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Passé 40 ans, la presbytie devient une réalité pour une grande partie de la population. Ce trouble visuel lié à l’âge, dû à la perte d’élasticité du cristallin, rend difficile la vision de près. Anne, qui porte des verres progressifs depuis plus de dix ans, ne cache pas son intérêt pour une solution alternative : « C’est une contrainte. Si effectivement, on pouvait avoir des gouttes qui permettent d’éviter les lunettes, ça serait top. »
Un laboratoire pharmaceutique américain vient justement d’obtenir l’autorisation de mise sur le marché de gouttes oculaires capables de corriger temporairement la presbytie. Selon le fabricant, une seule application permettrait de retrouver une vision nette de près pendant environ dix heures. Leur commercialisation est prévue d’ici la fin de l’année aux États-Unis.
Une solution ponctuelle, mais pas universelle
Pour certains professionnels de la vue, ces gouttes peuvent représenter une aide ponctuelle. Mais elles ne conviendront pas à tous les profils. « Ça peut être pratique pour quelqu’un qui n’a pas de correction en vision de loin », observe Bastien Mauen, opticien. « Mais si la personne est astigmate ou myope, elle aura quand même besoin de lunettes en vision de loin. »
En Belgique, ce traitement n’a pas encore reçu le feu vert des autorités. Toutefois, des collyres au fonctionnement similaire existent déjà. Leur action repose sur une contraction de la pupille, permettant d’améliorer la netteté de la vision de près.
Des effets secondaires non négligeables
Si la promesse de se passer de lunettes séduit, les ophtalmologues appellent à la prudence. Ces gouttes ne sont pas dénuées d’effets indésirables, comme le rappelle la docteure Valentine Nyssen : « On sait que ces gouttes peuvent provoquer, chez à peu près un patient sur six, une irritation de la surface oculaire, des maux de tête, une vision assombrie, une augmentation des corps flottants. »
La vision nocturne pourrait également en pâtir : « La nuit, si la pupille est rétrécie, on va voir moins bien. Parce que normalement, la pupille doit se dilater pour qu’il y ait plus de lumière qui rentre. Et donc là, on empêche ce mécanisme. »
Des risques sur le long terme
Au-delà des effets immédiats, une utilisation prolongée pourrait causer des dommages durables à l’œil. Les études mentionnent, dans de rares cas, un risque de décollement de la rétine. Mais c’est surtout la contraction chronique de la pupille qui inquiète les spécialistes.
« Quand on resserre de manière chronique, au long cours, la pupille, le petit muscle, le sphincter de l’iris, risque de se fibroser », explique l’ophtalmologue. « Il y a un peu d’inflammation qui se crée et des adhérences entre l’iris et le cristallin. Et la pupille va finir par ne plus bien se dilater. Même quand on ne mettra plus ces gouttes, la pupille restera petite. » Ce phénomène pourrait compliquer une éventuelle opération de la cataracte.
Malgré les contraintes qu’elles représentent, les lunettes adaptées demeurent aujourd’hui la méthode la plus fiable pour corriger la presbytie. Des lentilles existent également, bien qu’un peu moins efficaces. Quant à la chirurgie réfractive, elle est réservée à des cas très spécifiques et reste peu courante.


















