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Après une carrière de ténor du barreau et quatre années au ministère de la Justice, l’ex-garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, se retrouve aujourd’hui sur scène, seul face au public. Dans « J’ai dit oui », un spectacle qu’il jouera le 17 décembre prochain au Cirque Royal de Bruxelles, il raconte sa traversée du pouvoir avec la liberté d’un artiste, l’honnêteté d’un homme de conviction et la verve d’un ancien avocat.
Le jour où tout a basculé
Le titre du spectacle ne fait pas référence à une union sentimentale, mais à un choix politique. Celui de répondre « oui » à Emmanuel Macron, qui lui propose en 2020 de devenir ministre de la Justice. Pourtant, quelques mois plus tôt, Eric Dupond-Moretti affirmait à la télévision qu’il n’accepterait jamais un tel poste. « La vérité, je n’imaginais pas une seule seconde qu’on me ferait cette proposition », explique-t-il aujourd’hui. « Et puis je me suis souvenu qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. »
Pourquoi ce revirement ? Pour un homme qui dénonçait souvent les failles de l’institution judiciaire, l’occasion était trop forte. « J’ai été avocat à 36 ans. Quand cette proposition est arrivée, j’étais parfois critique à l’encontre de l’institution judiciaire dont je connais les qualités, mais aussi les défauts. Et je me suis dit : mais au fond, tu donnes les clés du camion, si tu ne montes pas dedans, c’est d’une lâcheté totale. Donc j’ai accepté de monter dans le camion et j’ai essayé de mettre en place ce qui me paraissait utile à l’institution judiciaire en termes de moyens. »
Le prix de l’engagement
Durant son mandat, Éric Dupond-Moretti a connu le tumulte : critiques permanentes, affaires judiciaires personnelles, opposition politique violente. Il reconnaît : « c’est extrêmement dur, je le concède. Mais en même temps, quand vous ne faites rien… et je vous le dis : vous nourrissez une forme d’amertume ». Pour lui, mieux valait affronter l’épreuve que de se replier dans le confort du silence.
Sur scène, il revient aussi sur ce que ce passage au gouvernement a permis : un budget historique pour la Justice, des réformes, des débats houleux à l’Assemblée. Il revendique une approche « charnelle » de son ministère, à l’inverse des technocrates.
Le théâtre comme nouvel espace démocratique
Pourquoi raconter tout cela au théâtre ? Pour renouer avec ce qu’il aime le plus : la parole. « Le théâtre, c’est le premier lieu de démocratie », dit-il. « Le théâtre aujourd’hui, l’agora autrefois. Et vous faites participer les gens. Et vous le sentez, d’ailleurs. Parfois, ça accroche, parfois ça accroche un petit peu moins. C’est un exercice passionnant. »
Le spectacle, très personnel, explore les réussites, les épreuves, les affrontements politiques, et les réflexions sur la montée de l’extrême droite.
Aujourd’hui, Éric Dupond-Moretti ne ferme aucune porte. Il pourrait redevenir avocat, il a créé une société de conseil en communication, et il continue de s’exprimer, librement. Reviendra-t-il un jour en politique ? « Je ne sais pas ce que je ferai demain », admet-il.
Une chose est sûre : il n’a pas été « dégoûté » par la politique. « Ça m’a passionné. C’était difficile, dur. J’ai fait l’objet de poursuites que je considère comme iniques et scandaleurs. Ça a été une véritable épreuve, mais j’ai essayé d’être utile à la justice de mon pays », conclut-il.


















