, quand on a vu que la toiture était réellement partie et qu’on ne pourrait plus la récupérer, on a décidé de se maintenir sur les beffrois afin d’être sûrs qu’ils ne partent pas. Donc on a pu les sauver. C’est déjà une bonne chose. Il est clair que si on n’avait pas mis tout de suite des moyens lourds en place, les tours seraient parties c’est une certitude."
Un robot pour éteindre la flèche effondrée dans la nef
Au plus fort de l’intervention, les pompiers de Paris ont dû quitter le bâtiment. "Lorsque la flèche est tombée, on a fait reculer nos hommes et c’est à ce moment-là que vous avez pu voir nos différents bras élévateurs avec ces lances-canon qui venaient de l’extérieur afin de travailler en sécurité", explique encore l'adjudant-chef.
Un autre élément observé à ce moment-là de l’opération, ça a été l’intervention d’un robot, inventé par les pompiers de Paris eux-mêmes. "À partir du moment où on a retiré ces équipes, il n’y a plus d’attaque hydraulique contre le feu et notamment contre la partie effondrée qui continuait à brûler dans la nef. Pour éteindre cette partie effondrée qui brûlait et menaçait l’ensemble de l’édifice, et pour ne pas engager de ressources humaines, on a engagé ce robot d’extinction qui nous permet à distance d’éteindre sans prendre de risque. C’est un robot qu’on utilise souvent, notamment pour tout ce qui est infrastructures souterraines comme les parcs de stationnement couverts", a détaillé le porte-parole des pompiers de Paris, Gabriel Plus.
L'ensemble des tableaux encore dans la cathédrale sont "en bon état"
À-côté de cette mission de contrôle et d’extinction du feu, il a donc eu celle du sauvetage des œuvres. En réalité, les pompiers de Paris ont commencé à les sortir de l’édifice dès le départ du feu. Environ 100 pompiers ont été délégués à cette seule tâche dès les premières minutes. Résultat, au surlendemain, "l’ensemble des œuvres de la salle du trésor ont été évacuées. Il nous reste à évacuer celles qui restent sur les chapelles attenantes, tout autour de la cathédrale", a détaillé le porte-parole, rassurant sur le fait que "l’ensemble des tableaux qui sont sur les différentes chapelles attenantes sont en bon état." Elles étaient en cours d’évacuation vers 15h00 ce mercredi.
De plus, pendant l’intervention, "les jets des lances qui ont été établis étaient là pour éteindre l’incendie du toit. On a fait en sorte que ces jets ne soient pas aussi puissants pour détruire les vitraux et donc ils n’ont pas été abîmés par l’eau".
Les pignons menacent toujours de tomber
48 heures après le drame, les pompiers continuent de prendre des risques. En effet, "les pignons menacent en partie de tomber". Voilà pourquoi "un certain nombre de statues et pourquoi pas de pierres vont pouvoir être retirées de ces pignons pour éviter qu’ils soient fragilisés. Les pignons ne tiennent plus grâce au toit. Ils ne tiennent que par eux-mêmes. Et donc ils sont soumis aux aléas météorologiques, notamment le vent, et donc il faut éviter que ces pignons soient fragilisés donc c’est pour ça qu’on leur retire du poids."
Il faut désormais retirer l'échafaudage
L’autre problème actuel, c’est l’échafaudage. "Par la chaleur, il a été crucialement déformé. Heureusement il ne s’est pas effondré, donc il ne fragilise pas pour le moment la voûte. Toujours est-il qu’il va falloir l’enlever. Donc un certain nombre d’initiatives, conduites par les experts, visant à faire en sorte que l’échafaudage puisse être retiré correctement, amène à placer un certain nombre d’engagements techniques pour que cet échafaudage puisse être retiré correctement", dont les poutres de plus de 20 m de long apportées par la société belge Artbois, d’Etalle, tôt ce matin. Elles consolideront les murs de la cathédrale.
Enfin, le porte-parole a expliqué que concernant une éventuelle reprise de feu, "plus le temps passe, moins il y a de chances que le feu reprenne".
Côté bilan, un seul pompier a été légèrement blessé dans l’intervention, mais il "va très bien" à l’heure actuelle.