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Procès Ikea: la défense plaide la relaxe dans l'affaire dite d'espionnage des salariés

"Vous allez prononcer un jugement de relaxe générale": l'avocat d'Ikea France s'est efforcé de démonter jeudi devant le tribunal de Versailles l'ensemble des charges qui pèsent sur le géant suédois de l'ameublement, accusé d'avoir espionné plusieurs centaines de ses salariés à travers toute la France.

Le tribunal a mis son jugement en délibéré au 15 juin prochain.

Ikea France comparaît pour avoir mis en place un système illégal de surveillance de ses employés en payant une société d'investigations privée (Eirpace) qui, selon l'accusation, piochait dans des fichiers policiers des données confidentielles comme les antécédents judiciaires ou le patrimoine des intéressés.

L'entreprise et plusieurs de ses anciens responsables sont jugés pour des faits commis entre 2009 et 2012, même si les pratiques illégales de surveillance remontaient, selon l'accusation, au début des années 2000.

Mardi, le parquet a requis 2 millions d'euros d’amende contre Ikea France et un an de prison ferme à l'encontre d'un de ses ex-PDG, Jean-Louis Baillot.

Un "message fort" envoyé à "toutes les sociétés commerciales", dans un procès où l'enjeu est celui "de la protection de nos vies privées par rapport à une menace, celle de la surveillance de masse", a justifié la procureure, Paméla Tabardel.

Lors de leurs plaidoiries jeudi, les avocats de la défense ont tous demandé la relaxe de leurs clients, anciens dirigeants de l'entreprise, directeurs de magasins, fonctionnaires de police.

Comme Me Emmanuel Daoud au nom de l'entreprise, ils ont pointé du doigt les "lacunes, redondances (des qualifications pénales, ndlr), béances et absences de preuves matérielles" du dossier, en partie reconnues par la procureure elle-même qui y a relevé des "imperfections".

Au centre de ce que le parquet a qualifié de "système d'espionnage organisé" figure Jean-François Paris, l'ancien "Monsieur Sécurité" d'Ikea France.

- "Noeud de passions"

A la barre, M. Paris, contre qui le parquet a requis trois ans de prison dont deux avec sursis, a reconnu avoir surveillé certains employés et répété l'avoir fait sur consigne de l'ancien PDG Jean-Louis Baillot.

Le conseil de M. Baillot, Me François Saint-Pierre, a exhorté le tribunal à "s'intéresser aux preuves matérielles" plutôt qu'aux "témoignages (qui sont) variables", arguant que le dossier était vide de tout mail échangé entre Jean-François Paris et son client concernant les activités confiées à Eirpace.

Seul Jean-François Paris incrimine son client, a encore soutenu l'avocat, dans un "nœud de passions (et) d'acrimonie".

Directeur de la gestion des risques d'Ikea France de 2002 à 2012, Jean-François Paris a reconnu qu'il transmettait des listes de personnes "à tester" à Eirpace, une société spécialisée "en conseil des affaires" dirigée par Jean-Pierre Fourès.

Ce dernier est accusé d'avoir, par l'entremise de policiers, eu recours au Système de traitement des infractions constatées (STIC) pour se procurer des renseignements confidentiels sur des employés d'Ikea.

"Les retours des recherches de M. Fourès ne permettent pas d'établir de lien avec les fichiers de police", a estimé le conseil de M. Paris, Etienne Bataille, dédouanant ainsi son client de toute demande de recherche illégale.

A l'encontre de Jean-Pierre Fourès, ancien policier des Renseignements généraux, le parquet a requis un an de prison ferme.

Lundi, les avocats de 120 parties civiles constituées dans ce dossier ont demandé lors de leurs plaidoiries "un jugement exemplaire" et plusieurs millions d'euros de dommages et intérêts, dont 2 millions pour le seul syndicat FO à l'origine de la plainte contre Ikea France.

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