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L’annonce a été faite juste avant une rencontre avec le président chinois Xi Jinping : Donald Trump veut que l’armée américaine reprenne les essais nucléaires. Le dernier test américain remonte à 1992. « D’autres semblent tous faire des essais nucléaires », a justifié le président américain, visant sans les nommer la Russie et la Chine. Cette décision met fin à un moratoire de fait et bouscule l’équilibre mondial, établi en grande partie par le Traité d’interdiction complète des essais (CTBT) de 1997.
Un arsenal à vérifier ou un signal politique ?
Selon Heather Williams, directrice du Projet sur les questions nucléaires au CSIS, notre Experte du jour, les États-Unis n’ont techniquement pas besoin de nouveaux essais explosifs. « Le dernier test américain date de 1992, en grande partie à cause du tollé général, des impacts environnementaux et des conséquences humanitaires », rappelle-t-elle.
Aujourd’hui, l’arsenal américain est vérifié sans explosion, grâce au « programme de gestion stratégique des stocks ». « Des scientifiques très intelligents utilisent des supercalculateurs, des lasers et d’autres technologies avancées pour s’assurer que l’arsenal nucléaire est apte à l’emploi », explique l’experte. Si la reprise n’est pas une nécessité technique, elle est donc un « signal politique très fort envoyé à la Russie ou à la Chine », indiquant que les USA sont prêts à « revenir à la compétition nucléaire », potentiellement avec de nouvelles conceptions d’armes.
De quels essais parle-t-on ?
L’experte apporte une nuance cruciale. Quand Donald Trump parle d’essais, vise-t-il les « têtes nucléaires » (les explosions, qui sont à l’arrêt) ou les « plates-formes de lancement » (missiles, drones) ? « Ce type d’essai [de missiles] est en cours », précise Heather Williams. « La Russie et la Chine effectuent régulièrement des essais de missiles balistiques intercontinentaux. » La Russie a récemment testé un drone sous-marin et un missile de croisière à capacité nucléaire. Les États-Unis, en revanche, ont effectué « beaucoup moins d’essais de ce type ». L’ambiguïté de l’annonce de Trump laisse donc planer le doute.
La Chine, grande gagnante ?
Si les États-Unis brisent le tabou des essais explosifs, les conséquences pourraient être paradoxales. « Si les États-Unis reprennent les essais nucléaires, d’autres détenteurs de l’arme nucléaire pourraient leur emboîter le pas », prévient l’experte. Et le pays qui en profiterait le plus « est la Chine ».
Pourquoi ? Les États-Unis ont réalisé plus de 1.000 tests dans leur histoire et la Russie (URSS) plus de 700. Ils disposent d’une quantité massive de données. « La Chine a effectué moins de 100 essais nucléaires », souligne Heather Williams. Pékin est donc désavantagé en termes de « connaissance de son arsenal et de conception d’armes ». Si le tabou mondial est levé, la Chine pourrait en profiter pour combler son retard.


















