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Audition Fonds Marianne: Sifaoui charge Schiappa, l'administration, les médias

Mohamed Sifaoui, dont l'association est pointée du doigt dans la gestion controversée du Fonds Marianne, a soutenu avoir été "manipulé" et piégé, lors d'une audition très offensive au Sénat où il a dénoncé le pouvoir politique, l'administration ou encore les médias.

Il était auditionné jeudi par la Commission d'enquête du Sénat sur la gestion controversée du Fonds Marianne lancé en avril 2021 par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée à la Citoyenneté, six mois après l'assassinat du professeur Samuel Paty. Ce fonds, initialement doté de 2,5 millions d'euros, visait à financer des associations luttant contre le "séparatisme" et l'islam radical sur les réseaux sociaux.

L'association dont M. Sifaoui était directeur des opérations, l'Union des sociétés d'éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), a été la principale bénéficiaire du fonds : 355.000 euros devaient lui être octroyés.

"La première erreur que j'ai faite, c'est d'avoir fait confiance à Mme Schiappa (actuellement secrétaire d'Etat à l'Économie sociale et solidaire, ndlr), à ses équipes, d'avoir foncé", a déclaré M. Sifaoui.

Il a estimé avoir été "piégé, instrumentalisé", "trahi" et "manipulé par le pouvoir politique".

Au lendemain de l'audition de la ministre, qui avait démenti "toute relation personnelle avec lui", M. Sifaoui lui rend la pareille: "Marlène Schiappa n'a pas été mon amie", "elle le sera encore moins demain", ajoutant: "Je ne respecte pas les gens qui n'ont pas de courage".

Il soutient qu'elle "n'est pas coupable de détournements d'argent", mais coupable "politiquement parlant".

Les échanges avec les rapporteur et président de la Commission sont vifs et agressifs. Mohamed Sifaoui dénonce le "lynchage médiatique", mais s'en prend aussi aux responsables. "M. le rapporteur, vous faites un raccourci malheureux (...) Est-ce que c'est clair !", "ce que vous dites est ridicule, il y a des insinuations derrière", lance-t-il au rapporteur (LR) Jean-François Husson. Un "Amen" fuse, en conclusion d'un propos.

"Vous devez garder vos nerfs", recadre ce dernier.

- "Trouver des lampistes" -

Mohamed Sifaoui a également attaqué le rapport "pathétique" de l'Inspection générale de l'administration (IGA) publié la semaine dernière: ce document avait relevé plusieurs irrégularités et notamment que "l'USEPPM n'était pas éligible au bénéfice d'un financement", du fait notamment "des manquements dans ses obligations déclaratives".

L'essayiste relève que les auteurs du rapport ont commis une "erreur factuelle" dans la date de l'assassinat de Samuel Paty. Cela "prouve la légèreté, la précipitation, le manque de rigueur avec lequel ce rapport a été écrit".

"L'IGA est dans une attitude d'auto-légitimation de l’administration (...) en essayant de (...) trouver des lampistes, en l’occurrence (...) moi-même et le préfet (Christian) Gravel", assène-t-il.

Christian Gravel, le patron du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR, l'organisme qui était en charge de la gestion de ce fond au ministère de l'Intérieur), également mis en cause dans le rapport de l'IGA, a démissionné la semaine dernière.

Sur le fonds de l'affaire, M. Sifaoui a affirmé avoir déposé son dossier "à la demande" de Marlène Schiappa. Et dit avoir appris "par voie de presse", "à travers une interview" de la ministre, le lancement du projet, le 20 avril, sous l’appellation Fonds Marianne.

Tout en expliquant se rendre régulièrement au CIPDR... car lié par un autre contrat passé avec cette structure: un contrat de consultant, pour former des équipes, et pour lequel il a touché 39.500 euros hors taxes, courant de novembre 2020 à janvier 2023.

"J'ai une capacité de travail qui est bien supérieure à la normale, par passion, par intérêt intellectuel à la matière", expliquera Mohamed Siafoui, auquel le président de la commission fait remarquer qu'il était aussi salarié à plein temps, dans le contrat USEPPM mis en place à partir du lancement du fonds.

Remboursera-t-il une partie de la subvention reçue, comme le lui demande l'IGA ? "Ce sera une décision de justice, si remboursement il doit y avoir", rétorque-t-il.

Le Sénat a par ailleurs voté jeudi la création d'une commission d'enquête en réponse à la demande d'une partie de la famille de Samuel Paty, qui souhaite que puissent être établies "les failles" qui ont permis l'assassinat de l'enseignant.

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