Partager:
Cléa, qui se décrit comme végétarienne « pour des raisons éthiques », prend un soin particulier à surveiller son alimentation. Elle refuse de consommer de la viande ou du poisson et vérifie toujours l’absence de sous-produits animaux dans ses plats.
C’est lors d’une visite dans la chaîne de restauration rapide Exki qu’elle a découvert le pot aux roses dans un sandwich vendu comme végétarien : la présence de présure animale, un ingrédient provenant du quatrième estomac de certains ruminants, comme les veaux. Elle nous a alertés via le bouton orange Alertez-nous : « La présure animale nécessite la mort des animaux, tandis que la présure microbienne est belle et bien végétarienne ».
Je trouve personnellement que c’est mensonger
Vérifications faites, le sandwich « Luca » vendu par la chaîne Exki contient effectivement de la mozzarella, fabriquée à l’aide de présure animale, une substance qui permet de faire cailler le lait, pour séparer le caillé, qui deviendra le fromage, du lactosérum, aussi appelé le petit-lait.

Pour Cléa, le cœur du problème réside dans l’honnêteté de l’étiquetage : « Est-ce que les magasins peuvent vanter un produit comme végétarien s’il contient un aliment obtenu par la mort d’un animal ? Je trouve personnellement que c’est mensonger. »
L’enseigne Exki reconnaît une « aberration »
Contactée, l’enseigne de restauration rapide Exki reconnaît l’existence de cette « aberration » dans ses étiquettes, notamment sur le sandwich « Luca ». Boris Berkelmans, responsable qualité, confirme que la présence de présure animale peut poser « un souci » pour les végétariens.
Selon lui, la problématique vient du fait que l’interprétation du régime alimentaire a évolué : « Au début, être végétarien consistait à éviter de manger de la chair animale et la présure animale est récoltée sur des animaux qui sont déjà tués. Aujourd’hui, elle est interdite dans le végétarisme parce que c’est plutôt devenu un état d’esprit sur le bien-être animal et le fait de ne pas tuer des êtres animaux », rapport le responsable qualité d’Exki.
Le terme « végétarien » bien réglementé
Toutefois, nous avons contacté le SPF Économie qui n’est pas tout à fait du même avis. Étienne Mignolet, porte-parole, confirme que « l’utilisation des termes ‘Vegan’ et ‘Végétarien’ est réglementée au niveau international par une norme ISO (23662) ». Cette norme a été adoptée comme norme belge en 2024.
Cette règle stipule que les denrées alimentaires et ingrédients alimentaires adaptés à l’alimentation ovolacto-végétarienne, « ne peuvent être issus d’origine animale », excepté les suivants et/ou leurs composants ou dérivés :
- lait, produits laitiers ou colostrum ;
- œufs ou produits à base d’œuf obtenus à partir d’animaux vivants ;
- miel ou produits de la ruche (par exemple cire d’abeille, propolis) ;
- produits dérivés de la laine d’animaux vivants (par exemple lanoline).
La présure animale, à mentionner ou pas ?
Le terme végétarien n’aurait donc rien à faire sur l’étiquetage des produits utilisant de la présure animale dans son processus de fabrication. Toutefois, mentionner cette substance dans la liste des ingrédients n’est pas obligatoire. Boris Berkelmans affirme comprendre la position éthique de ses clients, mais souligne que l’entreprise notifie ses clients de la présence de présure animale par souci de transparence. Sur ce point, Exki semble avoir gain de cause.
La raison de l’absence de mention légale tient au statut de la présure : elle est considérée comme une enzyme alimentaire qui fonctionne comme un auxiliaire technologique (AT). Un AT est un agent utilisé pour remplir une fonction technique (ici, faire cailler le lait) mais qui n’a plus d’effet dans le produit fini.
Ce statut particulier est stipulé par la FEVIA (Fédération de l’Industrie Alimentaire Belge) dans un document de référence repris par l’AFSCA : « Pour les auxiliaires technologiques il n’y a pas d’obligation d’étiquetage (à l’exception de l’information sur les allergènes). ». La présure animale n’étant pas un allergène, a contrario du lait, par exemple, pour les personnes intolérantes au lactose, l’entreprise n’a pas d’obligation légale de mentionner la présence de présure animale.
Refaire l’étiquetage
Suite aux retours clients, « deux ou trois au début de l’année », selon Boris Berkelman, la décision a été prise de retirer la mention « végétarien » sur les produits concernés d’Exki. La mise en place de ce changement a été actée le 6 octobre. L’impression des nouvelles étiquettes a déjà été commandée, elles devraient être d’application d’ici fin octobre pour les magasins belges. Le processus est plus long à l’international, l’enseigne comptant une centaine de restaurants à l’étranger.
L’enseigne ne compte pas s’arrêter là et vise une solution définitive. « On est en train de faire des recherches de présure microbienne pour donner un choix à tous nos clients », confie le responsable qualité. Après un inventaire pour identifier les fromages contenant de la présure animale, l’objectif est clair : « Courant mars-avril, on pourrait passer sur de la présure microbienne sur tous nos fromages », conclut-il.



















