Accueil Actu Monde International

"J’ai souvent souhaité qu’ils me traitent aussi bien que leurs chiens": 80 ans après la libération d’Auschwitz, les survivants témoignent

À l'approche des 80 ans de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, les rares survivants de l’holocauste poursuivent leur devoir de mémoire. Leurs récits bouleversants rappellent l'horreur des camps nazis et l'importance de transmettre cette histoire aux générations futures.

Ted Bolgar, rescapé d'Auschwitz, évoque avec une précision glaçante le processus de sélection à l'arrivée dans le camp : "Quand vous arriviez, ils vous regardaient et vous faisaient signe d'aller à droite ou à gauche. S'ils pensaient que vous pouviez travailler, vous étiez envoyé d'un côté. Les enfants et les personnes âgées allaient de l'autre. On leur disait : "vous avez besoin d'une douche". Mais au lieu de l'eau, c'est du gaz qui sortait des douches. Ma sœur et ma mère en faisaient partie".

Pour d'autres, comme Lea Zajac De Novera, la séparation avec les proches a été un moment décisif : "Des enfants et des mères criaient, se cherchaient... Moi, j'ai réussi à éviter cela. J'ai couru derrière ma tante et je me suis mise à côté d'elle".

"Auschwitz, ce sont les mères portant leur enfant à la mort"

Judith Elkan-Hervé, elle aussi rescapée d'Auschwitz, se souvient avec douleur des scènes insoutenables qui hantaient le quotidien des prisonniers. "Celles qui n'ont pas donné leur enfant à leur mère, à leur sœur ou à leur copine, elles les portaient dans les bras jusqu’à la chambre à gaz", raconte-t-elle. Avant d'ajouter : "Alors pour moi, Auschwitz, c'est ça : ce sont les mères qui portent leur enfant à la mort". 

Pedro Buchwald, déporté enfant, souligne la souffrance physique endurée par les plus jeunes : "Le pire pour moi, qui pensais comme un enfant de 4 ou 5 ans, c'était d'avoir faim". 

Un constat partagé par Dolly Hirsch Bramson, qui se rappelle les corps décharnés de ses compagnons d'infortune. "Je me souviens des visages des personnes et de leur corps squelettique. Ils étaient très maigres parce qu'ils n'étaient pas nourris", dit-elle.

Ils nous ont dit : "vous ne valez pas mieux que des chiens"

Ted décrit également la violence des privations : "La première nourriture que nous avons reçue, c'était un bol de soupe. Un bol pour 4 personnes. Pas de cuillère. Ils nous ont dit : "vous ne valez pas mieux que des chiens. Mangez". Nous l'avons fait".  Apès un bref silence, l'homme ajoute : "J’ai souvent souhaité qu'ils me traitent aussi bien qu'ils traitaient leurs chiens. Mais ce n'était pas le cas".

"Je raconte pour qu'on se souvienne"

Pour Ginette Kolinka, les mots sont souvent insuffisants pour décrire l'indescriptible: "On ne peut pas trouver les mots exacts pour décrire ce que l'on a subi dans les camps". Malgré cela, elle poursuit inlassablement son témoignage dans l'espoir que les jeunes générations deviennent, à leur tour, des passeurs de mémoire.

Evelyn Askolovitch, elle aussi rescapée, résume avec simplicité la raison pour laquelle ces récits doivent perdurer. "Je n'ai rien fait. Je n'ai tué personne. Je n'étais pas en guerre. Mes parents non plus. On a voulu me tuer juste parce que je suis juive. C’est pour ça que je le raconte", confie-t-elle.

Alors que les témoins de la Shoah se font de plus en plus rares, leurs récits restent essentiels pour lutter contre l'oubli et la banalisation de l'horreur. Ces survivants, qui n’étaient que des enfants au moment de leur déportation, continuent de transmettre leurs histoires, porteurs d’une vérité insupportable mais nécessaire à entendre.

À la une

Les plus lus