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« Pièges avec des rats morts, essaims de mouches » : Verviers envahie quotidiennement par des amas de déchets, Nancy dénonce un « scandale sanitaire »

Par Lucas Fu
Depuis des années, les Verviétois vivent un calvaire quotidien : des déchets et des encombrants sont déposés quotidiennement dans les rues, attirant rats, souris et mouches. Nancy dénonce une situation qui dure depuis 20 ans.

Nancy a appuyé sur le bouton orange Alertez-nous pour dénoncer une situation cauchemardesque. Des déchets en tout genre et des encombrants sont déposés quotidiennement sous sa fenêtre : « On a la même chose chaque semaine, les gens viennent déposer de la nourriture, des matériaux de construction, de la peinture, de la mort au rat, de l’huile de friture, des pièges avec des rats morts… », énumère la Verviétoise. « On habite au premier étage, c’est vraiment en dessous de notre fenêtre. »

Avec les températures qui montent, les nuisances se font ressentir davantage. « Avec le beau temps, on commence à avoir des problèmes de rats et de souris qui envahissent le quartier. Les enfants jouent ici, c’est un vrai scandale sanitaire », déplore Nancy.

Les immondices sont régulièrement évacuées par les ouvriers communaux : « La ville est très réactive », assure Nancy. « Ils viennent avec des camions tous les jours. De temps en temps, il y a même un monsieur qui vient voir dans les poubelles pour voir qui jette ». Ces constatations mènent à des procès-verbaux, mais Nancy estime que ça ne sert à rien : « La plupart des gens sont insolvables ».

C’est à se demander d’où viennent tous ces déchets

Verviétoise depuis seulement quelques mois, Nancy habite dans la maison de son frère, achetée il y a deux ans. « C’est une maison sur plusieurs étages, et on essaye de rénover étage par étage », explique l’animatrice pour enfants de formation, indiquant qu’elle souhaiterait créer au rez-de-chaussée une ASBL d’activités créatives, « pour les gens du quartier ».

Si le croisement de rues sur lequel habite Nancy est un « point chaud », constamment alimenté en déchets en tout genre, selon elle, ce n’est pas un cas isolé : « C’est dans tout le quartier, c’est à se demander d’où viennent tous ces déchets », interroge-t-elle.

Jean-François Chefneux, l’échevin de la Propreté de Verviers, confirme l’ampleur du problème, tout en insistant sur le fait que ce n’est pas une spécificité locale. L’incivisme généralisé est, selon lui, un fléau qui touche bien au-delà des frontières de Verviers : « C’est un problème qu’on a partout, avec de l’incivisme et des dépôts sauvages qui apparaissent partout, y compris dans plusieurs pays européens », affirme l’échevin, ajoutant qu’il constate lui-même « les mêmes problèmes à Liège, à Bruxelles, à Herstal ou à Seraing, où ils ont le double des déchets ».

Une honte

Cependant, il reconnaît qu’il s’agit d’un problème bien réel à Verviers, avec des « points noirs » persistants, notamment la rue des Hautes Mézelles. Des lieux qui se transforment régulièrement en de véritables « microdécharges ». Pour l’échevin, cette situation est « intolérable » et une « honte », qu’il attribue non pas à la ville, mais aux comportements de certains habitants. « Jeter ses crasses au milieu de la voirie, c’est un degré de civisme égal à 0 », s’indigne-t-il, citant l’exemple d’une personne qui a été verbalisée pour avoir jeté ses déchets depuis son appartement du deuxième étage.

Le véritable nœud du problème, selon Jean-François Chefneux, réside dans l’impunité de facto dont bénéficie une partie de la population due à son insolvabilité. L’échevin critique les limites actuelles du système de sanction, notamment en raison de seuils de saisie sur salaire qui sont trop élevés pour atteindre les plus bas revenus. « Si on veut régler le problème, il va falloir qu’on se bouge au niveau parlementaire pour des solutions », insiste-t-il, suggérant de s’inspirer du régime des pensions alimentaires où la saisie est plus aisée.

Évacuation des déchets

Un autre défi majeur soulevé par l’échevin concerne l’accès aux dispositifs de gestion des déchets pour les populations non domiciliées légalement ou celles vivant en situation de suroccupation dans des logements. Ces personnes se retrouvent souvent dans l’impossibilité d’évacuer légalement leurs détritus. Le système Intradel, basé sur des conteneurs à puce et un principe de « pollueur-payeur » avec des quotas par ménage (par exemple, 55 kg de déchets résiduels par personne et par an), fonctionne pour les ménages officiellement enregistrés.

Cependant, comme l’explique Jean-François Chefneux, « si une personne est de facto sur le territoire verviétois, elle doit avoir un moyen d’évacuer ses crasses. Or aujourd’hui, les dispositifs proposés par les intercommunales ne le permettent pas. » Cette situation contraint de nombreuses personnes à jeter leurs déchets sauvagement, soit par méconnaissance du système, soit par manque d’accès aux services légaux ou incapacité à payer les dépassements de quota.

Plus de 1000 P.V. rédigés concernant les déchets

Face à ce fléau, la ville de Verviers a déployé, depuis deux ans et demi, un plan propreté. Ce plan combine sensibilisation des citoyens et approche répressive. « La sensibilisation, c’est essentiel », estime l’échevin qui souligne néanmoins qu’elle doit impérativement s’accompagner d’une « main ferme ». La ville ne ménage d’ailleurs pas ses efforts pour faire appliquer les règles : plus de 1 000 procès-verbaux sont dressés chaque année rien que sur la thématique des déchets.

Pour renforcer la surveillance des zones les plus touchées, un réseau d’une vingtaine de caméras est déjà opérationnel, et un déploiement supplémentaire d’une quarantaine d’autres est prévu. Cependant, Jean-François Chefneux reste lucide quant aux limites de ces outils : « les caméras ne règlent pas tout », surtout lorsque les contrevenants sont difficiles à identifier.

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