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Faut-il interdire l’ultra fast-fashion en Belgique ? Cette mode, qui consiste à acheter de nombreux vêtements peu onéreux mais de faible qualité, provoque de nombreux gaspillages. Seulement, cette question de l’interdiction de l’ultra fast-fashion, c’est avant tout une question de respect du droit international : l’Europe ne peut pas interdire la circulation de biens qui ne sont pas jugés dangereux pour les consommateurs.
De plus, l’Europe craint également la riposte chinoise, acteur majeur de l’industrie mondiale de l’habillement, qui pourrait prendre des mesures de rétorsion. Et puis enfin, c’est une décision purement politique qui vise à protéger le pouvoir d’achat des Européens.
En effet, l’Europe est envahi par ses produits bon marché, de piètre qualité certes, mais c’est le principe d’une économie mondialisée qui garantit la liberté de commerce. Seuls les produits considérés comme dangereux pour les consommateurs sont interdits d’entrer sur le territoire européen… et ça n’est pas encore le cas de l’ultra fast-fashion.
« On peut essayer de tirer le raisonnement et dire que comme désormais on reconnaît que le changement climatique est une menace fondamentale pour la santé, on pourrait dire qu’indirectement ces produits mettent en danger la santé des Européens, mais je ne suis pas certain qu’un juge tirera le raisonnement jusque-là », précise François Gemenne, politologue et chercheur FNRS.
Interdire ces produits serait aussi s’exposer à la colère de la Chine et risquer l’effet boomerang, des représailles qui frapperaient directement nos industries. « Les industriels européens auraient du mal à vendre en Chine. Le domaine de l’automobile est très parlant. En fait, on importe déjà des voitures chinoises. Si on commençait à les taxer de manière plus lourde, les Chinois diraient qu’ils interdiraient la vente de véhicules allemands en Chine. De ce fait, les industries européennes seraient pénalisées dans leurs exportations », note Bruno Colmant, économiste.
Un choix enfin, et surtout politique, éviter à tout prix la grogne populaire en protégeant son pouvoir d’achat. « C’est très ambigu. La Commission européenne a toujours voulu favoriser le pouvoir d’achat du consommateur, et donc autorise l’importation de ces biens qui sont en fait très peu chers. Parce que si en Europe on devait produire ce que l’on importe, ce serait bien sûr beaucoup plus cher », note encore l’économiste.
De ce fait, à défaut d’interdire, l’Europe durcit sa réglementation. Une dernière directive vise à faire payer le recyclage des vêtements aux producteurs eux-mêmes. Timide tentative de limiter ce gaspillage à grande échelle.
Aujourd’hui, chaque citoyen européen jette en moyenne 12 kilos de vêtements et de chaussures par an, la plupart du temps à peine portés.

















