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Après plusieurs heures d’un duel intense entre la défense de Cédric Jubillar et le chef d’enquête, les assises du Tarn poursuivent ce jeudi l’audition de gendarmes investis dans les aspects techniques des investigations, au quatrième jour du procès du peintre-plaquiste pour le meurtre de son épouse disparue, Delphine Jubillar.
Mercredi, la cour comme le public et la presse ont assisté pendant près de sept heures à la première grande confrontation de ce long procès, mettant aux prises le responsable des investigations de ce dossier, le major Bernard Lorvellec, et les deux avocats de l’accusé, Mes Emmanuelle Franck et Alexandre Martin.
Ce mardi, veille de la confrontation, c’était au tour des premiers gendarmes arrivés au domicile de Cédric Jubillar de livrer leur témoignage. Selon La Voix du Nord, certains récits étaient flous, les faits remontant à cinq ans. La défense n’a d’ailleurs pas manqué de dénoncer ces « souvenirs flottants », sur « les points où il y a discussion ».
Trois options
Le procès s’est ensuite poursuivi ce mercredi, avec le rapport circonstancié du directeur de l’enquête, résumant les investigations réalisées. Un exposé détaillé qui a duré plus de deux heures. La conclusion : « Tous les éléments recueillis ramènent notre attention à (Cédric) Jubillar », a déclaré mercredi M. Lorvellec.
« Nous avons mis tout en œuvre, utilisé tous les moyens mis à notre disposition, recherché toutes les causes possibles et/ou plausibles », a souligné le major Bernard Lorvellec à la barre de la cour d’assises. Silhouette massive et barbe bien taillée, le militaire s’est appliqué à aborder tous les actes d’investigation conduits à partir de la disparition de Delphine Jubillar, dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 dans la petite ville de Cagnac-les-Mines.
Le major Lorvellec a expliqué que les enquêteurs s’étaient focalisés sur trois options après la disparition : un potentiel suicide, un départ volontaire de Delphine Jubillar ou l’intervention d’un tiers. Dans ce dernier cas de figure, les pistes d’un rôdeur, d’un amant ou du mari ont été étudiées. « Chacune de ces hypothèses sera refermée (…) pendant que celle de M. Jubillar prend de l’ampleur », a résumé M. Lorvellec.
Faisceau d’indices
S’appuyant souvent sur des photos présentées à la cour, il s’est minutieusement attardé sur plusieurs éléments matériels (la paire de lunettes brisée de Delphine, le stationnement inhabituel de son véhicule…) et a également rappelé les menaces proférées devant témoins par le mari, le récit du jeune fils du couple parlant d’une dispute entre ses parents ce soir-là ou encore le comportement de Cédric Jubillar qui « va très vite se désintéresser de la disparition de son épouse et dès la mi-janvier va fréquenter d’autres femmes ».
Objectivement, l’ensemble de ces éléments tend à démontrer la participation de M. Jubillar
« Objectivement, l’ensemble de ces éléments tend à démontrer la participation de M. Jubillar » à la disparition de son épouse, a-t-il souligné.
Des collègues du major ont également été entendus mercredi dans la matinée sur l’ampleur des moyens engagés. « La mobilisation a été immédiate et massive », a décrit celle qui commandait à l’époque la compagnie de gendarmerie d’Albi, Sophie Lambert. Elle a assuré avoir engagé « la moitié des effectifs de (sa) compagnie », reçu d’importants renforts et mis en œuvre d’importants moyens « humains, terrestres, aériens et nautiques ».
« On ne s’est rien interdit, on a mobilisé tous les moyens à notre disposition, mais nous avons été confrontés à des difficultés », a de son côté reconnu le commandant Jérôme Guillen, directeur opérationnel de l’enquête, une fois transférée dans les mains de la section de recherches de Toulouse. Parmi ces difficultés : des points particuliers du terrain qui ne sont pas répertoriés, des endroits dangereux liés à l’ancienne activité minière et enfin la situation géographique, avec des lieux « permettant la dissimulation d’un corps ».
Face à l’enquêteur, dans le droit fil de la ligne de défense offensive qu’ils ont adoptée tout au long de l’instruction, les avocats de M. Jubillar ont attaqué avec véhémence les conclusions du major Lorvellec.
Stratégie de diversion
« Vous affirmez des choses qui ne sont pas exactes sur les témoins », « déductions mais sans aucun élément objectif », « j’entends ce que vous dites Monsieur l’enquêteur mais vous auriez dû investiguer » : Mes Franck et Martin ont alterné les attaques, cherchant pendant plus de trois heures à dégonfler tous les éléments considérés comme intangibles par l’accusation.
Une stratégie de « dilution » et de « diversion » que dénonce l’un des avocats des frères et sœur de Delphine Jubillar, Laurent de Caunes. Sa consœur, Me Malika Chmani, défendant les intérêts des enfants, considère quant à elle qu’il y avait « suffisamment d’éléments » pour confirmer la culpabilité de M. Jubillar.
Je n’ai pas tué Delphine
Dans son box, Cédric Jubillar écoute attentivement les échanges et n’a pour le moment pas encore été interrogé sur les faits.
Ce mercredi, il a une nouvelle fois répété qu’il n’avait « pas tué Delphine ». Cédric Jubillar, 38 ans, est détenu depuis juin 2021. Il dément depuis le début de cette affaire avoir tué celle qui était sa compagne depuis leurs 18 ans et qui lui avait annoncé sa volonté de divorcer.
Jeudi, pour ce qui devrait, sauf imprévu, être la dernière journée de cette première semaine d’un procès qui doit en compter quatre, la cour va entendre des gendarmes dédiés aux investigations numériques, un enquêteur cynophile spécialisé dans la recherche de personnes et d’autres techniciens dont les conclusions devraient également être âprement discutées. Le verdict est attendu le 17 octobre.



















