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« On ne peut décemment pas y arriver » : la Belgique face à un véritable casse-tête pour respecter l’accord de l’Otan sur les 5 % du PIB pour la défense

Par Belga avec RTL info

Face à la pression de Trump, l’Otan vise 5 % du PIB pour la défense. La Belgique, déjà en peine pour atteindre 2 %, cherche des solutions budgétaires inédites sans sombrer dans l’austérité. Un tournant stratégique sous haute tension à La Haye.

En deux mots :

  • La Belgique peine à atteindre l’objectif de 5 % du PIB pour la défense imposé par Trump.
  • Maxime Prévot, ministre des Affaires étrangères, évoque de possibles nouveaux impôts pour financer cet effort.
  • Theo Francken, ministre de la Défense, propose d’inclure l’aide à l’Ukraine dans les dépenses de défense.
  • Sven Biscop, expert à l’Institut Egmont, doute de la faisabilité des 5 % pour la Belgique.

Le sommet de l’Otan qui se déroule mardi et mercredi à La Haye marque un vrai tournant dans l’histoire de l’Alliance atlantique. Plus de 30 ans après l’effondrement du bloc soviétique, les 32 pays de l’organisation s’apprêtent à consentir à des dépenses records, sur fond de menace russe et d’instabilité géopolitique globale.

 

 

Pour la Belgique, l’objectif de 5 % du produit intérieur brut (PIB) consacrés à la défense, porté par les États-Unis, représente un véritable défi budgétaire et s’accompagne de choix qui marqueront la politique intérieure de l’Arizona et celle des prochains gouvernements.

Des difficultés déjà présentes

Ce n’est plus un secret depuis longtemps, le Plat pays est déjà à la peine pour atteindre l’objectif de 2 % du PIB destinés à la défense, entériné par les alliés de l’Otan il y a plus de dix ans. Officiellement, ce cap devrait être atteint cette année.

Théoriquement, la Belgique avait donc de bonnes nouvelles à rapporter à ses 31 alliés réunis à La Haye. C’était toutefois sans compter sur le retour tonitruant de Donald Trump à la Maison Blanche, qui a définitivement rebattu les cartes de l’ordre géopolitique mondial.

Après avoir menacé, lors de sa campagne, de ne plus défendre les pays n’atteignant pas le seuil des 2 %, il a ensuite exigé que l’effort soit désormais supérieur. Pour le président américain, ce sera 5 % ou rien.

Pour la Belgique, la différence est de taille. Le gouvernement a déjà consenti cette année à un investissement supplémentaire de 3,9 milliards d’euros pour atteindre les 2 % promis de longue date. Atteindre le seuil porté par Trump représentera donc un véritable casse-tête budgétaire nécessitant de recourir à diverses sources de financements, telles que les dividendes des participations publiques dans certaines entreprises comme Belfius ou l’impôt des sociétés issu des avoirs russes gelés, ainsi que la vente éventuelle d’actifs.

Vers un nouvel impôt ?

Interrogé dans les colonnes de La Libre Belgique samedi, le ministre des Affaires étrangères Maxime Prévot n’a pas exclu la mise en place de nouveaux impôts, même s’il ne s’agit pas « de la première piste » pour son parti Les Engagés. « L’argent ne pousse pas sur les arbres », a-t-il souligné.

Précédemment, Maxime Prévot avait fait savoir lors d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Otan en Turquie que la Belgique ne pouvait « décemment souscrire à des objectifs futurs de 5 % ou même de 3,5 % du PIB à court ou moyen terme » en raison de son « très haut niveau d’endettement ». Il avait pourtant reconnu s’être retrouvé très isolé sur la scène diplomatique, concluant que la Belgique entendait rester un partenaire fiable et ferait donc ce qui est en son pouvoir pour contenter ses partenaires.

Diviser pour mieux financer

Pour parvenir aux 5 %, sans tomber dans « l’hystérie collective » dénoncée par le président du MR Georges-Louis Bouchez, la Belgique mise désormais sur la « flexibilité », de l’aveu même du ministre de la Défense Theo Francken. Ce dernier, tout comme le Premier ministre Bart de Wever, souscrit pleinement à l’idée avancée par le secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte.

Le Néerlandais souhaite que les 5 % soient divisés en deux paquets : 3,5 % consacrés à des dépenses militaires pures et 1,5 % consacré à un ensemble de projets d’infrastructures favorisant, par exemple, le transit de troupes dans les pays de l’Alliance. Theo Francken plaide, en outre, pour que l’aide à l’Ukraine soit incluse dans les dépenses de défense collective de la Belgique.

Une solution qui pourrait ne pas en être une

Sven Biscop, directeur du programme « L’Europe dans le monde » à l’Institut Egmont estime toutefois que ce qui semble le compromis le plus viable pourrait se retourner contre une partie des alliés européens. « Concrètement, que peut-on inclure dans ces 1,5 % ? Je crains que la définition ne devienne vite très stricte et que plusieurs pays, dont les États-Unis, demandent 5 % des dépenses consacrées stricto sensu à la défense. »

Le professeur doute également que cela suffise à apaiser Donald Trump, opposé « idéologiquement » à l’Europe sur plusieurs sujets comme l’économie et les tendances politiques plus progressistes du Vieux Continent.

 

 

Reste bien évidemment l’épineuse question du délai pour se mettre en ordre de marche. À ce stade, pas de consensus, même si le ministre de la Défense estime que l’objectif de 2032 avancé par certains alliés n’est pas réaliste pour la Belgique.

Dimanche soir, plusieurs agences de presse ont annoncé qu’un accord de principe avait été trouvé par les 32 pays membres de l’Alliance sur la question des 5 %. Le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, a toutefois annoncé dans la foulée que son pays avait conclu un accord avec l’Otan lui permettant de ne pas atteindre ce seuil.

Doute de faisabilité, malgré un possible accord

Sven Biscop estime que la Belgique est contrainte bon gré mal gré de se ranger derrière l’idée des 5 %, même si « plusieurs pays européens doutent également de la faisabilité de ces 5 % ». « Les autres font semblant et misent sur une échéance plus longue, au-delà de la fin du deuxième mandat de Donald Trump. Mais diplomatiquement, la Belgique ne peut pas arriver à La Haye en s’opposant frontalement à l’objectif de 5 %. »

Il estime en outre que l’objectif de 3,5 % est plus réaliste puisqu’il équivaut aux dépenses consenties par les membres de l’Otan au cours de la guerre froide : « le chiffre de 5 % n’est basé sur rien, c’est juste un numéro, un fétiche pour Trump. Ce n’est ni nécessaire ni réaliste. »

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