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Le gouvernement wallon s'opposera à l'accord entre l'Union européenne et les pays du Mercosur. C'est en tout cas l'un des engagements concrets pris par l'exécutif au cours de sa rencontre, mercredi matin à Namur, avec les syndicats agricoles.
Autour d'une même table, les représentants de la FWA (Fédération wallonne de l'agriculture), de la Fugea (Fédération unie de groupements d'éleveurs et d'agriculteurs), de la FJA (Fédération des jeunes agriculteurs) et de l'UNAB (l'union professionnelle représentant de nombreux agriculteurs bio en Wallonie) ont une nouvelle fois déroulé leurs revendications, portant principalement sur la fin de la concurrence déloyale, l'allègement administratif et l'obtention de revenus décents.
Face à eux, le ministre-président wallon, Elio Di Rupo, le ministre de l'Agriculture Willy Borsus et le ministre du Climat, Philippe Henry - qui remplaçait sa collègue Céline Tellier, absente pour raisons personnelles - ont pris une série d'engagements, dont celui de s'opposer à l'accord entre l'Union européenne et les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Uruguay et Paraguay), symbole de la concurrence déloyale dénoncée par le monde agricole.
"Nous sommes contre ce projet d'accord et nous le disons clairement", a ainsi affirmé Elio Di Rupo. "Toutes les parties autour de la table sont contre. Ma demande, c'est qu'il y ait dès maintenant une expression tout à fait claire de la Wallonie à ce sujet", a enchaîné Philippe Henry.
Une position unanimement saluée par les syndicats agricoles. "Nous sommes contents d'entendre qu'ils ne signeront pas cet accord", a résumé Yves Vandevoorde, coordinateur politique de la Fugea, tandis que Florian Poncelet, le président de la FJA, se félicitait de "l'envie d'avancer" manifestée par les autorités, sur le Mercosur mais aussi sur l'allègement des charges administratives, avec la mise en place prochaine d'un groupe de travail.
Qu’est-ce que le traité UE-Mercosur ?
La colère du monde agricole dans plusieurs pays de l'UE, dont la France, est venue percuter les négociations avec les pays latino-américains du Mercosur, mais le devenir de ces discussions a provoqué des tensions entre Paris et Bruxelles.
Au moment où elle s'efforce d'apaiser la grogne dans les campagnes, la France a fait savoir haut et fort qu'elle s'opposait à la conclusion d'un tel accord avec des puissances agricoles comme le Brésil ou l'Argentine.
Lundi soir, l'Elysée a même assuré que les négociations avaient été interrompues en raison de l'opposition de la France. "Notre compréhension c'est que (la Commission) a bien instruit ses négociateurs de mettre fin aux sessions de négociation qui étaient en cours au Brésil", a indiqué la présidence française.
A Bruxelles, la lecture des événements n'est pas la même.
Les conditions ne sont "pas réunies" pour conclure les négociations, a reconnu Eric Mamer, porte-parole de la Commission européenne. Il y a près d'une semaine déjà, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, avait admis que la crise qui secoue le monde agricole en
Europe à travers l'Europe pourrait constituer un "obstacle" à la conclusion d'un accord.
Cependant, a pris soin d'ajouter le porte-parole de la Commission, "les discussions continuent".
"L'Union européenne continue à poursuivre son objectif d'atteindre un accord qui respecte les objectifs de l'UE en matière de durabilité et qui respecte nos sensibilités notamment dans le domaine agricole", a-t-il assuré.
Des pourparlers entre négociateurs de l'UE et du Mercosur ont eu lieu la semaine dernière au Brésil, et des "discussions au niveau technique vont continuer", a encore dit M. Mamer.
Depuis Stockholm, Emmanuel Macron a réaffirmé mardi après-midi son opposition à cet accord commercial dont les règles ne sont pas "homogènes" avec les règles européennes. Le président français doit s'entretenir jeudi avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen en marge d'un sommet européen.
"Prématuré"
Le prochain cycle de négociations "dépend de l'analyse qu'on va faire, et il est prématuré d'annoncer la prochaine date, si nouvelle date il y a, de la prochaine négociation", a souligné la Commission.
L'enjeu de cet accord de libre-échange est considéré comme essentiel par plusieurs capitales européennes, dont Berlin. Et les manifestations des agriculteurs allemands n'ont pas changé cette position, selon un diplomate européen.
Les négociations sur l'accord commercial entre l'UE et le Mercosur "doivent être rapidement conclues", avaient indiqué le chancelier allemand Olaf Scholz et le président argentin Javier Milei, lors d'un entretien téléphonique début janvier.
La Commission a rappelé mardi qu'elle avait reçu un mandat des Etats membres de l'UE pour négocier cet accord et qu'elle entendait bien porter les discussions à leur terme.
La conclusion d'un tel accord doit ensuite être avalisée par les 27, à la majorité qualifiée. Mais chaque pays doit ensuite ratifier ce nouveau traité avant sa mise en oeuvre, offrant de facto la possibilité pour un pays de le bloquer.
Les négociations sur ce texte ont débuté il y a près d'un quart de siècle, en 2000, entre l'UE et les quatre pays fondateurs du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay).
Un accord politique avait été conclu en 2019, mais l'opposition de plusieurs pays, dont la France, a bloqué son adoption définitive, en raison, entre autres, de nouvelles conditions dans le domaine de la protection de l'environnement.


















