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120.000 Belges consomment de la cocaïne : comment reconnaître les signes de l’addiction et aider un proche ?

Par Belga
La consommation de cocaïne atteint un record en Belgique, notamment chez les 25-34 ans. Perçue à tort comme un « remède miracle », cette drogue expose à de lourds risques physiques et psychiques. Les spécialistes appellent à une vigilance accrue.

Le nombre d’usagers de cocaïne en Belgique n’a jamais été aussi élevé qu’aujourd’hui. D’après une enquête menée par l’agence de santé Sciensano et le bureau de statistiques Statbel auprès des personnes âgées de 15 à 64 ans, environ 120 000 Belges ont consommé de la cocaïne au cours de l’année écoulée.

C’est ce que rapporte Het Laatste Nieuws, qui a recueilli plusieurs témoignages pour une nouvelle série d’articles. Cela représente 10 000 personnes de plus que lors de la précédente étude, réalisée en 2018-2019. Dans la tranche d’âge de 15 à 64 ans, 1,6 % de la population déclare avoir consommé de la cocaïne.

Selon le journal, cette consommation se retrouve dans toutes les couches de la société. Le groupe le plus important de consommateurs est celui des 25 à 34 ans. La différence entre les hommes et les femmes est marquée : 2,7 % des hommes et 0,6 % des femmes déclarent avoir consommé de la cocaïne au cours de l’année passée. « Le pourcentage d’usagers est chez nous plus élevé que la moyenne européenne », explique Lies Gremeaux, de Sciensano. « Le nombre d’usagers n’a jamais été aussi haut, mais il y a aussi davantage de Belges qu’au moment de la précédente enquête. En proportion, nous observons plutôt une stabilisation, mais certainement pas une baisse. »

Un « remède miracle » dont les risques sont lourdement sous-estimés

L’usage de la cocaïne continue de poser un défi majeur de santé publique. Pour démêler le mythe de la réalité, nos confrères de Het Laatste Nieuws ont interrogé trois spécialistes. Le constat est unanime : bien que perçue comme un « remède miracle » face à l’agitation de la vie moderne, les risques de cette drogue sont souvent dramatiquement sous-estimés.

Le psychiatre Geert Dom décrit l’effet initial puissant : « ‘Je peux gérer le monde.’ C’est ainsi que de nombreux utilisateurs décrivent le sentiment lorsqu’ils consomment de la cocaïne pour la première fois. » Ils se sentent immédiatement excités et énergiques.

Pourtant, les conséquences sont graves. Geert Dom, interrogé par HLN, alerte sur le fait que même sans être dépendant, la consommation peut être fatale. La cocaïne pousse le cœur « au-delà de ses limites » (over the top), et une intoxication peut provoquer un arrêt cérébral ou un délire complet. Sur le plan psychique, l’utilisateur peut souffrir de crises d’angoisse et devenir paranoïaque. À long terme, l’abus provoque une tension artérielle élevée, augmentant le risque de problèmes cardiaques et d’AVC, sans oublier la destruction des muqueuses et de la cloison nasale qui nécessite souvent des opérations.

Dépendance : l’appel du cerveau et les critères d’alerte

Le passage à l’addiction commence par une dépendance mentale, selon le Professeur Jan Tytgat (KU Leuven) : elle survient dès que le cerveau envoie le signal qu’il veut « ressentir à nouveau cette ‘gâterie’ ». La dépendance physique suit généralement après quelques semaines de consommation régulière, en raison des concentrations élevées du produit dans les organes vitaux.

Contrainte de consommer

Pour identifier un problème d’addiction, le Professeur Geert Dom se réfère aux critères du DSM (système de classification international). Une « perturbation » est avérée si l’on répond « oui » à quelques questions clés : est-ce que l’utilisateur consomme plus souvent ou en plus grandes quantités que prévu ? Y a-t-il des manquements au travail ou dans la vie privée ? Y a-t-il des dommages relationnels ? Ou encore, l’utilisateur ressent-il une « contrainte » de consommer ?

Le risque d’addiction est réel, mais Geert Dom précise à HLN que la génétique n’explique pas tout. La dépendance est liée aux facteurs de risque individuels et au mode de consommation, bien que les personnes ayant des vulnérabilités psychiatriques (TDAH ou psychose) soient plus à risque.

Soutenir un proche

Tom Evenepoel de De Druglijn souligne qu’il est difficile de déceler l’usage, car les consommateurs tentent souvent de le cacher. Pour les proches, il faut guetter les signes d’une drogue stimulante : être souvent nerveux, agité ou transpirer davantage.

Lorsqu’il s’agit d’aborder la personne, la formulation est cruciale. Tom Evenepoel recommande d’approcher la discussion avec l’« approche du ‘Je’ » : « Posez vos questions à la première personne. J’ai le sentiment que… Je me fais du souci… Les gens seront beaucoup moins sur la défensive et cela augmente la chance qu’ils veuillent en parler. »

Il conseille également de persévérer et de ne pas s’attendre à un aveu immédiat.

Le Professeur Geert Dom insiste quant à lui sur l’importance de la contrainte : « Osez obliger un partenaire ou un membre de la famille à chercher de l’aide. » Il rappelle à nos confrères d’HLN qu’une moitié des personnes qu’il traite est en thérapie sous une forme de contrainte (partenaires, employeurs ou police), mais cela n’affecte pas l’issue du traitement.

Finalement, si une guérison n’est pas garantie pour tous car « tout dépend de la motivation ». Un tiers des personnes qui cherchent de l’aide parvient à retrouver une vie stable.

Pour toute information sur les drogues et leurs usages, rendez-vous sur www.infor-drogues.be. Du lundi au vendredi de 8h à 22h (excepté le jeudi de 9h30 à 13h) et le samedi de 10h à 14h, Infor-Drogues est à votre écoute au 02 227 52 52.

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