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En France, moins de 100 jours après sa nomination, le gouvernement de François Bayrou est dans la tempête. Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau menace de démissionner. Sa requête : que le gouvernement le suive sur ses projets de lutte contre le narcotrafic et les relations entre la France et l'Algérie. Une manière de forcer la main du Premier ministre… qui n'a pas vraiment apprécié.
Bruno Retailleau, 64 ans, est la figure montante de la droite française. Il est d'ailleurs candidat à la présidence de son parti, Les Républicains, contre Laurent Wauquiez qui, jusqu'à présent, tenait la corde. Ministre de l'Intérieur, il veut apparaître comme celui qui rétablira l'ordre en France. Il a plusieurs chevaux de bataille:
- La lutte contre l'immigration
- Le combat contre les narcotrafiquants
- La relation tendue entre la France et l'Algérie
La clé du problème, c'est ce qu'on appelle en France les OQTF (obligations de quitter le territoire français). Or, l'Algérie, dans de nombreux cas, refuse de reprendre ses ressortissants. Bruno Retailleau a plusieurs exemples dans sa besace et notamment le récent drame de Mulhouse.
Le 22 février, un islamiste a attaqué les passants au couteau en criant "Allah Akbar". Bilan: un mort et sept blessés graves. L'agresseur, un Algérien condamné pour plusieurs délits, était visé, justement, par une obligation de quitter le territoire français. L'Algérie a refusé de l'accueillir à dix reprises. Conclusion facile à faire, s'il était reparti, il n'aurait pas commis l'attentat. "Je ne veux pas de deuxième Mulhouse", a déclaré le ministre de l'Intérieur.
Il exige donc que l'Algérie reprenne désormais ses ressortissants expulsés. Soixante dossiers sont en cours.
Et dans une interview donnée ce week-end, il a donc mis sa démission dans la balance si sa stratégie n'était pas soutenue au plus haut niveau de l'État. Fort de l'accord de huit Français sur dix, il se sent très fort. François Bayrou a répondu lui-même ce dimanche sur France Inter. Le Premier ministre a balayé toute différence sur le fond avec son ministre. Mais il a apporté un peu de nuance: "La fermeté ne parle pas nécessairement fort", a-t-il dit avant d'appeler à une potentielle remise en cause complète des accords liant la France et l'Algérie, si les autorités algériennes se refusaient encore à coopérer.
Car cette crise politique est aussi une crise diplomatique. Au-delà de tous les contentieux qui subsistent depuis l'indépendance en 1962, l'Algérie n'a pas accepté que dans le dossier sur le Sahara occidental, la France ait récemment tranché en faveur du Maroc.
Et donc l'affaire des OQTF est une forme de représailles, tout comme l'arrestation de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, par ailleurs ami personnel de Bruno Retailleau.
Reste que forcer la main au Premier ministre et surtout au président de la République en menaçant de démissionner, ça ne se fait pas. Et ça se termine généralement… par une démission. Dans sa jeunesse, pendant 25 ans, Bruno Retailleau a été le metteur en scène des spectacles du Puy du Fou. Et là, il s'est peut-être trompé de scénario.


















