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Un chercheur à l'ULiège, explore le potentiel de deux plantes médicinales camerounaises pour développer de nouveaux traitements contre le paludisme, une maladie qui tue des centaines de milliers de personnes chaque année.
Le paludisme ou malaria, reste l'un des principaux fléaux sanitaires mondiaux, touchant principalement les pays en développement.
En 2022, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a recensé environ 249 millions de cas de paludisme, causant 608 000 décès, dont 96 % sont survenus en Afrique, essentiellement chez des enfants de moins de cinq ans.
Notre voisine, la France, est le premier pays occidental en nombre de cas de paludisme d'importation. Pourtant, c'est peut-être en Belgique qu'une solution naturelle contre la maladie pourrait être trouvée.
Qu'est-ce que le paludisme ?
Cette maladie est causée par des parasites du genre Plasmodium, et transmise par les piqûres de moustiques infectés.Les principaux symptômes du paludisme sont la fièvre, les sueurs, les maux de têtes et les douleurs musculaires.
Dans les cas graves, la malaria peut évoluer vers des formes sévères comme le neuropaludisme, potentiellement mortel. La souche Plasmodium falciparum, particulièrement virulente, est responsable de la majorité des cas graves de paludisme. En Europe, environ 6 000 cas de paludisme importé sont signalés chaque année, avec un taux de 10 % évoluant vers des formes graves de la maladie.
Aujourd'hui, elle continue de résister à de nombreux traitements, notamment aux thérapies basées sur l'artémisinine, une molécule extraite de la plante Artemisia annua.
Cette résistance, en particulier observée en Asie du Sud-Est, menace de s'étendre à l'Afrique, ce qui pourrait entraîner des conséquences dévastatrices.
Un traitement naturel
Pierre Leonel K. Tafokeu Taguimjeu, doctorant et assistant au laboratoire de chimie des molécules naturelles de Gembloux Agro-Bio Tech (ULiège), mène une recherche prometteuse visant à développer de nouveaux traitements contre le paludisme, aussi appelé la malaria.
Ces traitements pour combattre la maladie utilisent des plantes médicinales camerounaises.
Son travail se concentre sur les métabolites secondaires de deux plantes : Croton sylvaticus (Euphorbiacea) et Lantana camara (Verbenacea), toutes deux utilisées dans la médecine traditionnelle pour lutter contre cette maladie dévastatrice.
De nouveaux actifs pour lutter contre les formes graves
"Les plantes médicinales conservent et synthétisent une panoplie de substances bioactives qui peuvent être utilisées comme matières premières dans la conception de phytomédicaments", explique-t-il.
Les phytomédicaments sont des médicaments dont les principes actifs sont exclusivement d'origine végétale.
L'objectif de sa recherche est d'exploiter le potentiel de ces plantes pour combattre les souches résistantes à l'artémisinine, en identifiant de nouveaux principes actifs capables de lutter contre les formes graves de la maladie.
Deux plantes au grand potentiel
Son approche s'est d'abord concentrée sur les médecines traditionnelles et les remèdes issus des plantes utilisées au Cameroun pour traiter le paludisme.
Parmi celles-ci, les plantes de Croton sylvaticus et de Lantana camara se sont démarquées. Localement, ces plantes sont reconnues pour leur efficacité non seulement contre le paludisme, mais également contre d'autres maladies parasitaires telles que la leishmaniose.
Ces espèces ont été choisies pour leur potentiel à fournir de nouvelles molécules pouvant être utilisées dans la formulation de traitements plus efficaces.
Des premières découvertes prometteuses
Les recherches menées par le jeune chercheur ont déjà permis d'isoler et de caractériser plusieurs composés bioactifs, notamment à partir des feuilles et des racines de Lantana camara.
Il a ainsi identifié dix-huit composés différents, dont certains ont montré une forte activité antiplasmodiale, qui agit contre les parasites responsables du paludisme.
Le chercheur explique que l'un des composés, désigné sous le nom de LCR2, s'est révélé particulièrement efficace contre les souches résistantes de la maladie, avec des valeurs d'inhibition remarquables.
Ces résultats sont significatifs, car ils confirment non seulement l'usage traditionnel de Lantana camara dans le traitement du paludisme, mais ils ouvrent également la voie à la création de nouveaux médicaments basés sur ces plantes.
Vers une solution durable contre le paludisme
L'objectif final de ces recherches est d'utiliser ces composés pour développer un médicament capable de combattre efficacement le paludisme, en particulier les formes résistantes aux traitements actuels.
Pour cela, Pierre Leonel K. Tafokeu Taguimjeu s'appuie sur des techniques avancées pour isoler et analyser les extraits végétaux, espérant ainsi fournir une solution à long terme face à cette crise sanitaire mondiale.
Avec des souches de plus en plus résistantes aux traitements conventionnels, la recherche de nouveaux médicaments devient cruciale. L'approche de ce chercheur, qui allie tradition et science moderne, pourrait bien représenter un tournant dans la lutte contre le paludisme.