Partager:
Le PS dénonce une attaque "inédite" de Bart De Wever contre la CEDH, cosignée avec huit dirigeants européens, l'accusant de saper l’État de droit au nom d’un agenda sécuritaire proche de l’extrême droite.
Le Parti socialiste s'est indigné vendredi de l'attaque "inédite" contre la Cour européenne des droits de l'homme menée par le Premier ministre Bart De Wever et huit autres chefs de gouvernement européens.
"Jusqu'à quand trouvera-t-on normal de voir la Belgique et les démocraties européennes sombrer dans cette remise en cause perpétuelle de l'État de droit", s'est inquiété quant à lui vendredi le Centre d'action laïque (CAL), à la lecture d'un courrier du Premier ministre Bart De Wever et de huit autres dirigeants européens.
"C'est terrible que M. De Wever s'associe au projet d'extrême droite de Mme Meloni", a réagi vendredi le député Groen Staf Aerts. "La Convention européenne des droits de l'homme nous protège tous contre les abus de pouvoir. Quiconque touche à cela touche aux fondements de notre État de droit."
Dans un courrier sorti jeudi en fin de journée, Bart De Wever, Mette Frederiksen (Danemark), Giorgia Meloni (Italie), Christian Stocker (Autriche), Petr Fiala (République tchèque), Kristen Michal (Estonie), Erika Silina (Lettonie), Gitanas Nauseda (Lituanie) et Donald Tusk (Pologne) réclament plus de marge de manœuvre des États contre l'immigration irrégulière et la criminalité, associées dans ce texte pour "une minorité de migrants".
Ils pointent notamment du doigt l'interprétation de la Convention européenne des droits de l'homme par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), qui, dans certains cas, "limite notre capacité à prendre des décisions politiques dans nos propres démocraties". Bart De Wever a décidé, après consultation du gouvernement, de cosigner le texte. "Cette initiative constitue une attaque inédite contre une des plus hautes juridictions européennes, et qui plus est, contre celle qui veille à la protection de nos libertés fondamentales", a dénoncé le chef de groupe PS à la Chambre, Pierre-Yves Dermagne.
Pour les socialistes francophones, cette lettre place la Belgique en dehors de son rôle historique de défense des droits humains. "La CEDH est un phare, un repère essentiel à l'heure où l'extrême droite remet en question les fondements de notre démocratie. Loin de renforcer la sécurité, ce courrier affaiblit l'État de droit".
Le groupe PS rappelle également que ce n'est pas la première fois que le Premier ministre remet en cause la justice internationale. Il y a quelques semaines, il avait dû s'expliquer pour ses déclarations sur le mandat d'arrêt visant le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. "Aujourd'hui, il s'en prend à la CEDH. Jusqu'où ira-t-il ?"
"Un Premier ministre a tous les leviers pour agir : modifier les conventions, faire évoluer la législation, donner plus de moyens à la justice, soutenir les forces de l'ordre, renforcer la sécurité… mais certainement pas s'en prendre aux juges et aux décisions de justice", poursuit M. Dermagne.
Ce n'est pas une attaque contre l'État de droit
La lettre du Premier ministre Bart De Wever et de huit autres dirigeants européens mettant en cause la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme en politique migratoire n'est pas une attaque contre l'État de droit, a assuré vendredi le ministre des Affaires étrangères Maxime Prévot.
Le courrier a bien été concerté avec tous les partis du gouvernement, à l'initiative du Premier ministre, a confirmé le vice-Premier ministre Engagés. Son message est ciblé sur les personnes migrantes en situation irrégulière et par ailleurs criminels, "donc un groupe limité de personne au pedigree peu enviable", expose M. Prévot.
À ses yeux, il ne faut donc pas donner à ce message "plus de portée qu'il n'en a, ni sombrer dans la caricature". Plusieurs pays co-signataires ont aussi des socialistes dans leur gouvernement, à commencer par les Danois qui sont à l'origine de la démarche, fait-il observer.
Le PS s'est indigné d'une "attaque inédite" d'un Premier ministre belge contre la CEDH. Mais pour le chef de la diplomatie belge, "ce n'est pas une attaque contre les institutions judiciaires européennes ni les droits humains ou l'État de droit, mais un message visant à dire que l'on doit trouver un nouveau chemin européen - et donc d'éventuelles réformes - pour que les États puissent plus aisément trouver des solutions d'expulsion de ces criminels, dans le respect de la séparation des pouvoirs, ce qui est conforme à l'esprit de l'accord de gouvernement."



















