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Il aimait se moquer des Belges, provoquer les puissants, défendre les exclus. Libre impertinent et populaire. Que reste-t-il de Coluche ? Regards croisés d’humoristes belges sur l’histoire d’un mec dont la mort accidentelle n’a laissé personne indifférent.
« Quand j’entends sa mort, mon collègue de travail Pierre Loufman m’a appelé pour me dire que Coluche était mort », se remémore l’humoriste et imitateur André Lamy. « C’était impensable », renchérit l’humoriste Zidani.
La disparition de Coluche est une onde de choc. Elle intervient seulement quelques mois après le lancement des Restos du Cœur. La cote de popularité du comique français est au plus haut, lui qui a toujours revendiqué ses origines modestes. « Il venait du peuple et les gens se reconnaissaient en lui et surtout reconnaissaient la gouaille, la gouaille très française, très café du commerce », raconte André Lamy.
« C’est quelqu’un qui a eu l’art de repérer les petites failles chez les gens », se rappelle Zidani.
« Il y a un costume, il y a un physique, il y a une façon d’être sur scène, il y a une façon de regarder en plus de l’écriture et de son talent… Ça fait quand même beaucoup chez un seul homme », détaille Vincent Taloche. « Quand j’ai écrit mes premiers sketchs, je me cherchais un nom de scène. Et je trouvais que Coluche, ça sonnait bien à l’oreille. Et j’ai cherché un nom qui sonnait comme ça : Taloche », confie l’autre frère, Bruno Taloche.
Candidat à l’Élysée
Son humour, et surtout les blagues qu’il aimait faire sur les Belges, n’était pas toujours apprécié de tous. « Je me rappelle des gens qui ne le supportaient pas en Belgique à cause de ça », dit Vincent Taloche. « On a aussi parfois fait passer les Français pour des crétins. Donc j’ai envie de dire que c’est match nul », rajoute l’humoriste Zidani.
En 1980, le clown prolétaire en salopette annonce sa candidature à l’Élysée. « Je suis certain qu’à un moment donné, il s’est dit ‘Et pourquoi pas ?’ Peut-être pas longtemps. Mais contrairement à ce qu’on a dit, c’était pas qu’une blague », assure Vincent Taloche.
« J’avais rencontré beaucoup d’hommes politiques qui disaient : ‘Oui, tu as tout à fait raison de te présenter. Moi, je te ferai jamais de problèmes, mais fais attention aux autres.’ Et chacun lui avait dit la même chose », plaisante André Lamy.
Mais quand Coluche a commencé à faire 15 % d’intentions de vote, « on a commencé à lui chercher des noises », glisse Bruno Taloche. Et André Lamy d’ajouter : « Il s’est quand même retiré avec des pressions assez fortes. Parce que la politique, c’est autre chose. »
Quel héritage a-t-il laissé ?
Alors qu’en est-il de l’héritage de Coluche ? L’humour comme il le faisait ne passerait sans doute plus aujourd’hui. « Si Coluche arrivait aujourd’hui, je ne suis pas sûr qu’il aurait le succès qu’il avait eu à l’époque. Ce n’est plus comme avant. Peut-être aussi parce qu’on ne peut plus dire non plus tout ce qu’on veut. Quand il disait ‘Le viol, c’est quand on ne veut pas. Moi, je voulais, moi.’ Ça, c’est fini. Ça ne peut plus », insiste André Lamy.
Coluche n’a pas de successeur direct, mais il a ouvert la voie à un humour plus frontal, plus impertinent. Et 40 ans après sa disparition, l’humoriste agitateur demeure le symbole de toute une génération.



















