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Frappée par un homme dans sa salle de fitness il y a deux ans, Maud ne s'attendait pas à l'y recroiser récemment, persuadée qu'il avait été banni comme le veut le règlement. Basic-Fit assure avoir suivi sa procédure stricte, mais l’agresseur n’a finalement reçu qu’un avertissement car les images de vidéosurveillance n’avaient pas permis de trancher clairement sur les torts de chacun.
"Il y a deux ans, je me suis fait agresser par un homme chez Basic-Fit à La Louvière", nous écrit Maud, une étudiante en tourisme de 25 ans. Agrippée par la gorge, projetée contre un mur et frappée devant plusieurs témoins, "j'ai directement été porter plainte et à l'époque, après l'avoir recroisé une première fois, la manager m'avait assuré que le nécessaire serait fait."
Le temps passe et Maud ne le voit plus, pensant qu'il avait été banni de la salle. Mais "il y a quelques semaines, j'ai à nouveau recroisé mon agresseur. J'ai commencé à faire une crise de panique. Il n'a pas à être là vu ce qui s'est passé. Il est stipulé noir sur blanc dans le règlement de Basic-Fit qu'aucune violence physique ou verbale n'est tolérée au sein du club. J'ai des amis qui ont été bannis pour avoir utilisé de la magnésie alors que c'est interdit. Or moi, j'ai clairement été victime de violence physique."
Un petit bouton à presser en cas d'alerte
Dans l'incompréhension, elle prend contact avec le service clientèle de la chaîne de salles de fitness. C'est leur réponse qui l'a décidée à presser notre bouton orange Alertez-nous. "Je viens de recevoir une réponse finale de Basic-Fit qui me dit qu'en deux ans, la personne s'est tenue à carreau et que nos horaires ne coïncident que très rarement et que j'allais être amenée exceptionnellement à le rencontrer. Et que dans ce cas, je peux toujours porter un collier qui possède un petit bouton à presser en cas d'alerte. Je trouve ça un peu inadmissible de devoir m'entraîner avec un collier autour du cou. Je ne suis pas un chien."
Des boutons d'urgence disponibles pour tout besoin d'aide
Concernant ce collier, Basic-Fit tient tout d'abord à expliquer qu'il ne s'agit pas d'un dispositif qui se substituerait à une éventuelle exclusion d'une personne violente. Il s'agit de boutons d'urgence disponibles dans toutes les salles qui "peuvent être utilisés lorsqu'un membre ne se sent pas bien, qu'il soit physiquement malade, dépassé ou simplement en besoin d'aide. Cela peut aller d'une sensation de vertige à un sentiment d'insécurité. Appuyer sur le bouton alerte notre équipe, ce qui nous permet d'intervenir rapidement et de lui apporter le soutien nécessaire", explique Antonella Miozzi - van der Heijden, la porte-parole internationale de la chaine de centres de fitness.
Normalement, une agression physique vaut une exclusion
"La sécurité et l'intégrité de nos membres sont notre priorité absolue. Nos clubs prennent de nombreuses mesures pour protéger nos membres et des protocoles de sécurité stricts sont en place dans tous les centres Basic-Fit en Belgique", ajoute-t-elle, rappelant la sévérité de leurs règles. "Notre politique concernant les agressions physiques est claire : une exclusion est généralement prononcée immédiatement. En cas d'inconduite verbale, un avertissement formel est d'abord donné. Un deuxième incident entraîne souvent une interdiction."
Chaque fait de violence physique ou verbale est pris "très au sérieux", assure la porte-parole. "Chaque cas est soigneusement évalué individuellement et nous faisons appel à la police si nécessaire."
Des images de vidéosurveillance qui bénéficient à l'agresseur
Mais alors, pourquoi l'agresseur de Maud n'a pas été banni comme le veut le règlement ? "Dans ce cas précis, la personne a reçu un avertissement", dévoile Antonella Miozzi - van der Heijden. Car "les images vidéo disponibles à l'époque n'ont pas permis de déterminer clairement qui avait déclenché l'agression. Dans de telles situations, nous devons veiller à ne pas prendre de mesures irréversibles sans justification claire".
Pour comprendre comment l'agression a pu paraître moins claire sur les images de vidéosurveillance, il faut revenir aux détails de l'histoire. Maud se souvient.
Il a pris un petit coup dans son ego
"Deux ou trois jours avant mon agression, un homme est sorti des vestiaires quand j'étais en train de discuter avec une connaissance en commun. Il s'approche de moi en claquettes et me demande si je ne peux pas lui passer mon snap", soit son nom sur l'application de messagerie Snapchat, populaire auprès des 13-35 ans. "Je lui dis que non, que je ne suis pas intéressée, et je pense qu'il a pris un petit coup dans son ego. Car deux ou trois jours plus tard, il avait demandé mon prénom à la connaissance en commun. Et pendant ma séance, il criait mon prénom dans la salle et faisait des cris de loup."
Elle répond à son harcèlement verbal
Maud n'est pas seule ce jour-là. Les autres adhérents ont l'air exaspérés par son comportement, mais l'employé présent ne lui fait aucune remarque. "Je prenais vraiment sur moi mais à un moment où je repassais près de lui pour me diriger vers les casiers, il a recommencé à crier mon nom. Je me suis retournée vers lui et je lui ai dit, suffisamment haut et fort pour essayer de le mettre mal à l'aise : C'est bon, on a compris que t'étais là. Arrête ton cinéma maintenant. Ferme ta gueule."
Énervée, elle reprend cependant sa séance. Mais il profite du fait que leur connaissance en commun n'est pas loin d'elle pour s'approcher de lui et lui dire suffisamment fort pour qu'elle l'entende : "Et quoi ? On ne crie plus, on ne crie plus ?" Elle lui répond alors : "T'as pas compris en fait. J'ai dit stop, c'est bon."
Je me suis dit que jamais il n'allait oser me lever la main dessus
C'est là que tout a dérapé. "Il s'est avancé vers moi et il m'a dit : Toi, je te dis, tu vas me parler autrement parce que sinon je t'en mets une. Et moi, comme on était à une heure où le club était assez fréquenté et qu'il y avait un employé, je me suis dit que jamais il n'allait oser me lever la main dessus. Donc je me suis rapprochée de lui et je lui ai dit : Ben vas-y, frappe-moi. Et là il m'a prise par la gorge et dans l'élan ma tête a claqué contre le mur qui était juste derrière."
Maud se débat et tente de se défendre. "J'ai essayé tant bien que mal de lui asséner un coup mais il m'a arraché les cheveux et redonné un coup de pied dans le ventre." Tout se passe tellement vite qu'elle ne se souvient même pas avoir été agrippée par le bras, comme le montrent ses hématomes.
Des faits qui établissent la position d'agresseur de l'homme et celle de victime de la jeune femme … mais qui deviennent moins évidents sur la vidéosurveillance, sans le contexte. En effet, on voit Maud s'avancer pour confronter celui qui ne l'avait pas encore agressée physiquement.
Elle appelle la police mais il a déjà fui
Maud pense savoir pourquoi les fait n'ont visiblement pas été fidèlement rapportés à la hiérarchie de Basic-Fit.
Juste après l'agression, personne n'a bougé autour d'eux. Elle reçoit bien le soutien d'une adhérente qui lui dit qu'elle se porte témoin de la scène mais Maud, "sous le choc", déclenche une crise d'angoisse. Pendant ce temps, l'employé présent s'entretient avec l'agresseur. Reprenant ses esprits, elle contacte sa mère qui lui dit d'appeler la police. Ce qu'elle fait, mais "les policiers ont refusé de se déplacer étant donné que mon agresseur n'était plus présent". Elle soupçonne l'employé d'avoir averti celui-ci de quitter les lieux car "apparemment, c'est quelqu'un de connu dans la salle. Comme par hasard, après mon agression, personne ne connaissait son prénom".
L'enquête de police mène à une mise en garde de la justice
Après l'agression, Maud se rend à l'hôpital et fait constater ses blessures par un médecin. Elle porte plainte 4 jours plus tard auprès d'un commissariat de la zone de Mariemont. Ils reçoivent bien les images de vidéosurveillance, enquêtent et quelques mois plus tard, "la police me dit que de leur côté, le sujet est clôturé et qu'il a été envoyé au parquet".
Maud n'a jamais été mise au courant des suites de l'affaire, mais le dossier a bel et bien "fait l'objet d'une réponse pénale via une sévère mise en garde adressée au suspect", nous dévoile le parquet de Mons. Il a donc été vu par un magistrat qui lui a adressé un avertissement formel, une démarche plutôt préventive dans l'arsenal à disposition de la justice. L'idée est ici de le dissuader de recommencer, ce qui n'a pas été le cas puisque "ce dernier ne s'est plus donné à connaître depuis les faits", ajoute le parquet.
J'ai résilié mon abonnement
Chez Basic-Fit comme du côté de la justice, ce sont donc deux demi-mesures qui ont été prises contre l'agresseur de Maud. Des avertissements pour le dissuader de relever la main sur autrui, car là des sanctions s'ensuivront.
Pas suffisant pour rassurer la jeune femme, pour qui il est toujours inimaginable de retourner dans cette salle au risque de le recroiser. "Nous regrettons profondément la situation et comprenons pleinement le sentiment de notre membre", assure la chaine de salles de fitness.
Maud, elle, a fini par prendre une décision radicale : "J'ai changé de salle et j'ai résilié mon abonnement à Basic-Fit." Elle ne comprend toujours pas pourquoi malgré le doute, ils ont préféré prendre le risque de conserver un homme violent comme client.


















