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"Quand je l’ai vu immobile au sol, j’ai eu très peur": le mari de Patricia, âgé de 75 ans, chute à cause d’un pavé déchaussé, qui est responsable?

Patricia a poussé le bouton orange Alertez-nous après une mésaventure qui est arrivée à son mari à Ixelles, et qui aurait pu être bien plus grave. Alors qu'ils se baladent tous deux rue Américaine, Alphonse, 75 ans, chute brutalement au sol à cause d'un pavé déchaussé. S'il s'en sort pas trop mal, une question lui reste tout de même en tête: qui est responsable? Peut-il demander des indemnités? Explications. 

"Mon mari a chuté sur un trottoir du fait d’un pavé déchaussé. Les secours ont été appelés. Qui est responsable du mauvais état d’un trottoir? Que faut-il faire en cas de chute si les conséquences sont importantes?", s’interroge Patricia via le bouton orange Alertez-nous. 

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C’est dans la commune d’Ixelles, rue Américaine, que le drame s’est produit. Patricia était en balade avec son mari Alphonse, 75 ans, lorsque celui-ci tombe brutalement, nous explique-t-elle. "Je marchais un peu devant lui et d’un coup j’ai senti quelque chose. Mon mari était par terre avec la tête au sol... Il a chuté à cause d’un pavé déchaussé et a fortement cogné son front", détaille Patricia. 

"Il a directement eu un hématome horrible sur le front, ça grossissait à vue d’œil. Il s’est mis aussi à saigner du nez et avait une douleur dans les côtes", ajoute-t-elle. Un hématome qui est encore bien visible aujourd’hui. 

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Mais Patricia a eu peur que ce soit plus grave: "Je pense sincèrement que ça aurait pu être plus grave, qu’il aurait pu mourir ou se faire une fracture du crâne… Quand je l’ai vu immobile au sol, j’ai eu très peur", nous dit-elle. 

Plus de peur que de mal donc pour Alphonse et Patricia, parce que la conséquence aurait pu être bien pire. Patricia en avait d’ailleurs déjà fait les frais il y a une dizaine d’années dans le quartier des Marolles: "Ça me pose question parce que moi aussi j’ai déjà eu un accident à cause du même problème. J’ai perdu 6 ou 7 dents, j’ai eu la lèvre fendue, et une dent qui sortait", nous explique-t-elle.

Mais à l’époque, elle n’avait entrepris aucune démarche pour obtenir des indemnités. Aujourd’hui, Patricia se demande qui est responsable lorsqu’une personne chute à cause du mauvais entretien d’un trottoir. "Ce qui me dérange dans l’histoire c’est que ça arrive souvent à Bruxelles, on voit souvent des gens qui s’accrochent et chutent. Il faut faire quelque chose contre ça", déplore-t-elle. "C’est la 3e fois que je tombe sur un pavé", surenchérit son mari.

Des recours sont possibles 

Qui est responsable de l’entretien d’un trottoir ? La commune ou la Région ? Les victimes peuvent-elles espérer recevoir une indemnité lorsque les conséquences sont lourdes ? Et enfin, quelles démarches faut-il entreprendre ? 

Denis Gouzée, avocat spécialisé en droit à l’assurance nous répond. Pour lui, c’est plutôt la commune qui est responsable. Mais attention, certaines voiries sont régionales. Il faut donc veiller à bien vérifier ce point avant de se lancer dans un recours.

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Dans le cas de Patricia et son mari, c’est bien la commune d’Ixelles qui est responsable de l’entretien des trottoirs de la rue Américaine. Il y a deux fondements juridiques à la responsabilité dans ce type de cas, que détaille Me Gouzée: 

  • Le premier, c’est l’article 135 de la loi communale qui oblige les communes à veiller à ouvrir à la circulation des voiries sûres et en bonne état. C’est une obligation de moyen ;
  • Et le deuxième fondement juridique, le plus efficace, qui est l’article 1384 sur "le vice de la chose". Cet article dit que la commune est gardienne du trottoir, et en sa qualité de gardien, elle est responsable si le trottoir présente une caractéristique anormale. C’est par contre le tribunal qui estime si oui ou non il y a une caractéristique anormale et quelle en est la gravité.

Rassembler le plus de preuves et constituer un dossier complet est primordial 

Ce qui est très important quand on est victime de ce drame c’est de constituer un dossier rapidement, insiste Me Gouzée. Il faut donc impérativement penser à :

  • Contacter la police le plus rapidement possible pour qu’il y ait un constat qui soit fait ;
  • Recueillir le maximum de témoignages sur place ;
  • Faire des photos du trottoir ou du vice en question ;
  • Apporter des preuves des soins qui ont été prodigués suite à la chute. 

"Dans ce genre de dossier c’est vraiment fondamental et impératif d’apporter un dossier complet car la difficulté c’est la preuve, et si on n’apporte pas un dossier complet au magistrat, il est très difficile d’obtenir gain de cause", développe Me Gouzée qui a déjà dû défendre plusieurs fois des victimes dans des dossiers de ce type. "C’est récurrent", avoue-t-il.

D’après son expérience, les victimes peuvent être dédommagées, "et ça arrive souvent d’ailleurs". Me Gouzée explique qu’il s’agit des mêmes règles d’indemnisation que pour un accident de circulation. Par contre, pour le dédommagement, "ça dépend vraiment de l’importance du vice qui affecte le trottoir et ce sera au bon vouloir du juge", explique-t-il. 

Entre janvier et mai 2023, 800 pavés ont déjà été remplacés à Ixelles

En 2023, rien que pour la commune d’Ixelles, c’est déjà 800 pavés et 12 kilomètres de trottoirs qui ont été remplacés, nous explique Yannick Piquet, échevin des Travaux publics à Ixelles. "A Ixelles, on a créé un plan trottoir qui vise en plusieurs étapes à faire des interventions ponctuelles sur l’espace public pour ne pas que cela s’aggrave", ajoute-t-il.

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Mais concrètement, comment ça marche ? Chaque semaine, un contrôleur de travaux parcourt entre un demi et 1 km de trottoir avec sa bombe de peinture afin de vérifier l’état des trottoirs. Et si un pavé est déchaussé, "le contrôleur va l’entourer, et ensuite, il est directement suivi par une équipe d’intervention donc des paveurs communaux, qui eux procèdent concrètement à la réparation de chaque pavé", détaille Yannick Piquet. 

Le marquage au sol permet également de signaler aux riverains que des travaux vont être entrepris dans les prochaines semaines afin de réparer les pavés en question.

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"Le fait d’avoir ces contrôleurs qui parcourent en permanence le territoire communal permet d’augmenter la durée de vie de nos trottoirs, et de faire des réparations plus rapidement", ajoute l’échevin.

L’entretien des trottoirs, une tâche compliquée pour les communes 

"C’est une problématique compliquée", avoue-t-il. "A Ixelles, il y a 150km de trottoirs communaux, et c’est compliqué car si on ne remplace pas le pavé déchaussé tout de suite, ça va entrainer un déchaussement de plus en plus large des autres pavés autour puisqu’ils ne sont plus solidifiés entre eux", précise Yannick Piquet. "C’est pour ça qu’on essaie d’intervenir le plus rapidement possible".

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Généralement, après le passage du contrôleur, le pavé est réparé ou remplacé dans les 3 semaines grand maximum, nous assure-t-il. 

Des outils communaux à la disposition des victimes  

Si vous vous retrouvez un jour dans la même situation que Patricia et son mari, il existe des voies de recours au sein de la commune d’Ixelles également, précise Yannick Piquet qui détaille : 

  • D’abord, la commune a pris une assurance spéciale responsabilité civile auquel chaque riverain peut demander, c’est via le service juridique de la commune d’Ixelles qui est gratuit et peut vous conseiller (via ce lien) , 
  • Et également un ombudsman (médiateur) indépendant qui règle tous les conflits entre l’administration et les citoyens (via ce lien). 

Un budget conséquent pour l’entretien des trottoirs 

Au total, le budget de réparation des trottoirs s’élève à 600.000 euros chaque année, rien que pour la commune d’Ixelles. 

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