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Cinq détenues dans 12 m2: l'Etat condamné pour détention "indigne"

Le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat pour des "conditions indignes de détention" à la maison d'arrêt de Mulhouse (Haut-Rhin), où cinq détenues cohabitaient dans une cellule de moins de 12 mètres carrés, a appris l'AFP mercredi.

Dans sa décision, datée du 16 novembre et consultée par l'AFP, le tribunal reconnaît le "préjudice moral" subi par une détenue incarcérée du 18 mai au 27 juin 2018 à Mulhouse, et condamne l’État à verser 1.000 euros "en réparation".

Sur 40 jours de détention, la détenue avait passé les dix premiers dans une cellule "réservée aux nouvelles arrivantes, d'une superficie de 6,46 m2, qu'elle partageait avec une autre détenue".

Puis elle avait passé 30 jours dans une cellule d'une superficie de 11,81 m2, qu'elle partageait avec quatre autres détenues.

Le tribunal a souligné "la sur-occupation de cette dernière cellule", laissant à chaque détenue "moins de 3 m2 d'espace individuel, sans compter l'emprise au sol du mobilier (lits superposés, table, chaises, toilettes)".

Il pointe également l'absence de véritable séparation avec les toilettes, "interdisant ainsi toute forme d'intimité et induisant des risques en matière d'hygiène", et relève l'absence de système d'aération.

Sur les arguments soulevés en défense par le ministère de la justice, qui faisait état de "travaux de rénovation" achevés à la maison d'arrêt, le tribunal pointe que seule "la réalisation des peintures dans les coursives du bâtiment, et non dans les cellules" est établie.

La détenue "a été incarcérée dans des conditions indignes (...) pendant une période totale de 40 jours", conclut le tribunal.

"Il s'agit d'une juste application de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) et d'une situation tristement courante en France depuis de nombreuses années", a réagi auprès de l'AFP l'avocate de la famille de la détenue, Me Coralie Maignan.

"Ce qui me dérange plus particulièrement, c'est de constater que malgré ces condamnations en cascade, nous ne constatons au quotidien aucune amélioration dans les prisons françaises" a-t-elle ajouté.

La surpopulation est un mal endémique des prisons françaises. Au 1er août, la France comptait plus de 74.000 détenus pour quelque 60.000 places opérationnelles. Près de 2.400 détenus étaient contraints de dormir sur un matelas posé à-même le sol.

Cette situation a valu à la France d'être condamnée à plusieurs reprises par la CEDH, la dernière fois en juillet pour les conditions de détention dans la prison de Fresnes (Val-de-Marne).

La maison d'arrêt de Mulhouse a fermé ses portes à l'automne 2021, précisément en raison de sa vétusté, et un nouvel établissement a été construit à proximité, le centre pénitentiaire de Mulhouse-Lutterbach.

Dans son rapport, après une visite effectuée en décembre 2022, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté salue les conditions immobilières "exceptionnelles" de ce nouveau centre pénitentiaire, qui n'ont cependant "pas empêché le développement de prises en charge indignes", liées à la surpopulation.

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