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L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) refait surface cette semaine à Bruxelles. L’Europe souhaite faire avancer ce dossier controversé, mais pour Anne-Catherine Dalcq, ministre wallonne de l’Agriculture, les conséquences pour les filières agricoles locales seraient lourdes.
« Une concurrence déloyale »
Interrogée par Martin Buxant sur Bel RTL ce mardi matin, Anne-Catherine Dalcq a exprimé ses craintes face à l’impact d’un tel accord : « Si c’était voté, ça ouvrirait des portes à des productions importantes venant d’Amérique du Sud, sur des filières sensibles comme le bœuf ou le sucre », a-t-elle déclaré. Elle pointe des différences majeures de standards entre les deux continents : « On a un certain nombre de règles au niveau européen – environnementales, sanitaires, de bien-être animal – qui ne sont pas les mêmes en face. Donc c’est de la concurrence déloyale, ça va impacter le revenu des agriculteurs. »
Selon la ministre, l’enjeu dépasse la seule question économique : « On fragilise les exploitations et on met en péril certaines reprises. Certains jeunes agriculteurs doutent sur le fait de reprendre leur exploitation. » Elle souligne également l’incohérence d’introduire dans les assiettes européennes des produits qui ne respectent pas les normes imposées localement : « On laisse rentrer des productions qui ne sont pas faites avec les mêmes standards de production. »
Une qualité alimentaire en question
Interrogée sur la qualité des produits importés, Anne-Catherine Dalcq insiste sur les écarts : « On met dans l’assiette du citoyen européen, sans forcément qu’il s’en rende compte, une nourriture pas de la même qualité. Ce sont des standards de production moins élevés que les nôtres. Au niveau du bien-être animal, au niveau environnemental, ce ne sont pas les images d’élevages que l’on connaît en Wallonie, avec du bétail dans les prairies ardennaises. »
Il faut préserver l’autonomie alimentaire
Elle met également en garde contre l’utilisation de produits phytosanitaires interdits en Europe mais autorisés en Amérique du Sud : « Il y aura des possibilités de résidus qui ne se retrouvent pas en Union Européenne parce que ces produits sont interdits. » Même si l’Union européenne promet d’intensifier les contrôles, la ministre estime que cela reste insuffisant.
Pour notre invitée, l’enjeu est également stratégique. Elle appelle à ne pas répéter les erreurs commises dans d’autres domaines : « Si on n’a plus une autonomie alimentaire au niveau européen, ce qui s’est passé pour l’énergie ou la Défense pourrait se reproduire. L’alimentation, on a encore une autonomie. Il faut la préserver. »
Un traité déséquilibré
Membre du MR, un parti traditionnellement favorable au libre-échange, la ministre précise qu’elle ne s’oppose pas au principe d’accords commerciaux, mais au contenu de celui-ci : « Un traité, c’est un accord, et il doit être équilibré. Et quand on va signer un accord qui met trois filières en risque – le bœuf, le sucre, la volaille – c’est qu’on met en péril des secteurs qui sont pourtant importants pour l’Union européenne. »
Les discussions se poursuivent à Bruxelles. La position de certains pays reste à déterminer. « La Belgique va s’abstenir », précise notre interlocutrice.
















