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Autrefois, les Américains pratiquaient la diplomatie de la canonnière, imposant au monde leur volonté par la force militaire. Aujourd’hui, c’est la diplomatie du portefeuille.
D’ailleurs, faut-il encore appeler ça de la diplomatie ? Le conseiller de la Maison Blanche pour le commerce Peter Navarro a déclaré récemment. « L’Inde agit comme un bureau mondial de blanchiment du pétrole russe, en transformant du brut en exportations juteuses et en offrant à Moscou les dollars dont elle a besoin ».
Pour parodier une phrase célèbre du général prussien Carl Von Clausewitz, le commerce « c’est la poursuite de la guerre par d’autres moyens. »
D’abord les faits : l’Inde a effectivement augmenté considérablement ses importations de pétrole russe. En 2022, il représentait 2 % de la consommation indienne. Aujourd’hui, c’est 36 %. Après la Chine, l’Union indienne est le deuxième débouché pour le brut russe. Elle y trouve son compte car la Russie lui fait une ristourne de 7 % sur les cours mondiaux. Avec 1,8 million de barils importé chaque jour, ça fait des sous.
Mais l’Inde se défend en disant que ces achats participent à la stabilisation des cours, et que l’Europe comme les États-Unis n’ont aucune réticence à acheter à l’Inde du pétrole raffiné, même s’il est d’origine russe. Par ailleurs, les Américains ont épargné la punition à deux secteurs : la pharmacie, ils ont besoin de médicaments indiens et l’électronique – les « iPhone » de la société américaine Apple sont en partie fabriqués en Inde.
Des secteurs touchés, une perte du PIB
En revanche, de nombreux secteurs de l’économie du pays le plus peuplé du monde – avec 1,4 milliard d’habitants – vont être impactés : le textile, les fruits de mer, la joaillerie, le photovoltaïque dont les États-Unis sont le premier marché. De nombreux contrats ont déjà été annulés avec pour conséquences d’importantes suppressions d’emplois.
Comme toujours dans ce genre de crise, ce sont le plus pauvres qui seront impactés, et le gouvernement indien a déjà prévu des baisses de taxes sur les produits de première nécessité pour soutenir la consommation. Les grands cabinets d’expert économiques estiment que l’Inde pourrait perdre entre 0,7 et 1,2 % de PIB .
C’est conséquent mais pas insurmontable à long terme, car l’Inde a dans cette guerre commerciale un allié qui s’appelle la Chine, à peine moins peuplée avec, elle aussi, environ 1,4 milliard d’habitants. D’ailleurs, le premier ministre indien Narendra Modi se rendra à Pékin ce week-end.
Quant aux Américains, ils n’ont pas totalement rompu les négociations et demandent, à l’Inde, pour diminuer leurs représailles d’importer plus de produits agricoles et laitiers des États-Unis… Au détriment bien sûr des agriculteurs indiens ! Ne cherchez pas une morale à cette histoire, il n’y en a pas.


















