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Printemps de Bourges: Kalika, pop et déconstruction

Son nom de scène renvoie à Kali, déesse hindoue de la destruction: pour la chanteuse Kalika, il s'agit plutôt de déconstruire le sexisme et distiller son féminisme dans un breuvage pop et choc.

Avec cette artiste dans sa vingtaine, tout est inversion des rôles. Dans les années 1980, des femmes à peine vêtues dansaient dans des cages durant les concerts des rappeurs new-yorkais Beastie Boys.

Dans son clip "Olala", Kalika est derrière des barreaux mais parce qu'elle est "dangereuse", car elle parle "librement de sexe", comme elle le dit à l'AFP. L'objet sexuel, ce n'est pas elle mais Hector, nom générique donné au personnage masculin de ses chansons, pourtant lui hors de la cage.

"C'est rare, on n'a pas encore l'habitude qu'une artiste soit crue, parle de sexe comme ça et qu'elle fasse passer des messages féministes en renversant les codes, en disant que la femme n'est pas forcément que douce et sensible", décrypte pour l'AFP Angèle Chatelier. Cette journaliste musique est cette année membre du jury des Inouïs, pépinière des talents émergents du Printemps de Bourges, festival où se produit Kalika samedi.

La chanteuse s'est fait un nom avec "Chaudasse", titre coup de poing. Elle y parle de la liberté des femmes à disposer de leur corps, dénonçant aussi regards et étiquettes posés par le patriarcat.

- "Ras-le-bol" -

"C'est un ras-le-bol qui s'exprime, c'est une des premières chansons que j'ai écrites, ma mère se prenait des remarques par mon père", commence-t-elle.

Et de dérouler: "Quand tu commences à grandir, à 13 ans, tu te formes et on te sexualise, il y a des rumeurs qui courent au collège, etc..."

Son titre "L'été est mort" cible les relations toxiques à évacuer. Et les mâles qui font du mal en prennent pour leur grade dans "Touche-moi", où Kalika suggère qu'elle peut se passer des hommes et être comblée par une femme.

Sa force de caractère lui vient de sa grand-mère, "une femme hyper-inspirante" avec qui elle a vendu toutes sortes de choses sur les marchés jusqu'à son adolescence dans le Gard.

"Ma grand-mère était une grande gueule, courageuse. Si, dans un café, un serveur l'ignorait, elle était capable de lui montrer ses seins en disant: +C'est parce que j'ai ça, que je suis une femme, que tu ne me sers pas ?+", raconte-t-elle. "Moi qui étais une grande timide, ça m'a servi".

La musique aussi. "Ma première scène, c'était à 9 ans. J'étais l'héroïne à l'école de la comédie musicale +Emilie Jolie+... J'ai bien changé depuis (rires), les profs seraient choqués s'ils me voyaient aujourd'hui, eux qui me disaient qu'il fallait chanter plus doucement (rires)".

- Gens du voyage -

Elle passera par "La Nouvelle Star", tremplin musical télé, et par différentes formations aux musiques actuelles et au jazz avant de crever l'écran avec des clips qui révèlent beaucoup d'elle.

Son mini-album s'appelle "Latcho Drom", expression tzigane signifiant "Bonne Route", et le décor de la vidéo de "Chaudasse" évoque la communauté des gens du voyage.

"Je ne suis pas gitane contrairement à ce qu'on pense. Dans ma famille, il y avait plein de gens du voyage et j'ai grandi avec des gitans autour", confie-t-elle.

Dans le clip "Touche-moi", Kalika et sa complice Joanna, qui chante sur le morceau, baignent dans les références d'heroic-fantasy, avec épées et costumes d'amazones. On en revient aux divinités guerrières hindoues. Sans doute un prisme hérité de ses séjours en Inde, enfant avec sa famille puis toute seule vers ses 18 ans.

Mais Kalika, avec ses K dessinés comme des couteaux dans son logo, sait aussi fendre l'armure. "Dinosaure", texte inspiré par les confidences d'un de ses fans sur les réseaux sociaux, traite des violences d'un père. Et "Avec les gars" brosse le portrait de ces mendiants anonymes qu'on ne regarde pas dans le métro. Kalika sait cracher le feu mais aussi chanter certaines brûlures.

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