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Il y a Flor Bressers, 39 ans. Il est surnommé “l’universitaire”. Il a un master en criminologie. On l’appelle aussi le coupeur de doigts, bien qu’il ait été acquitté pour cette prévention. Et on pourrait tout aussi bien le surnommer le géant, parce que lorsqu’il rentre dans la salle d’audience ce matin, l’homme impressionne vraiment. Du haut de ses deux mètres environ, il surpasse tout le monde d’une tête. Il est vêtu d’un costume gris parfaitement coupé, d’une chemise blanche qui a l’air de sortir du pressing. Il a les cheveux gominés, une petite barbe bien taillée, le sourire aux lèvres. L‘homme a l’air de sortir d’une série TV. Il est entouré de trois policiers masqués et très lourdement armés, parce que ce que l’on craint ici, à ce procès, ce sont des tentatives d’évasion. Originaire du Limbourg, il n’a été arrêté qu’en février 2022 en Suisse et se trouve depuis en détention provisoire.
Même sécurité pour son voisin, il s’appelle Sergio Roberto de Carvalho. Il est brésilien, il a les cheveux blancs. Lui ressemble plutôt à un papy mais il est considéré comme le Pablo Escobar brésilien. Âgé de 65 ans, ce baron de la drogue a été arrêté en juin 2022 en Hongrie et extradé vers la Belgique un an plus tard.
À eux deux, ces hommes sont soupçonnés d’avoir importé 15 tonnes de cocaïne en Europe, pour une valeur de 220 millions d’euros. Et c’est sans doute une petite partie seulement de leur trafic.
Il s’agit d’un procès du tribunal correctionnel de Bruges délocalisé sur le site du Justicia à Haren pour raisons de sécurité. Au total, 32 suspects seront jugés.
Les demandes de certains avocats directement rejetées
Au début de l’audience, les avocats de plusieurs suspects ont demandé que les dossiers de leurs clients soient disjoints de la procédure et que des devoirs d’enquête complémentaires puissent être menés.
Maître Mathias De Daele, l’avocat de Stefan Papic, l’un des principaux suspects, a demandé que le cas de son client soit examiné dans le cadre d’un autre procès car l’homme est toujours en détention à Dubaï. «Je n’ai aucun mandat pour plaider en son absence. Poursuivre ce procès sans mon client serait une atteinte aux droits de la défense.» Le parquet fédéral s’est opposé à cette demande, soulignant que Stefan Papic aurait pu être en Belgique depuis longtemps s’il ne s’était pas opposé à son extradition.
L’avocat d’un autre suspect Cem Polat, maître Christian Clement, a fait une demande similaire. Il estime que le cas de son client, lui-même avocat aux Pays-Bas, doit faire l’objet de procédures disjointes. «La défense a l’air de penser que le prévenu a droit à un procès séparé simplement parce qu’il est avocat, mais tout le monde est responsable aux yeux de la loi», a déclaré la magistrate fédérale Marianne Capelle. «Cet homme a pris des décisions dans le cadre de l’organisation criminelle, j’insiste pour qu’il n’y ait qu’un seul procès, afin de montrer clairement comment fonctionne une telle organisation criminelle.»
Trafic de drogue via une société de traitement des eaux à Anvers
L’enquête a débuté fin 2019 lorsque les enquêteurs de la police fédérale ont découvert que la société de traitement des eaux Kriva Rochem, basée à Anvers, jouait un rôle dans l’importation de cocaïne en provenance du Brésil. Finalement, le directeur de Kriva Rochem, âgé de 80 ans, et des membres de sa famille, originaires de Knokke-Heist, ont été arrêtés le 17 juin 2020.
Cette découverte n’était en réalité que la partie émergée de l’iceberg. Les conversations mises au jour sur les téléphones cryptés de certains membres du réseau ont fourni de nombreuses informations. L’enquête a ainsi révélé qu’il y avait probablement déjà eu plusieurs transports de cocaïne réussis auparavant. Fin novembre 2020, Europol a annoncé qu’au moins 45 tonnes de cocaïne auraient été introduites clandestinement via les ports européens en six mois.
Ce procès devrait durer plusieurs semaines.


















