Partager:
« Nous sommes désemparés suite à cette arnaque », déplore Julien, encore ébranlé. Cet habitant de Blegny, en région liégeoise, ressent un mélange d’impuissance et de colère après une expérience interpellante.
Les faits remontent à début septembre. Face à des difficultés financières, il décide avec sa compagne Alison, qui est enceinte, de vendre une de leurs voitures. Le couple reçoit plusieurs offres d’acheteurs potentiels. « L’un d’eux nous propose une offre d’achat intéressante de 6.000 euros. Nous acceptons une entrevue avec un de ses collègues pour voir le véhicule. C’est ma compagne qui s’en occupe », explique Julien via notre bouton orange Alertez-nous. « Je l’ai contacté via Messenger sur Facebook. On a fixé un rendez-vous le 10 septembre afin qu’il regarde l’état de la voiture. Ils arrivent à deux », ajoute Alison.
Une offre séduisante qui tourne au piège
Pendant qu’elle discute et montre les documents à l’un de ces hommes, l’autre lui demande de pouvoir essayer le véhicule. « Vu qu’on se trouve dans une rue en cul-de-sac et ayant les papiers du véhicule en main, j’estime qu’il n’y a aucun risque », poursuit la future maman, confiante. Mais, contre toute attente, lors de son retour après l’essai, l’homme est loin d’être satisfait. « Il ouvre le capot pour vérifier l’état du moteur et me dit qu’il y a de l’huile dans le vase d’expansion. D’après lui, c’est un problème de joint de culasse bien connu », se souvient Alison.
Il diminue le prix de moitié, prétextant des réparations onéreuses. Interloquée, elle appelle Julien. « On est étonnés parce que la voiture avait été contrôlée avant la vente. On décide donc de réfléchir et on les laisse partir », raconte l’habitant de Blegny. Pressée de pouvoir réaliser une transaction financière, Alison prévoit un rendez-vous avec un autre acheteur le lendemain. « Il me propose 3.500 euros au vu du moteur. J’accepte car je suis enceinte et on a besoin d’argent ».
On voit clairement l’homme ouvrir le capot
Julien reste toutefois perplexe par rapport à cette histoire d’huile dans le moteur. « Il me demande de vérifier les images de la caméra de nos voisins du bas de la rue », explique Alison. Les images sont accablantes. « On voit clairement l’homme ouvrir le capot et mettre du liquide dans le vase d’expansion », s’exclame la jeune femme, scandalisée.
Le lendemain, elle se rend au commissariat de police pour porter plainte. « Mais, les policiers me disent que, comme nous n’avons que des pseudos sur Facebook, un numéro de téléphone et une vidéo de caméra de surveillance, ce n’est pas suffisant », déplore Alison. Le couple, désabusé, estime avoir été victime d’une arnaque. « On a perdu 2.500 euros dans cette histoire », souffle Julien.
Une enquête en cours
La police locale de Basse Meuse confirme le dépôt de plainte, sans donner plus de précisions : « Cette dame s’est présentée pour exprimer sa version des faits. Une enquête judiciaire est en cours ».
À ce stade, le parquet de Liège ne communique pas davantage sur ce dossier. « Nous n’avons pas encore reçu les PV au parquet relativement à ce dossier », indique la porte-parole du parquet. Concernant la pertinence et la recevabilité des informations apportées par le couple, notamment les images, elle rappelle que les dossiers sont analysés au cas par cas. « De manière générale, tous les éléments portés à la connaissance du parquet sont examinés. Il revient au magistrat en charge du dossier d’apprécier la légalité et la pertinence de tous les éléments qui lui sont soumis ».
Ce genre d’arnaque est-il fréquent ? Le parquet de Liège ne dispose pas de statistiques permettant de répondre de façon pertinente à cette question.
On a l’impression que cela n’arrive que dans les films, mais, malheureusement, c’est la réalité
En tout cas, un garagiste bruxellois se dit peu étonné par cette histoire. « Malheureusement, c’est courant ce genre d’arnaque. Même si je n’ai pas vécu moi-même ce genre de problème, j’en ai déjà entendu parler. Des acheteurs viennent à plusieurs et essaient de faire tourner la tête du vendeur, en disant par exemple qu’il y a une perte d’huile et un souci de joint de culasse », assure Umut Kurtulus, qui travaille dans un garage à Schaerbeek. « On a l’impression que cela n’arrive que dans les films, mais, malheureusement, c’est la réalité », déplore-t-il.
D’après lui, mettre de l’huile dans le vase d’expansion n’est pas dramatique en soi et ne nécessite pas des réparations conséquentes. « Chaque liquide est séparé dans un circuit particulier dans la voiture. Il y a le liquide de refroidissement, l’huile pour le moteur, l’huile de frein, etc. Dans le vase d’expansion, c’est la pièce pour le liquide de refroidissement. Et il ne faut pas mélanger tous ces liquides », explique le garagiste. « Ce n’est évidemment pas très bon pour le moteur, comme quand vous vous trompez de carburant. Il faut vidanger et nettoyer tout le circuit », ajoute Umut Kurtulus.
En tant que garagiste, il conseille d’effectuer un test avec l’acheteur avant de réaliser une transaction éventuelle. « Mieux vaut l’accompagner dans le véhicule. Sinon, c’est comme si vous laissiez votre moteur allumé avec les clés pour aller dans un magasin. C’est tenter le diable. Il ne faut jamais laisser un inconnu prendre possession de votre voiture, c’est trop risqué », souligne-t-il.
Selon le parquet de Liège, les faits décrits par Julien et Alison peuvent éventuellement recevoir la qualification d’ « escroquerie ». La peine prévue pour cette infraction va d’un mois à cinq ans d’emprisonnement ainsi qu’une amende jusqu’à 3.000 euros.
